C'est finalement le samedi 1er mars que le souverain et l'importante délégation qui l'accompagne, foulera le sol guinéen. La troisième étape de cette tournée africaine du souverain revêt un caractère particulier puisque c'est la première fois que le roi se rend dans ce pays, l'un des plus anciens partenaires politiques et commerciaux du Maroc. Le souverain s'était certes déjà rendu dans ce pays d'Afrique de l'Ouest francophone à l'époque où il était prince héritier et avait représenté Hassan II aux funérailles de l'ancien président du pays Sékou Touré. «Aujourd'hui, il vient en qualité de roi du Maroc, une visite historique donc que nous allons célébrer à sa juste valeur, une visite qui restera dans l'esprit du souverain du Maroc et du peuple frère du Maroc», a déclaré un haut responsable guinéen. Les relations entre le Maroc et la Guinée remontent, en effet, à l'époque du défunt roi Hassan II et de son homologue guinéen, Sékou Touré, le père de l'indépendance du pays et qui a été de tout temps, l'un des fidèles relais du Maroc au niveau continental, mais aussi international. Pour l'histoire, il convient de rappeler que le Maroc est le premier pays avec lequel la Guinée a mis en place une commission mixte afin de promouvoir les échanges commerciaux. C'était en 1960, deux ans juste après l'indépendance du pays qui s'est rendu célèbre dans l'histoire africaine en votant massivement «non» au fameux référendum de la communauté franco-africaine de 1958 sous l'ère de de Gaulle et alors que la plupart des pays de la région étaient encore sous domination coloniale française. Les travaux de cette commission ont été mis en veilleuse durant plusieurs années, avant qu'elle ne soit réactivée en 2012. À ce jour, c'est une trentaine d'accords qui lient les deux pays, avec l'organisation régulière et depuis quelques années d'un forum économique maroco-guinéen qui se tient traditionnellement à Casablanca, sous l'impulsion des autorités et des chefs d'entreprise des deux pays. La communauté guinéenne au Maroc est d'ailleurs l'une des plus importantes de la diaspora africaine et comme au Mali, le Maroc a joué un rôle de premier plan dans la restauration de l'ordre démocratique en Guinée, il y a quelques années. C'est ce qui explique la grande mobilisation que connaît actuellement la capitale guinéenne à la veille de l'arrivée du souverain et de sa délégation, composée de près de 600 personnalités. Mohammed VI va passer près de 4 jours en terre guinéenne, une période qui sera mise à profit pour la conclusion de plusieurs accords de partenariat dans divers domaines. Partenariat historique «Le roi du Maroc ne fait pas une visite banale. Il va laisser des traces ici» ! C'est en ces termes que le ministre guinéen des Affaires étrangères, Moustapha Koutoub Sanoh, a résumé devant la presse guinéenne les attentes de son pays relativement à cette visite royale qui est forte en symboles. Comme au Mali et en Côte-d'ivoire, plusieurs accords bilatéraux seront signés entre les deux pays. Ces accords porteront sur des domaines aussi divers que variés comme la coopération industrielle et commerciale, la formation professionnelle et scientifique, l'agriculture, la marine marchande, des mines, l'eau et l'électricité. En parallèle, des conventions de coopération entre plusieurs départements ministériels des deux pays ainsi qu'entre les opérateurs publiques ou privés seront également paraphés au cours de cette visite, qui se veut historique et particulière à plus d'un titre. D'ores et déjà, le souverain a donné ses instructions pour la prise en charge de la formation de 500 imams guinéens, à la suite de la sollicitation émise par les autorités du pays. Accords commerciaux C'est dans ce cadre que des accords de partenariat seront signés entre l'ONEE et l'EDG (Electricité de Guinée), pour la construction d'un laboratoire et la fourniture de matériels ainsi que de plusieurs autres entre des entreprises et services départements ministériels marocains avec leurs homologues guinéens. Il s'agit des secteurs des mines avec la Société guinéenne du patrimoine minier (SOGUIPAMI), dans le domaine des impôts, du commerce, de la justice, ainsi que de la formation des cadres dans les domaines hydraulique ou militaire. Au total, une vingtaine de conventions et d'accords seront signés entre les deux pays et viendront s'ajouter à ceux déjà existants. En plus de cet appui institutionnel et tourné vers le renforcement des capacités de l'administration et des institutions guinéennes, les opérateurs privés ne seront pas en reste. Pour le gouvernement guinéen, l'enjeu est de taille et les déclarations du chef de la diplomatie guinéenne en disent long sur les attentes de la Guinée par rapport à cette nouvelle dynamique de coopération avec le royaume, qui connaîtra un nouveau souffle à partir de cette visite. «L'émergence du Maroc est aujourd'hui confirmée et son expertise dans plusieurs domaines n'est plus à démontrer», a déclaré Moustapha Koutoub Sanoh, avant d'ajouter qu'il s'agit «d'une véritable opportunité pour la Guinée de s'inspirer de l'expertise marocaine dans plusieurs domaines prioritaires pour notre pays». Dans une interview qu'il a accordée à la presse locale à la veille de cette visite, le ministre des Affaires étrangères guinéen n'a pas fait l'économie de qualificatifs pour planter le décor de cette visite. «C'est une visite historique, une visite d'amitié et de fraternité, en même temps une visite de travail avec ce pays ami et frère, un partenaire particulier et privilégié, qui a contribué, et qui continue à contribuer au développement socio-économique de la Guinée», a souligné Moustapha Koutoub Sanoh, sans oublier de mettre en exergue le fait que «le Maroc intervient aujourd'hui presque dans tous les domaines de développement en faveur de notre pays». Comme il apparaît clairement, au delà de la portée symbolique de cette visite, c'est pourtant le nouvel élan qui sera insufflé à la coopération entre les deux pays qui cristallise toutes les attentions. Les deux pays ne partent pas de rien et déjà plusieurs produits marocains bénéficient d'un traitement spécial pour leur entrée en Guinée à la faveur des accords déjà signés. C'est cet aspect que mettent en avant les autorités guinéennes, au premier rang desquels le président Alpha Condé, dont le pays revient de loin après une longue période d'instabilité politique et de marasme économique. L'appui marocain tombe fort opportunément et constitue de ce fait une véritable bouffée d'oxygène pour les autorités du pays, mais aussi l'économie guinéenne, qui cherche à retrouver son dynamisme grâce à l'important potentiel minier dont elle dispose, l'un des plus consistants du continent.