C'est un bien sombre tableau que dresse le Centre marocain de conjoncture (CMC) de la situation économique au Maroc. Dans sa dernière lettre mensuelle, le CMC ne pouvait passer outre la crise politique que traverse aujourd'hui le Maroc et son impact sur la conjoncture. Pour le centre dirigé par Habib El Malki, également membre du bureau politique de l'USFP, le Maroc traverse un nouveau cycle d'attentisme. Le CMC n'hésite pas à faire le rapprochement avec la crise qui prévalait au milieu des années 90. C'est dire l'inquiétude et le scepticisme qui prévalent. Tout semble coïncider pour entretenir la morosité de la conjoncture : «c'est une crise politique qui touche le bon fonctionnement des institutions et fait suite à la décision du parti de l'Istiqlal de se retirer de la majorité gouvernementale actuelle, une crise économique et financière remettant en cause les hypothèses de base de la loi de finances 2013, une crise sociale marquée par l'aggravation du chômage», souligne le CMC dans un récent communiqué. Cette crise plurielle aurait un impact négatif sur le moral des chefs d'entreprise et des ménages, inquiets quant à leur niveau de vie, suite à la hausse des prix et à la baisse de leurs épargnes. «Une situation aggravée par l'absence d'un véritable plan anti-crise, cohérent et convaincant», critique le CMC. Le centre estime que les décisions gouvernementales étaient strictement conjoncturelles, éparpillées dans le temps et ne traduisaient ni vision, ni volonté d'aller jusqu'au bout en dégageant des perspectives plus rassurantes. Le Centre s'attaque notamment à la récente sortie à l'international, pour un nouvel emprunt qui vient d'être signé. Pour le CMC, la machine économique s'enraille, comme en témoignent un certain nombre d'indicateurs qui sont au rouge. D'abord ceux des finances publiques : les chiffres de fin mars attestent que les besoins de financement de l'Etat ont dépassé les 28 MMDH, soit une aggravation de plus de 161% par rapport à la même période en 2012. C'est le résultat d'une évolution asymétrique entre les recettes en baisse de 4% et des dépenses globales, particulièrement les dépenses de fonctionnement, en hausse de 7%. Du côté des secteurs économiques, la situation n'est pas plus reluisante. Le CMC met en exergue le cas du BTP qui connaît un retournement de tendance avec une forte baisse de la consommation de ciment, un recul de la production de logements ainsi que la diminution des crédits octroyés aux ménages et aux promoteurs immobiliers. Comme si ça ne suffisait pas, la situation de la balance commerciale n'est guère rassurante. Le fléchissement des exportations est particulièrement éloquent. Celles-ci enregistrent un repli de 3,8% à fin avril 2013, provoquant une dégradation du taux de couverture à la même période. Encore une fois, il va falloir se rabattre sur les performances attendues dans le secteur agricole et des activités qui lui sont rattachées pour espérer amortir le choc des différents déficits. Un cercle vicieux qui sévit depuis déjà trop longtemps. «Tant que le politique primera sur l'économique, ça ne risque pas de changer», semblent croire les experts du CMC.