Avec «Faces Project», Badr Bouzoubaâ expose des visages sans filtre. Une exposition qui se tient du 17 janvier au 28 février à la Galerie 121 de l'Institut Français de Casablanca. S'arrêter sur l'humain quelques instants, oublier de poser, ne pas faire semblant, être soi-même. C'est ce que propose le photographe Badr Bouzoubaâ avec «Faces Project», travail qui pointe du doigt cette tendance consistant à se prendre constamment en photo, en usant de techniques pour être sous son meilleur jour. Le photographe revient à la base: être soi-même. «Faces Project est né lors d'une expérimentation de lumière sur des amis. J'ai remarqué que lorsqu'on demande à quelqu'un de ne pas poser, quelque chose de beau, de naturel et de saisissant se dégage automatiquement de lui», confie le photographe, qui casse les codes de cette génération à la recherche du filtre parfait pour engranger le plus de «likes» possibles.Avec Badr Bouzoubaâ, ce sera sans filtre! «Je ne fais que questionner notre époque et son rapportà l'image», indique-t-il, ayant toujours été fasciné par le monde du cinéma et de l'image, avec un attrait particulier pour l'aspect esthétique. Après une formation dans une école audiovisuelle et une expérience professionnelle enrichissante dans une boîte de production, le photographe en lui se réveille et se révèle. Il décide de s'adonner à sa passion à 100%. Une sensibilité à fleur de peau et une vision singulière feront de lui un artiste dont les photographies ne passent pas inaperçues. «Je ne pense pas avoir quelque chose de particulier par rapport aux autres photographes; chacun a sa sensibilité, sa vision», continue celui qui se dit s'inspirer d'artistes tels qu'Andrzej Dragan dont les portraits ont un style très marqué, ou encore de Platon ou encore de David LaChapelle. Avec «Faces Project», le photographe va à contre-courant et propose des portraits minimalistes où le visage est roi, où l'on fait attention aux traits, au regard, aux expressions, capturés en un clic, sans laisser le temps à la personne de faire «le beau». «La beauté est naturelle: le naturel en nous l'emporte toujours quand on le laisse s'exprimer», précise l'artiste, avant d'ajouter: «Cela ne s'est pas fait par casting. Cela a commencé avec des amis, puis les portraits ont fait un petit buzz sur les réseaux sociaux, ce qui a poussé des gens à me contacter pour faire l'expérience». Des photos en noir et blanc, sans artifice, histoire de remettre les choses en place. «Nous connaissons actuellement une sublimation constante de nous-mêmes à travers nos selfies et nos «moments» postés de manière régulière -voire obsédante- sur les réseaux sociaux. Instagram, Twitter, Facebook, Snapchat... la génération 2.0 ne jure que par cela afin d'exister dans une société en pleine mutation. Des filtres par-ci, des effets par-là... Bref, tout ce qui peut nous montrer au meilleur de notre forme physique et psychique», explique Yassmine Laraki, commissaire de l'exposition. Face à cette surexposition, à ces représentations à volonté, Badr Bouzoubaâ est allé puiser l'essence de l'être à travers sa mise à nu. «Sans fioritures, un décor minimaliste pour percer ce qui fait respirer et «vivre» chacun de nous: notre âme. Les yeux fixant l'objectif, une expression neutre afin de laisser s'échapper l'indicible, ce qui est incontrôlable en nous. Tout ce que nous voulons voiler dans la société qui nous dicte quoi faire, comment agir, sort de manière instinctive. Il en résulte des clichés d'hommes et de femmes libérés de tout artifice». Une exposition pleine de fraîcheur et débordante d'humanité, qui pose les bonnes questions et fait réagir à la société 2.0. Un travail sur cette face cachée de l'être humain qui préfère montrer une autre facette de sa personnalité, celle qui contentera l'autre. Mais difficile de mentir à un Badr Bouzoubaâ qui ne perd pas la face avec son «Faces Project»... À découvrir du 17 janvier au 28 février à la Galerie 121.