Rachid Tahri : Président de l'Association des Freight Forwarders du Maroc (AFFM) Aujourd'hui 60% du transport est externalisé. Dans ce contexte, de l'avis des experts, il ne s'agit que d'une relative mutualisation qui mérite d'être largement améliorée. Rachid Tahri, président de l'Association des freight forwarders du Maroc (AFFM) dresse un état des lieux du marché et livre les pistes d'amélioration. Les Inspirations ECO : Quel état pouvons-nous dresser de la mutualisation des transports au Maroc ? RACHID TAHRI : Aujourd'hui, 60% du transport est généralement externalisé. Nous pouvons considérer qu'il y a une certaine mutualisation au niveau du transporteur. Cependant, il y a tout de même lieu de souligner que les niveaux de mutualisation peuvent être largement améliorés. Plus spécifiquement, il y a un grand travail à faire au niveau du retour à vide. Tous les flux ne sont pas contrebalancés. Beaucoup de camions retournent encore à vide. Dans ce contexte, il convient de dire qu'il manque sur le marché national un acteur majeur, à savoir une bourse de fret, qui permette de mettre en relation des expéditeurs de part et d'autres ainsi que des transporteurs, ceci de manière à ce que le prix de la prestation de transport soit beaucoup plus compétitive et moins cher. La mutualisation commence justement à ce niveau là. L'intervention d'une troisième partie ; cette opération sera bénéfique pour les deux autres. Cette démarche ne requiert-elle pas une culture de la mutualisation ? Très certainement, oui. Cette culture n'est pas encore ancrée au Maroc. Dans les activités à l'international, chaque commissionnaire au Maroc a une multitude de commissionnaires à travers le monde, qui sont chargés de lui trouver la meilleure solution pour transporter la marchandise et ces derniers ne facturent que la prestation. Il s'agit d'un système déjà très bien rodé. Au Maroc, si cette prestation existait, nous n'aurions pas besoin de fret. Avant 2013, l'Office national du transport (ONT) se chargeait de cette mission ou prestation en mettant le transporteur en relation avec l'expéditeur, lequel transporteur n'avait pas besoin de faire de commercial. Avec la libéralisation du transport, cet office s'est transformé en société, ce qui a donné lieu à la SNTL aujourd'hui. Globalement, sur cette question, il faut dire qu'il est encore trop tôt pour parler de mutualisation au Maroc. Les transporteurs sont actuellement en pleine réorganisation de leurs structures en attendant d'opter pour un de ces deux schémas : les commissionnaires ou le système de bourse de fret. S'agissant de la synchronisation des modes de transport, comment cette dernière s'effectue-t-elle ? Il s'agit d'un système que nous appelons dans notre jargon la multi-modalité. C'est ce que nous faisons au sein de l'AFFM. Nous cherchons le meilleur moyen de transport pour permettre de mutualiser les différents types de transport. En prenant une marchandise à transporter, le rôle du commissionnaire est de chercher la meilleure solution à travers l'utilisation des différents modes pour une mutualisation des opérations et l'acheminement d'une marchandise en fonction de son type, des problèmes de délais d'acheminement ou encore de la valeur de la marchandise (le coût du transport ne devant pas dépasser un certain taux). Sur le volet logistique, comment s'organise le travail de mutualisation ? Au niveau de la logistique, nous y travaillons encore avec le ministère de l'Equipement et du transport. Des études sont actuellement menées dans ce sens. Pour qu'il y ait mutualisation, il faut qu'il y ait au préalable une externalisation de la fonction logistique. Nous travaillons justement sur le mode à travers lequel nous pouvons attirer les opérateurs et les convaincre de la démarche d'externalisation de leur logistique. C'est en travaillant sur la mutualisation que nous pouvons convaincre des entreprises d'externaliser leur logistique parce qu'une logistique externe ne peut être compétitive et présenter un coût attractif que si elle est mutualisée.