Le FMI et la Banque de France viennent d'organiser le premier forum des banques centrales pour les marchés en développement. Au centre des débats, la transition vers un régime de ciblage de l'inflation. Les recommandations issues du forum revêtent un intérêt particulier pour le Maroc où l'évolution du rythme d'inflation soulève beaucoup d'interrogations. Le Conseil de Bank Al-Maghrib (BAM) a décidé, à l'issue de sa réunion trimestrielle tenue le mardi 23 septembre dernier d'abaisser le taux directeur de 3% à 2,75%. C'est la première fois depuis 2012 que la Banque centrale prend pareille décision qui n'est pas passée inaperçue même si on attend encore de mesurer son impact sur le marché national. Pour l'heure, l'important c'est que le Conseil qui a également procédé à l'examen de l'évolution récente de la situation économique, monétaire et financière, ainsi que des prévisions de l'inflation à l'horizon du quatrième trimestre 2015, a rassuré en précisant qu'il «continue de suivre de près» l'ensemble des évolutions économiques et financières du pays. Autant dire que cette décision du Conseil peut donner lieu à des révisions selon l'évolution du contexte économique national. De quoi ainsi rassurer en effet les inquiétudes que manifestent régulièrement certains analystes et parfois même le marché national quant à la position de la banque, notamment pour ce qui est de «sa fixation sur la maîtrise de l'inflation au détriment de la croissance». À maintes reprises le gouverneur wali de la Banque centrale s'est voulu rassurant à ce sujet. Pour Mohamed Jouahri, tout est encore sous contrôle et la BAM ne manquera pas de prendre les décisions adéquates mais au moment opportun (voir leseco.ma). Ce qui n'empêche pas les spéculations de poursuivre leur cours et les débats de soulever chaque jour un peu plus plusieurs aspects de ce qui est devenue une vraie problématique, surtout conjuguée à celle de la transition vers un régime de change plus flexible pour lequel plaide le FMI. Transition Il convient de noter que c'est une actualité majeure des marchés financiers internationaux et principalement des pays émergents et en voie de développement qui est à la une. La preuve, le FMI et la Banque de France viennent de consacrer un forum, le premier du genre, à Paris. Ce forum qui a réuni les gouverneurs, sous-gouverneurs et membres des organes de décision de 20 banques centrales représentant 33 pays dont le Maroc, a porté sur «la transition vers un régime de ciblage de l'inflation et les dispositions monétaires transitoires». L'objectif était de servir de plateforme de discussion pour les pays dont «le secteur financier est en développement et qui cherchent à moderniser leur cadre de politique monétaire». De ce fait, les recommandations qui en sont issues au terme des travaux apporteront sans nul doute de nouveaux éléments de réflexion dans le débat en cours au Maroc. Il est important d'ailleurs de rappeler que d'après son appréciation de la situation et des perspectives d'évolution, le Conseil de la BAM a estimé que l'inflation s'établirait à 0,7% en 2014, à 1,6% en moyenne sur les six prochains trimestres et à 1,9% au terme de l'horizon de prévision (4T, 2015), avec une balance de risques équilibrée. Pour revenir au Forum de Paris, l'un des éléments les plus importants qui est sorti des échanges et cadre parfaitement avec le contexte au Maroc, c'est qu'en plus du fait que le sujet abordé intervenait à un moment opportun, compte tenu de l'intérêt croissant manifesté par de nombreux marchés en développement et émergents pour l'adoption d'un régime de ciblage de l'inflation, les participants ont noté que la voie vers ce régime était «plus facile à dire qu'à faire». Les principales raisons, ce sont les défis bien particuliers que constituent pour eux les contraintes pesant sur la mise en œuvre de «la politique monétaire, le caractère moins que favorable de l'environnement macroéconomique et financier, et dans le monde d'après crise, la coordination des politiques afin d'atteindre les objectifs de stabilité monétaire et financière». Recommandations pratiques Ainsi, les participants se sont accordés à reconnaître et de ce fait ont recommandé que si le ciblage de l'inflation demeure approprié, il doit être mis en œuvre avec une certaine flexibilité et est certainement devenu plus complexe en raison des objectifs de stabilisation qu'il pourrait être nécessaire de poursuivre à court terme. De plus, des dispositions monétaires transitoires doivent être mises en place avant de parvenir à un régime de ciblage de l'inflation. Aussi, il est ressorti qu'il n'était pas nécessaire de respecter la totalité des conditions préalables avant d'amorcer la transition. Toutefois, un engagement clair de mise en œuvre intégrale s'imposait, de même qu'un cadre juridique robuste sous-tendant l'indépendance de la Banque centrale, un mandat clair et la transparence. Enfin, autre aspect non moins important, la flexibilité du taux de change a été jugée cruciale, même si les participants ont admis que certains pays avaient été confrontés à une grande volatilité des flux de capitaux ces dernières années. «La crainte associée au fait de laisser le taux de change fluctuer peut être exagérée et dans de nombreux cas, on observe qu'une plus grande flexibilité du taux de change a entraîné une transmission plus faible», a alerté le communiqué de presse sanctionnant la rencontre.