L'innovation n'aura jamais autant payé que depuis la mise en place d'une stratégie dédiée au niveau du département de l'Industrie, du commerce et des nouvelles technologies. Aujourd'hui, l'idée de «regrouper» pour se «développer» est particulièrement recommandée. Mieux, elle est même subventionnée. C'est ainsi qu'un programme ambitieux, donc, qui vise à stimuler et accompagner 15 clusters industriels et technologiques et à favoriser l'émergence de 100 projets collaboratifs innovants d'ici 2013 a été inscrit en droite ligne avec la stratégie Maroc Innovation pour la création de 1.000 brevets marocains et la création de 200 start-up à l'horizon 2014. Pour la mise en oeuvre de cette stratégie, un fonds d'appui aux clusters, doté d'une enveloppe de 62 millions de DH pour la période 2011-2013, a été mis en place notamment pour le financement des clusters sélectionnés. «Notre démarche consiste à accompagner les entreprises, notamment les PME/PMI et les acteurs les plus volontaristes et les plus capables de constituer des clusters de haut niveau, porteurs de stratégies de développement significatives pour leurs secteurs respectifs, et pour lesquels l'innovation est un facteur central de compétitivité», expliquent d'emblée les responsables au sein du département de Ahmed Réda Chami. La mise en place du fonds d'appui fait donc office de contribution de l'Etat. Concrètement, des subventions seront accordées pour soutenir la mise en place et au fonctionnement des structures d'animation des clusters sélectionnés. Elles s'inscrivent dans le cadre de contrats-programmes qui engagent ces clusters sur des indicateurs précis tels que le nombre de projets collaboratifs réalisés, les brevets déposés et le nombre de start-up créées. Concernant le financement des projets collaboratifs de recherche et développement des clusters, il se fera à travers le programme «Tatouir», qui fait partie du nouveau dispositif de financement de l'innovation et dont la gestion sera assurée par le Centre marocain de l'innovation. Pour décrocher le sésame S'agissant de la sélection des clusters, le ministère de tutelle indique qu'elle s'opère par le biais d'un appel à projets destiné à «identifier et sélectionner les meilleurs clusters opérant dans les secteurs industriels et technologiques, en vue de les accompagner et les soutenir à travers le dispositif d'appui aux clusters». Aujourd'hui, une première étape d'appel à projet a été déjà franchie et a même conduit à la nomination de clusters dont quatre ont été sélectionnés, en ligne finale, et qui ont récemment signé des contrats-programmes avec l'Etat. Un deuxième appel à projet est prévu par le ministère au mois de novembre prochain. «Le deuxième appel à projets est prévu pour novembre 2011, dans le but de labelliser six autres clusters dans les secteurs industriels et technologiques au titre de l'année 2012», souligne-t-on auprès du département de Chami. Sur ce point, les responsables du ministère de l'Industrie, du commerce et des nouvelles technologies, insistent sur le fait que pour faire partie des six chanceux qui seront choisis dans quelques semaines, il faudra satisfaire à certaines conditions très pointues. Impératif justifié, en effet, si l'on prend en compte le fait qu'il y a des subventions en jeu. Néanmoins, les critères en question restent largement à la portée de toute PME-PMI qui cherche son développement. Dans cette optique, les PME-PMI voulant décrocher le sésame de Chami doivent en effet présenter un dossier de candidature qui comprend un dossier administratif et un dossier technique. Ce dernier doit associer une description géographique du périmètre du cluster, mais également des données en termes d'entreprises, d'unités de recherche, de centres de formation qui vont participer à la vie du cluster. Deuxièmement, les candidats doivent préciser les modalités de gouvernance et de pilotage du cluster qui donnent la mesure de la qualité du partenariat, sa stratégie générale, les projets de coopération et de partenariat, ainsi que le système de suivi et d'évaluation mis en place. Le détail crucial L'étape qui précède la préparation du dossier est désormais l'évaluation des candidatures. Ces dernières seront soumises à une grille d'analyse dont les principaux points sont : l'enjeu de l'objectif économique, commercial, technologique et scientifique, la masse critique du cluster, ou autrement dit, le nombre d'entreprises du cluster. D'autres éléments «restent capitaux dans l'évaluation du cluster, tels le nombre, l'identité et la qualité des acteurs réellement impliqués», explique le chargé de communication du ministère. Toujours selon le ministère, les projets de développement du cluster et de coopération à l'international, les synergies