Le marché des crédits à la consommation commence à laisser paraître quelques signes d'essoufflement. Est-ce ce qui motive la visite du wali de Bank Al Maghrib aux locaux de l'Association professionnelle des sociétés de financement (APSF) ? C'est en effet la première fois que Abdellatif Jouahri présidera le conseil d'administration de cette association professionnelle devant se tenir demain jeudi et qui sera l'occasion pour les professionnels de débattre de la situation du secteur. Bien que l'encours de ces crédits s'élève à 38,5 milliards de DH à fin septembre 2009, soit une progression de 16,4% par rapport à la même période en 2008, des professionnels estiment que le marché est pénalisé par certaines mesures qui privent les établissements de crédit d'une clientèle potentielle non négligeable. Les fonctionnaires ont de moins en moins accès au crédit Première cible impactée: les fonctionnaires. Alors que ces derniers pouvaient contracter un crédit à condition de ne pas descendre sous le seuil de 1000 DH, hors allocations familiales, ce seuil a été revu à la hausse pour atteindre 1.500 DH, suite à une décision de la Trésorerie générale du royaume. «Avant, nous pouvions accorder des crédits à des personnes dont le revenu ne dépassait pas les 1.500 DH. Maintenant, les établissements de crédit sont privés de cette clientèle, bien qu'elle dispose tout de même d'une capacité de remboursement de 500 DH» déplore Younes Tahiri, responsable de la direction des contrôles des risques au sein d'Eqdom. Même constat pour les crédits auto. Une progression de 9,8% a été réalisée à fin septembre 2009, pour un encours supérieur à 13 milliards de DH. Bien que la performance soit positive, ce résultat inquiète quelque peu les professionnels. Certains y voient les signes précurseurs de la saturation du marché automobile. Cependant, d'autres imputent la «mollesse» du marché à la majoration de la TVA sur la location avec option d'achat (LOA). Une hausse qui va du simple au double puisque la TVA est passée de 10 à 20%. Et la crise dans tout cela ? Les crédits à la consommation auraient-ils été épargnés ? «Il est certain que notre secteur en a pâtit», nous précise Y. Tahiri, «La majoration de la TVA a certes eu un impact négatif sur l'encours des crédits auto, mais les effets de la crise se sont aussi fait ressentir». Les crédits d'équipement domestique rattrapés par la crise ? Pour illustrer les propos du responsable de la direction des contrôles des risques d'Eqdom, l'exemple le plus frappant concerne les crédits pour équipements domestiques et autres crédits (hors prêts personnels). A fin septembre 2009, l'encours de ces crédits n'a pas dépassé 1,139 milliards de DH, accusant ainsi un repli de 27,2%. Un résultat négatif qui confirme que la crise mondiale n'a pas épargné le Maroc, malgré des discours officiels se voulant rassurants. La réunion de Abdellatif Jouahri avec l'APSF sera peut-être l'occasion de donner un second souffle au secteur. Elle permettra aux professionnels de se montrer proactifs avant que la situation ne se dégrade vraiment. En effet, la fermeture, voire la faillite de plusieurs unités de production a eu de facto un impact négatif sur les créances en souffrance. Des milliers de salariés s'étant retrouvés du jour au lendemain sans ressources, et donc dans l'incapacité d'honorer leurs traites. Autant de dossiers que les établissements de crédit pourront consulter sur la centrale des risques, quand elle sera à 100% opérationnelle en janvier 2010. La centrale présenterait encore des bugs, d'après les professionnels. Toutefois, ces derniers s'étonnent du coût de la consultation des dossiers. «Chaque consultation est facturée en moyenne entre 12 et 18 DH. Vous imaginez le surcoût que cela engendre pour un établissement qui gère des milliers de dossiers ? C'est une option qui n'est pas réaliste». Pour Younès Tahiri, il faut réfléchir d'urgence à des mesures qui empêcheraient le secteur du crédit à la consommation de sombrer dans le marasme, tant qu'il est encore temps. L'APSF s'active A l'occasion de la réunion de l'APSF au titre de l'exercice 2009, qui se tiendra demain jeudi 3 décembre, les professionnels reviendront sur la situation du secteur, en présence du gouverneur de Bank Al Maghrib, Abdellatif Jouahri. Les principaux points qui seront abordés au cours de cette réunion ont trait à l'évolution de l'activité en 2009, ainsi que l'adoption du plan d'action pour 2010. Jusqu'à fin septembre, les sociétés de crédit-bail et les sociétés de crédit à la consommation ont enregistré un encours global de 71,3 milliards de dirhams, en progression de 7,8 milliards ou 12,3% par rapport à fin septembre 2008. Les évolutions constatées en 2009 par rapport à 2008 pour ce qui est aussi bien du crédit-bail que du crédit à la consommation montrent une réduction du rythme d'accroissement des crédits par rapport à celui enregistré l'année dernière. Concernant les perspectives d'avenir, le plan d'action 2010 finalisera les chantiers déjà ouverts dans le cadre de l'action professionnelle de l'APSF. Il portera notamment sur le crédit bureau qui vient de démarrer, sur la mise en place du médiateur de l'APSF (dispositif de médiation destiné au traitement «à l'amiable» des litiges avec la clientèle), l'organisation des premières assises nationales du factoring (en février ou en avril 2010), la bonne gouvernance, et sur la lutte contre le risque de surendettement des ménages et contre la fraude