Treize sociétés bénéficieront de nombreux avantages fiscaux, douaniers et administratifs en vertu d'une loi votée en avril 2013. T reize entreprises ont signé, le 9 septembre dernier avec le gouvernement camerounais, des conventions d'investissement pour un montant d'environ 180 milliards de FCFA, soit quelque 360 millions de dollars. Ces entreprises qui sont nouvelles ou anciennes sur le territoire camerounais sont issues de cinq secteurs d'activités différents, à savoir l'agro-industrie (6 entreprises), l'industrie sidérurgique et métallurgique (3), l'industrie extractive (1), l'industrie chimique (1) et l'industrie du bâtiment (2). Avec ces conventions, ces entreprises vont bénéficier des avantages fiscaux, administratifs et douaniers prévus par la loi du 18 avril 2013 fixant les incitations à l'investissement privé au Cameroun. Et ces mesures incitatives couvrent aussi bien la phase d'installation que la phase d'exploitation. Par exemple, dans la phase d'installation qui est fixée à un maximum de cinq ans après la signature de la convention, la loi prévoit diverses exonérations. Parmi elles, on a celle des droits d'enregistrement des actes de création ou d'augmentation du capital, celle de la TVA sur les prestations de service liées à la mise en place du projet et provenant de l'étranger, celle de la patente, celle des taxes et droits de douane sur tous les équipements et matériels liés au programme d'investissement... Quant à la phase d'exploitation qui, elle, ne saurait excéder 10 ans, les conventions signées le 9 septembre donnent droit à des exemptions ou des réductions pour le paiement de certaines charges. À l'instar des impôts sur les sociétés, sur les bénéfices et sur le revenu des capitaux mobiliers, etc. Avantages administratifs Sur le plan administratif, la loi donne, entre autres, à l'investisseur «le droit de payer directement à l'étranger les fournisseurs non-résidents de biens et services nécessaires à la conduite de ses activités». Ce texte permet aussi «le libre transfert des dividendes et du produit de la cession d'action en cas de désinvestissement». En outre, les investisseurs ont le droit «d'encaisser et de conserver librement à l'étranger les recettes liées à leurs opérations, les produits et les dividendes de toute nature des capitaux investis...».Dans le même ordre d'idées, le gouvernement s'engage à simplifier la procédure d'obtention de l'agrément et à faciliter la délivrance des titres fonciers et baux emphytéotiques. Idem pour la délivrance des certificats de conformité environnementale aux projets d'investissements concernés et celle des titres de séjour et permis de travail au personnel expatrié impliqué dans le projet.En signant lesdites conventions pour le compte de l'Etat du Cameroun, Emmanuel Bondé, ministre des Mines et de l'industrie, a martelé que «la loi du 18 avril 2013 est pour les investisseurs une opportunité pour promouvoir leurs affaires et pour le gouvernement un précieux outil de mobilisation de nouveaux investissements». Pour sa part, Marthe Angeline Minja, directeur général de l'Agence de promotion des investissements a indiqué que de nombreuses autres demandes sont actuellement en étude. Baisse des IDE de 15% Pour qu'une entreprise soit retenue, quatre conditions ont été définies par le législateur camerounais. D'abord, il faudrait que ses activités créent des emplois pour les Camerounais à concurrence d'un emploi au moins pour chaque tranche de 5 millions à 25 millions de FCFA d'investissements. L'on a ainsi appris que les activités des 13 entreprises bénéficiaires de cette loi vont générer environ 3.000 emplois directs. Ensuite, il est demandé que les exportations annuelles de ces activités représentent 10 à 25% du chiffre d'affaires hors taxes. Par ailleurs, les ressources naturelles nationales doivent représenter 10 à 25% de la valeur des intrants. Et enfin, l'activité doit contribuer à la valeur ajoutée à hauteur de 10 à 30% de son chiffre d'affaires hors taxes. Coïncidence ou pas : la signature de ces conventions d'investissement intervient au moment où l'on apprend que les investissements directs étrangers au Cameroun ont connu une baisse de l'ordre de 15% entre 2012 et 2013, passant de 826,8 à 696,4 millions de dollars. Billet Démarche maligne Le gouvernement camerounais vient de prendre la décision d'interdire la production locale et l'importation du whisky en sachet et en bidon. D'une part, cette décision vient résoudre le problème de la circulation du whisky en sachet qui est largement consommé, y compris par les jeunes, et même les mineurs en raison de son prix bon marché et de sa vente qui n'est pas réglementée. D'autre part, elle menace des milliers d'emplois. L'Etat camerounais est donc pris entre le marteau de la protection de la jeunesse et de la santé publique et l'enclume de la préservation des emplois dans un pays où le taux de sous-emploi avoisine les 75%. Pour résoudre ce qui s'apparente manifestement à un dilemme, le gouvernement a adopté une démarche plutôt maligne. L'interdiction en question est en effet adossée à la mise en application de la norme camerounaise en matière de boissons spiritueuses. Laquelle norme recommande un conditionnement dans les bouteilles et non dans des sachets. Du coup, au lieu d'interdire immédiatement la commercialisation du whisky en sachet comme le demandaient les associations des consommateurs, l'Etat accorde deux années pour «l'écoulement des stocks». Mais, selon toute vraisemblance, ce long délai vise à donner du temps aux entreprises du secteur pour remplacer leurs équipements par ceux qui pourront produire les conditionnements autorisés. Thierry Ekouti, Dir. pub - Le Quotidien de l'Economie (Cameroun)