entreprise-recherche-formation, les modalités d'organisation de la gouvernance et de l'animation du cluster, sa visibilité internationale, l'enjeu de la composante «ressources humaines et formation», l'ancrage territorial et l'effet réseau, le rôle des structures d'animation dans la création de réseaux collaboratifs, et l'animation des acteurs autour de projets collaboratifs à fort contenu R&D dans les niches et thématiques identifiées, sont autant de facteurs qui font la différence entre les différents projets et qui peuvent augmenter les chances de sélection du cluster. On s'engage ! L'étape la plus cruciale, étant la définitive, est celle du contrat-programme. C'est une étape par laquelle sont définies les obligations de l'Etat et des clusters, ainsi que les modalités d'attribution, de versement et d'évaluation du soutien étatique auxdits clusters. Quid du cluster ? Un cluster est un ensemble de décideurs qui créent et entretiennent un système relationnel dans le but de réaliser une croissance de leur chiffres d'affaires et augmenter leur efficacité économique. Autrement dit, il s'agit d'une organisation en réseau reposant sur un projet partagé. Pour les économistes, le cluster est stratégie qui peut être rentable lorsque un ensemble de sociétés est plus efficace qu'une activité consolidée dans une seule entreprise. Cela étant il faut bien le différencier des associations professionnelles. Celle-ci ayant une fonction de défense et de représentation d'un secteur ou d'une activité donnés. Dans le cadre de la stratégie Maroc Innovation, le cluster, en l'occurrence Maroc Numeric Cluster, est une structure à gouvernance mixte Public/Privé regroupant plusieurs acteurs : Etat, Grandes entreprises, PME, opérateurs de l'enseignement et de la recherche et organismes d'aide et de financement avec pour objectif final de faire émerger des projets innovants et à forte valeur ajoutée dans les 4 niches d'excellence TIC du Cluster à savoir : les services mobiles, la sécurité, monétique et droits numériques, le domaine multimédia et les progiciels. Les stars de la première vague À l'issue du premier appel à projets, quatre clusters ont été sélectionnés et labellisés récemment pour bénéficier de l'appui de l'Etat. Le premier consiste en une initiative conjointe du ministère de l'Industrie, du commerce et des nouvelles technologies et des acteurs du secteur des TIC. Il s'agit de Maroc Numeric cluster, qui se donne comme objectif de fédérer l'ensemble des opérateurs de technologies de l'information et de la communication en vue de développer l'innovation sur quatre pôles d'excellence, à savoir les services mobiles, la sécurité, la monétique et droits numériques, le multimédia et les progiciels. Le deuxième cluster, quant à lui, est spécialisé dans les secteurs de l'électronique, la mécatronique et la mécanique. CE3M, pour le nommer, prend ses racines dans le Pacte national pour l'émergence industrielle. Il se veut avant tout être fédérateur d'un ensemble d'acteurs des secteurs électronique mécanique et mécatronique, autour d'une vision commune ayant pour objectif l'émergence de projets d'innovation. Sa mission générale est la contribution à la création de valeur, d'emplois et d'attractivité du territoire par le tissage de liens entres différents acteurs. Le troisième, baptisé Morocco Microelectronics Cluster, opère dans la microélectronique. Il jouit déjà de l'appui de certains leaders mondiaux du domaine tels que ST Ericsson, qui a mis à sa disposition 60 serveurs. S'agissant du dernier cluster, Océanopôle Tan-Tan, il a été créé en janvier 2010 dans le but de développer un pôle d'excellence d'avant-garde en relation avec les ressources, les sciences et technologies de la mer. Son territoire d'activité c'est le port de Tan Tan et la région de GuelmimEs-Semara. Son champ potentiel sera les zones côtières arides du Sud du Maroc. Ce réseau régional regroupe l'ensemble des acteurs du secteur de la mer, les grandes moyennes et petites entreprises, et les associations professionnelles. Sa mission principale est de permettre une amélioration des performances de la filière pêche et de l'optimisation de la valeur ajoutée générée par les produits halieutiques, ainsi que la promotion des initiatives innovantes de la mise en valeur des ressources marines et de contribuer au développement d'un pôle d'excellence d'avant-garde en relation aux ressources, aux sciences et aux technologies de la mer. Concernant le montant de la subvention allouée par l'Etat aux quatre clusters, il s'élève à 17 millions de dirhams. À ce titre, les quatre clusters sélectionnés se sont engagés, au bout de trois ans, à produire 81 projets de R&D collaboratifs et 28 brevets, ainsi qu'à créer 24 start-up et 266 emplois en R&D.