La société civile constate que l'exploitation des ressources du sous-sol camerounais ne profite pas aux populations. Malgré l'admission du pays, depuis 2013, à l'Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE). Les problèmes recensés par les organisations de la société civile en matière de transparence dans les industries extractives au Cameroun sont frappants. «Le premier problème est que toutes les ressources qu'elles extraient sont épuisables, non renouvelables. Deuxièmement, elles génèrent beaucoup de revenus. Dans le contexte du Cameroun, le pétrole, à lui seul, contribue à près de 25% au budget de l'Etat, ce qui est assez significatif. Et à côté des recettes générées par ces ressources, il y a d'autres bénéfices qu'on devrait tirer de l'exploitation. À savoir la création des emplois, le développement des économies locales, etc. D'où le troisième problème, justement. C'est-à-dire qu'on constate que dans nombre de pays, dont le Cameroun, les recettes issues des ressources naturelles ne contribuent pas à l'amélioration des conditions de vie des populations, ni au développement durable», énumère Evelyne Tsague, coordonnatrice pour l'Afrique francophone de Nature Resources Governance Institute. À en croire cette dernière citée par le quotidien gouvernemental Cameroon Tribune, il y a beaucoup de mauvaise gestion à tous les niveaux de la chaîne de décision dans ce secteur ; en amont à partir des questions légales et en aval sur des questions de distribution. «L'autre défi se situe au niveau des contrats. La plupart sont déséquilibrés en défaveur des Etats», dit-elle. Ces constats justifient la conférence organisée les 23 et 24 août derniers à Yaoundé sur le thème: «Les initiatives de surveillance de la gouvernance des industries extractives en Afrique francophone : bilan et perspectives». L'objectif global étant de redoubler de vigilance et de formuler un plaidoyer en vue d'une plus grande transparence dans la gestion des ressources produites par les industries extractives. À cette occasion, la société civile a regretté l'opacité qu'il y a autour de la signature des contrats miniers au Cameroun. «Ces contrats ne sont pas rendus publics, le contexte des négociations n'est pas connu. Le suivi est donc difficile pour nous», a-t-elle regretté. Cette interpellation survient dans un double contexte. Le premier, c'est qu'il y a environ un an, le 17 octobre 2013, le Cameroun était admis, après plusieurs tentatives malheureuses, à l'Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE). Ce jour-là, Alamine Ousmane Mey (ministre des Finances et président du comité de suivi et de mise en œuvre de l'ITIE) avait affirmé que «l'octroi du statut de pays conforme est la reconnaissance du respect par notre pays des règles de l'ITIE. Ces règles constituent aujourd'hui une norme mondialement reconnue en matière de transparence et de gouvernance du secteur extractif.» Le second contexte est que le pétrole était, jusqu'en 2011, la seule ressource extraite en quantité significative du sous-sol camerounais. Le gaz a fait son entrée entre-temps et ses recettes ne peuvent être vraiment comptabilisées qu'en fin 2014. Pour les autres minerais, leur exploitation est encore en préparation. C'est le cas du fer de Mbalam-Nabeba, situé dans le sud-est du pays, de part et d'autre de la frontière avec la République du Congo. La mine qui doit être exploitée par les filiales camerounaises et congolaises de l'entreprise australienne Sundance Resources va nécessiter la construction d'une ligne de chemin de fer de 510 km pour permettre l'acheminement du minerai jusqu'au tout nouveau port en eaux profondes de Kribi, sur la côte atlantique camerounaise. Si l'exploitation proprement dite du minerai est prévue pour commencer en 2019, les experts en font déjà l'un des projets les plus ambitieux du continent. Avec sa capacité de 35.000 tonnes par an pendant 10 ans. billet Sécurité sociale pour tous Le gouvernement camerounais a signé à la mi-août un texte donnant désormais la possibilité aux travailleurs du secteur informel et à ceux de certaines professions libérales de s'affilier individuellement à la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS). Selon les statistiques officielles, si le taux de chômage est de 13%, le taux de sous-emploi, lui, dépasse les 70%. Par sous-emploi, il s'agit de gens qui gonflent les rangs du secteur informel à travers le petit commerce, le transport public par moto-taxis, etc. Résultat des courses : en 2010, Robert Nkili, alors ministre du Travail et de la sécurité sociale, indiquait que moins de 10% de la population bénéficiaient de la sécurité sociale. Donc, ce décret vient remettre de l'ordre en corrigeant, ou mieux, en complétant la loi de 1984 qui fait obligation à toute personne physique relevant du code du travail de s'affilier à la CNPS. Ignorant de ce fait les personnes travaillant à leur propre compte, les avocats, les notaires, etc. Désormais, «ces assurés volontaires» feront partie du portefeuille de la CNPS qui pourra ainsi assurer une plus large couverture de la population active. Toutefois, cette institution affiche une impuissance quant à la maîtrise du secteur formel. Ainsi, les entreprises qui collectent les cotisations sociales de leurs employés sans pour autant les reverser ont pignon sur rue et restent impunies. Alors, comment compte-t-elle procéder pour contraindre ses assurés du secteur informel à cotiser régulièrement ? Telle est la grande question de l'heure. Sans une réponse appropriée, on ne serait pas sorti de l'auberge. Thierry Ekouti, Dir. pub - Le Quotidien de l'Economie (Cameroun)