Lors du Conseil de gouvernent tenu jeudi dernier, Mohamed Boussaid a présenté un bilan des réalisations de la loi de Finances 2014. Selon l'argentier du royaume, les choses se déroulent de «façon normale et conformément aux prévisions». De ce fait, Boussaid persiste et signe, indiquant que le taux de croissance économique devrait se situer à 3,5% en 2014, malgré la régression de la valeur ajoutée agricole. En dépit des mauvais signes qui fusent de toutes parts, Mohamed Boussaid reste confiant. Ou en tout cas feint l'être. En présentant le bilan des réalisations de la loi de Finances 2014, jeudi dernier au Conseil de gouvernement, le ministre a assuré que la mise en œuvre de la loi des finances pour l'année 2014 se déroule de «façon normale et conformément aux prévisions». L'argentier du royaume a ainsi relevé que les recettes fiscales relatives à l'impôt sur les sociétés (IS) ont augmenté de 7,8% au 1er trimestre 2014, alors que celles liées à l'impôt sur les revenus (IR) et à la taxe intérieure de consommation (TIC) ont progressé respectivement de 2,8% et de 12,2%. En revanche, les recettes de la TVA ont régressé durant cette période, et ce «en raison des mesures prises dans le cadre de la réforme de cet impôt dans la loi de finances 2014», a précisé le ministre. Le ministre de l'Economie et des finances se targue aussi du rythme de réalisation des investissements qui a enregistré une hausse, alors que les dépenses de compensation ont accusé une régression de 11%, attribuable aux mesures qui ont été mises en œuvre depuis le début de l'année en cours. Croissance à tout prix Avec ces indicateurs qui évoluent «conformément aux prévisions», Mohamed Boussaid persiste et signe : «Le taux de croissance économique devrait se situer à 3,5% en 2014, malgré la régression de la valeur ajoutée agricole suite à la baisse de la collecte des céréales». Le ministre de l'Economie et des finances tient mordicus à ses prévisions en dépit des défis auxquels fait face le royaume, notamment le chômage et l'attraction des investissements étrangers. Après avoir analysé les principaux indicateurs de la situation économique au niveau international, qui font ressortir en particulier une légère amélioration de l'économie de la zone euro après une période de stagnation, Boussaid a fait savoir que sur le marché des produits de base, les cours de pétrole ont atteint 109 dollars le baril, soit le même prix qu'en 2013. Au niveau national, le ministre a commencé par les bonnes nouvelles, citant l'amélioration enregistrée au niveau du taux de remplissage des barrages qui est passé de 64,3% en 2013 à 72,6% en avril dernier. Le ministre n'a pas manqué de mettre l'accent sur les résultats enregistrés par les secteurs d'activité économiques, notamment l'amélioration de la production des phosphates, la croissance de la production des industries de transformation et la hausse de 2 points du taux d'utilisation des capacités de production à fin mai 2014 pour atteindre 70,2%. Performance sectorielle ! Le secteur touristique n'est pas en reste, puisqu'il a affiché une progression de 8,8% du nombre des arrivées touristiques, de 9,6% du nombre de nuitées et de 3,6% des recettes touristiques à fin juin 2014. Autre bonne nouvelle, le taux d'inflation qui a été maîtrisé durant cette période. L'argentier du royaume a également souligné le redressement progressif des secteurs d'activité hors agriculture, notamment au niveau des secteurs de l'automobile, de l'aéronautique, du textile et de l'électronique, à l'exception du secteur du bâtiment et travaux publics (BTP). Concernant les indicateurs relatifs aux échanges extérieurs, ils font ressortir une hausse de 7,4% des exportations, alors que les importations ont progressé de 4,7% au 1er semestre 2014 par rapport à la même période de 2013, ce qui fait que le taux de couverture des importations par les exportations est passé à 49,6%. Une évolution a été ainsi enregistrée au niveau des exportations avec une hausse de 35,6% des exportations de l'automobile, de 25,9 % de celles de l'électronique, de 4% du textile et cuir, de 6,1% de l'aéronautique, de 5,5% de l'industrie pharmaceutique et de 2,7% de l'agriculture et agroalimentaire. Pour leur part, les recettes des Marocains résidant à l'étranger (MRE) ont accusé une légère baisse de 0,4%, a relevé le ministre, notant que les réserves de change ont dépassé la barre des 5 mois et un jour, contre 4 mois et 9 jours en 2013. Prévisions, une foire d'empoigne La sérénité de Mohamed Boussaid contraste avec les inquiétudes de plusieurs institutions qui sont moins optimistes. Le HCP, en dépit d'une légère amélioration de la campagne agricole, campe sur ses prévisions de croissance annoncées en début d'année, tablant sur un taux de 2,5%. La cause ? «Cette fois, il s'agit du recul attendu de 2,3% de la valeur ajoutée des activités de la pêche en 2014 après une forte croissance de 18,7% l'année précédente», relève le HCP. Le Centre marocain de conjoncture (CMC) n'est pas en reste et table sur un taux de 2,7%, s'écartant légèrement du département d'Ahmed Lahlimi. La Banque centrale, elle, un tantinet optimiste, place le curseur sur les 3% de croissance en 2014. Résultat des courses: un écart important avec les prévisions du gouvernement est constaté. Si cette «cacophonie» (en termes de chiffres) est désormais de coutume et si les institutions nationales y jouent à couteaux tirés, les attentes des organismes internationaux brouillent davantage les pistes. Les derniers chiffres publiés en mai dernier par le Fonds monétaire international (FMI) tablent sur 3,9% alors que la Banque mondiale crédite l'économie du royaume d'une croissance de 3,6%. Des estimations sensiblement identiques à celles de l'ONU (4%) et de la Coface (3,8%). Qui dit mieux ?