Cinq cabinets d'audit mandatés par la Fédération royale marocaine de football (FRMF) épluchent les comptes des clubs professionnels. Eclairage sur cette mission avec Abdelaziz Talbi, l'auditeur en chef du football. «Le meilleur des élèves n'atteint même pas la moyenne». C'est le verdict sévère mais réaliste d'Abdelaziz Talbi, président de la Commission nationale de contrôle de gestion (CNCG) au sein de la Fédération royale marocaine de football (FRMF) au sujet la gestion des finances et la gouvernance des clubs de la Botola Pro. Avec toute la précaution du commissaire aux comptes, Talbi a livré son diagnostic de la situation des clubs professionnels lors des Journées nationales du football. Il a proposé ses solutions pour sortir la gestion footballistique du rouge. Lourd passif Eté chargé en perspective pour les clubs du football professionnel. Cinq cabinets d'audit ont été mandatés par la FRMF pour diagnostiquer la situation financière des clubs et préparer la mise en œuvre du cahier des charges pour la saison 2016-17. «Les conclusions vont nous permettre d'accélérer la transformation en SA et structurer les finances des clubs», annonce Talbi. La CNCG inspecte les finances des clubs depuis deux ans. De ce premier audit, Talbi commente non sans inquiétude : «ce qui est frappant ce sont les différences entre le premier et le dernier de chaque catégorie». Toutefois, le président de la commission tempère ses propos : «on constate un progrès et tous les clubs peuvent mieux faire». L'endettement excessif des clubs est un des facteurs qui inquiètent le plus la CNCG. «Dans certains clubs, la structure budgétaire est complètement déséquilibrée. Il y a du surendettement et même des clubs avec des actifs inférieurs aux dettes. Ils sont dans une situation de net négatif», analyse Talbi. Selon les estimations des Inspirations Eco émises en septembre dernier, 12 clubs sur 16 de la Botola Pro étaient situation de déficit budgétaire (Cf :www.leseco.ma). L'audit de la CNCG s'intéresse à l'ensemble des indicateurs financiers. «Les arriérés de paiement, les arriérés de créances, le fond de roulement et le résultat net, sont des indicateurs que nous étudions», insiste Talbi. Malgré la situation inquiétante des finances d'un grand nombre de clubs (Raja, WAC, MAS, MAT, KAC, etc...), la CNCG préfère ne pas sévir pour le moment. «Si on applique les textes, ces mesures auront un effet de bombe atomique sur le monde football au Maroc», prévient Talbi. La commission plaide pour une approche «pédagogique». «Cette prochaine saison est une année de transition. Nous avons opté pour une approche pédagogique et d'accompagnement des clubs qui ont d'ailleurs une volonté réelle de changer de cap», ajoute-t-il. En plus du contrôle, la FRMF vient de relever le ratio des ressources propres nécessaires pour chaque club de la Botola Pro. Il passe de 14 à 20 millions de DH par saison, hors subventions et droits TV versés par la FRMF. «Ce chiffre ne veut pas dire grand-chose. Les recettes des clubs varient fortement d'une année à une autre», rappelle Talbi. En attendant la grande transformation en SA pour la saison 2017-18, les clubs doivent se conformer d'abord au cahier des charges dans sa version révisée pour la saison 2016-2017. À l'épreuve du cahier des charges Le cahier des charges de la Botola Pro 1 et 2 est un document élaboré par la CNCG. Il fixe les critères de participation des 16 clubs à cette compétition. Il s'est fixé trois mots d'ordre : professionnalisme, gouvernance, transparence. Talbi prône une transformation de la FRMF et de la CNCG en régulateur du football national, «à l'image de ce que l'ANRT est pour les télécoms», compare-t-il. Le document actuel est pluriannuel (trois saisons). Le cahier des charges se décline en 40 critères, classés en trois types: sportif (5), infrastructures (13) et gouvernance et gestion financière (22). «Cette dernière famille de critère est le point faible des clubs», note Talbi. Le document compte est très précis sur cet aspect. Les critères financiers se déclinent en 30 sous-critères en lien avec l'acquisition et le transfert des joueurs ou leurs contrats. Les trois familles de critères se classent entre les obligations conditionnant la participation à la compétition, les obligations impératives, qui dans le cas du non-respect sont passibles de sanctions et enfin les obligations facultatives mais nécessaire à la bonne gestion d'un club. Ce dispositif sera mis à l'épreuve à partir d'août prochain avec le coup d'envoi de la Botola Pro. Abdelaziz Talbi Président de la Commission nationale de contrôle de gestion (CNCG) En plus du cahier des charges, la commission a établi une grille d'évaluation en concertation avec les clubs. Tout ce travail se fait en échange permanent avec les clubs. La priorité est le retour à l'équilibre financier, en plus du passif qui doit être assaini. Ceci passe par une gouvernance garantissant la continuité de la gestion du club, avec une stratégie et une vision sur le long terme. Pour y arriver, la transformation des associations en SA est nécessaire car l'un des handicaps majeurs de pratique de football est qu'elle se base sur la structure institutionnelle qui est celle de l'association. Tags: Football clubs finances FRMF