Y aura–t-il une opération Marhaba, dite Traversée du détroit du côté espagnol cette année ? C'est la question qui taraude les autorités espagnoles en ce moment. En ce début de juin, alors que l'opération devait être sur le point d'être lancée mi-juin, Madrid qui aspire à un retour à la "vie normale", multiplie les signaux pour convaincre son voisin. Le ministre espagnol de l'Intérieur, Fernando Grande-Marlaska avait annoncé que l'opération, qui démarre initialement le 15 juin devrait accuser du retard. À cette même occasion, il a annoncé la tenue d'une réunion, par écrans interposés, le 10 juin, entre les pays concernés par ce vaste mouvement de déplacements de personnes et de véhicules. Il s'agit bien entendu du Maroc, de l'Espagne, de la France, de l'Italie, de l'Allemagne, etc… Les propos du ministre espagnol apparaissent comme un ballon d'essai à l'adresse des autorités marocaines. La presse espagnole est unanime à souligner que Madrid attend que Rabat fasse le premier pas et annonce la couleur. Or, du côté de Rabat, ce dossier ne semble pas être prioritaire, du moins pour le moment. De plus les mesures sanitaires particulières, adoptées dans chacun des pays concernés, ne facilitent pas la concertation sur le sujet. Il semblerait aussi que les efforts du royaume sont concentrés sur les moyens à mettre en place pour rapatrier les Marocains bloqués à l'étranger. En revanche, Madrid nourrit l'espoir que cette opération, qui ravigote l'économie espagnole, puisse être maintenue cette année et ce malgré les circonstances exceptionnelles. C'est ce qu'ont déclaré des sources de ce ministère à l'agence EFE. Celles-ci estiment que l'opération n'est pas annulée mais seulement reportée. Toutefois, une source diplomatique marocaine en Espagne estime que cet été sera spécial à plus d'un titre. Les autorités marocaines s'abstiennent de confirmer l'annulation pure et simple de ce grand déplacement de voyageurs d'origine marocaine en provenance des pays européens. À y voir de plus près, il est somme tout logique que cette édition de l'opération Marhaba soit annulée. Les efforts colossaux consentis par les autorités marocaines pour prévenir la propagation du virus, pourraient partir en vrille si des milliers de personnes débarquent au Maroc durant la période estivale. Pour dire qu'il est impossible d'envisager un retour des MRE à partir de ce mois de juin. Une réalité qui n'empêche pas les autorités espagnoles de garder espoir. Les ports espagnols se préparent. Le terminal d'Algesiras, qui s'accapare le gros lot du trafic s'est équipé de caméras thermiques dans les terminaux à destination de Tanger-Med et Sebta. Ce n'est pas tout. L'Espagne n'arrête pas d'essayer de convaincre que cette opération pourrait être réalisée tout en respectant les mesures de précaution nécessaires dans des espaces où seront appelés à se concentrer des milliers de voyageurs. Côté Maroc, on attend avec impatience le retour des MRE et leurs devises. En plus des nationaux, les opérateurs touristiques misent gros sur cette clientèle pour sauver la saison estivale. Mais pour l'heure, c'est le brouillard total. Aucune visibilité n'a été donnée quant à l'ouverture des frontières alors que des destinations concurrentes ont déjà annoncé une date. En Tunisie, par exemple, les frontières terrestres, maritimes et aériennes seront ouvertes le 27 juin. Au Maroc, des informations parlent d'une réouverture qu'en septembre. Une opération d'envergure Rappelons que l'opération Marhaba 2019 a enregistré plus de 2,9 millions de Marocains résidant à l'étranger (MRE), soit une hausse de 4 % par rapport à 2018. Le port Tanger Med est la principale porte d'entrée pour les MRE avec une part de 23 % du total des entrées, suivi de l'aéroport Mohammed V (12 %). Le nombre d'entrées de MRE a enregistré une croissance annuelle moyenne de 5 % au cours de ces cinq dernières années. Par ailleurs, 44 % des MRE ont rallié le Maroc par voie aérienne tandis que 38 % ont choisi la voie maritime. Ainsi, les entrées par voies terrestre et aérienne ont gagné 5 points par rapport à la campagne 2018, alors que la voie maritime a enregistré un recul de 5 points. De même, l'examen des entrées par bureau, entre 2018 et 2019, affiche une hausse des entrées au port d'Al Hoceima de 181 % et Melilla et Sebta (61 %).