C'est une mesure pour le moins surprenante. À des semaines de la fin de la campagne agricole, voilà que le Parlement régional des Îles Canaries adopte, tardivement, une disposition hostile aux intérêts du Maroc et inscrit, de la sorte, son nom sur la liste des contestataires du pacte agricole signé entre le Maroc et l'Union européenne. L'organe législatif de l'archipel a adopté, à l'unanimité, une proposition exhortant le gouvernement de Madrid à exiger de la Commission européenne un respect des quotas d'importation de la tomate marocaine au sein du marché communautaire. Les députés locaux ont eu recours à l'argument brandi jadis par le lobby espagnol, à savoir que les exportateurs nationaux enfreignent souvent les quotas convenus dans le pacte. Outre le renforcement des moyens de contrôle, le Parlement canarien réclame des sanctions à l'égard du produit marocain. Toutefois, l'institution législative dévoile les véritables raisons de cette manœuvre, en revendiquant à la CE des mesures compensatoires pour pallier les «répercussions négatives dudit accord sur les producteurs de tomates canariens». Les députés canariens, toutes tendances politiques confondues, ont appelé à une renégociation du pacte et à une redistribution des quantités importées. Les membres de la Commission européenne en charge de ce dossier devraient rire sous cape à la réception de cette énième requête accusant les exportations marocaines d'être à l'origine de la défaillance canarienne. La Commission européenne a, à maintes reprises, pris le parti du Maroc en déclarant le respect du quota de la part du Maroc et des réglementations sur les tarifications. Même le ministre espagnol de tutelle, Arias Canete, avait souligné durant une comparution devant le Sénat que les prix pratiqués par les exportateurs marocains étaient corrects et le cours des produits à un bon niveau. En outre, cette déclaration de guerre de la part du Parlement canarien est anachronique. En effet, depuis la création du comité mixte maroco-espagnol des professionnels du secteur des fruits et légumes, en décembre 2012, le rythme des contestations a baissé d'un cran et les professionnels espagnols et marocains semblent avoir trouvé un terrain d'entente. Ce cadre de concertation a permis d'éviter le télescopage des productions et les associations ont reconnu un meilleur contrôle des entrées. D'ailleurs, les exportations marocaines de tomates vers le marché communautaire ont augmenté sans que cela ne déclenche une contestation de la part des producteurs espagnols. Les derniers chiffres livrés par le rapport sur le suivi des exportations marocaines, élaborés par le ministre régional andalou de l'Agriculture, parlent de 249.429 tonnes de tomates écoulées durant la campagne 2012/13, achevée le 31 mai. Ce volume des ventes reflète une hausse de 14% en comparaison avec la campagne précédente.