Dans le tant attendu « La Vérité » de Hirokazu Kore-eda, Catherine Deneuve est époustouflante en actrice diva qui prend toute la place. Un film qui a ouvert le bal des festivités de cette 76e édition de la Mostra de Venise. Tapis rouge digne de l'ouverture du plus ancien festival de cinéma au monde. Catherine Deneuve, Juliette Binoche se tenaient autour du réalisateur japonais à succès, Hirokazu Kore-eda, palme d'or 2018 pour une Affaire de famille. Celui qui change de registre, de pays et de langue, s'attaque à un film français avec un casting international sans parler ni anglais ni la langue de Molière. « C'était un exercice original, très complexe », confie Catherine Deneuve. « La première semaine a été un peu plus difficile parce qu'il fallait s'habituer à écouter quelqu'un et regarder quelqu'un d'autre puisque tout passait par le traducteur du plateau. Ce qui oblige, et c'est pas mal, à ne dire que des choses essentielles. Il n'y a pas eu de bavardage dans ce tournage ! ». Encore une affaire de famille Si le réalisateur de talent japonais s'aventure en France dans un autre pays et une autre culture en dirigeant des acteurs avec qui il ne peut pas communiquer, il n'en demeure pas moins qu'il reste fidèle à son thème de prédilection : la famille. Il raconte l'histoire de Fabienne, star de cinéma adulée et entourée, qui décide d'écrire ses mémoires. Sa fille Lumir, brillamment campée par Juliette Binoche, revient à Paris de New York où elle vit avec son mari (Ethan Hawke) et sa petite fille. Scénariste exilée dans un autre pays, on comprend vite qu'elle s'est éloignée de sa mère et de son aura. Une confrontation qui va révéler des vérités pas faciles à entendre et à comprendre. Des non-dits, une explosion et une implosion et un choc d'actrices au milieu d'un noyau familial créé par Kore-eda. Catherine Deneuve et Juliette Binoche forment un duo épatant. « J'ai toujours voulu jouer avec Catherine, je suis fan de Peau d'âne depuis toute petite ! », confie l'actrice du Patient Anglais. Celle qui connaît Kore-eda depuis 14 ans et qui a toujours voulu travailler avec lui se dit ravie de cette collaboration. « Je n'avais pas compris au départ la portée comique du film. Pour moi, ce n'est pas un film comique. Le réalisateur au départ s'amusait à bouger pendant mes prises et lors d'une scène de confrontation avec ma mère, je ne me sentais pas de rire, j'ai pleuré ! », confie l'actrice qui a ressenti une scène différemment et l'a jouée comme elle la ressentait. « Le lendemain, le réalisateur est venu me dire que j'avais su apporter de la profondeur à la scène. Ce fut un tournage fascinant ! ». En effet, dans ce film, le réalisateur japonais a misé sur une comédie. Son style est le même : fin et précis. Le début du film est incroyable, on oublie presque qu'il s'agit d'un film japonais en français, mais certains détails le rappellent : cette fascination pour les personnages forts, des plans au ralenti, une lenteur voulue et maîtrisée, l'esthétique et la précision. Rien n'est laissé au hasard. Et surtout, le sens du rythme, la musique, les dialogues. Le réalisateur japonais signe un film profond et intelligent. On le retrouve avec cette montée en puissance de la fin qu'il maîtrise comme personne. Hirokazu Kore-eda a pris un risque et il le réussit haut la main ! « Cette actrice n'est pas moi, je ne suis pas ce genre d'actrice dans la vie ou sur un plateau, mais quand on joue, on laisse une partie de soi dans le rôle, c'est évident. On y met du soi », précise Catherine Deneuve flamboyante dans Fabienne. « C'est un plaisir attendu de jouer avec Juliette Binoche. Nous nous connaissons depuis des années, mais c'est vrai que l'on n'a jamais eu l'occasion de travailler ensemble. Je suis contente que ce soit fait dans ces conditions et pour ce film ». Un film d'une belle allégresse. Trop tôt pour dire si le réalisateur japonais se verrait récompenser sa prise de risque, mais ce qui est sûr c'est qu'à chaque fois, Hirokazu Kore-eda sait embarquer un public qui en redemande toujours. Un prix d'interprétation pour Catherine Deneuve ? Un grand oui.