Critiquée depuis la chute de Bouteflika, l'approche menée pour développer l'industrie automobile en Algérie prend fin avec l'adoption d'une Loi de finances complémentaire qui annule le régime préférentiel jusqu'ici mis en place pour l'importation de lots en SKD/CKD destinés au montage des véhicules. Mort-né ou inversement. Voilà comment on pourrait qualifier le pseudo-programme stratégique lancé il y a environ cinq ans pour disposer d'une industrie automobile en Algérie. À l'époque, deux impératifs prévalaient pour justifier cette approche : d'une part baisser le montant des importations qui plombent les réserves de changes du pays, d'autre part sauver la face par rapport à un Maroc plus ouvert vers l'Atlantique et sur le monde et ayant déjà entamé une vaste avancée dans sa stratégie en la matière. En effet et après avoir réussi à constituer tout un écosystème de sous-traitance pour fournir son industrie, le royaume était devenu dès 2014 le deuxième producteur automobile d'Afrique avec plus de 400 milliards de dirhams à l'export et plus de 70.000 emplois dans cette filière. Des chiffres qui ont largement été dépassés depuis lors, tout comme l'arrivée de nouveaux groupes sur le territoire dont PSA et de nouveaux équipementiers. De son côté, l'Algérie a veillé à contraindre les concessionnaires à produire localement via des partenariats avec des marques étrangères. Sauf qu'au lieu de développer une véritable industrie locale, notre voisin de l'Est et ses entreprises se sont contentés de faire de l'assemblage ou plutôt du «remontage» automobile à partir de kits CKD (Completely Knocked Down, soit des pièces «complètement démontées») et SKD (Semi Knocked Down, pièces «partiellement démontées»). Cette politique d'importation de véhicules importés en morceaux dans des cartons (photo) avait tout de même séduit plusieurs constructeurs (Renault, Seat, Volkswagen, Daimler, Hyundai, BAIC, Kia...), qui étaient attirés par l'exonération des taxes douanières et de la TVA. Cependant, elle a vite touché le fond avec non seulement une série de scandales de corruption mais surtout la flambée de la facture de l'importation des kits et avec elle le coût final proposé aux acheteurs. Aujourd'hui, le coronavirus a non seulement obligé la fermeture de ces ateliers d'assemblage de voitures importées à l'état démonté mais il a également précipité un constat : celui de l'échec de l'industrie automobile algérienne. Un échec klaxonnant qui vient d'être officiellement mais indirectement reconnu par le gouvernement d'Abdelmajid Tebboune. Ce dernier a adopté, en tout début de semaine, une Loi de finances complémentaire qui annule le régime préférentiel qui encadrait jusqu'ici les importations de kits de CKD/SKD servant à l'assemblage automobile. Le même Conseil de ministre a approuvé la loi autorisant à nouveau «l'importation de voitures neuves de tourisme par les concessionnaires automobiles».