Sara Tavarès Chanteuse Les ECO : Votre musique est un parfait mélange de folk européenne et de musiques africaines. À quel point ces deux genres se marient-ils ? Sara Tavarè : Quand je fais de la musique, je ne pense pas vraiment à cela. J'ai toujours écouté plusieurs genres de musique et j'aime des styles très variés, mais il y a toujours une connexion, en effet. J'adore la musique africaine, que ce soit la musique black américaine ou la musique des tribus d'Afrique, de Jamaïque, d'Angola. J'ai la musique dans le sang, elle circule et je ne peux rien contrôler. Ma musique est un mélange de toutes ces influences finalement, avec quelque chose de créole puisque mes parents viennent du Cap-Vert, même si j'ai toujours vécu au Portugal. Il y avait toujours de la musique à la maison, je m'en imprégnais. Plus qu'un enchaînement de notes, c'est une histoire de sonorités et de langues puisque le portugais et le créole sont mélodieux. Il y a une musicalité. Je mélange tout cela naturellement, je ne me pose pas de questions, ça se fait au feeling... Vous avez été en effet influencée par des courants de musiques, mais pourriez-vous nous citer des artistes en particulier ? Cela dépend de quelle tranche d'âge vous parlez! (Rires). Quand j'étais adolescente, j'étais fan de Whitney Houston, Tina Turner, Michael Jackson. Tous ces chanteurs de black musique américaine comme Aretha Franklin, Stevie Wonder, tous les chanteurs de la Motown, Diana Ross, etc. Quand j'ai grandi un peu, j'ai commencé à m'intéresser à la «world music». J'ai commencé à écouter Bob Marley pour les mots, le message, la musique. C'était à la fois très fort et très communicatif, cela m'a beaucoup influencé. J'ai écouté beaucoup de musiques africaines, mais pas un artiste en particulier. J'écoute de la musique du Sénégal, de la Guinée, de la musique dance d'Angola, et la culture de rue m'influence beaucoup. Vous avez parlé des messages forts et des mots de Bob Marley. Quand vous écrivez vos chansons, quels sont les sujets qui vous viennent à l'esprit? J'écris vraiment de manière spontanée, je ne cherche pas de sujets ou ce que je vais raconter. J'essaie de choisir des sujets positifs, car il est dur de survivre dans un contexte pareil, dans un monde matérialiste! J'essaie d'écrire sur l'âme, la liberté de l'âme, celle de pouvoir s'exprimer, de célébrer l'authenticité de chaque être humain. Vous faites partie de ces artistes qui se sont faits un nom dans le milieu sans pour autant être surmédiatisés. Est-ce un choix ? Oui parfaitement ! Je suis une anti-star, je suis tout sauf ça. Je ne m'expose pas, je suis moi-même, libre. Je ne donne pas une certaine image de moi, on ne m'impose pas d'être quelqu'un d'autre, d'être un produit. C'est beaucoup de travail, vous savez, d'être une star, de se construire une image qui n'est pas la nôtre. Une image qui, d'ailleurs, change au gré des la mode et de ce que les gens attendent. C'est plus facile d'être soi-même, de ne pas se fabriquer une image, une attitude... Je suis moi-même, ma guitare, ma voix, mes mots...Juste moi-même. C'est moins fatiguant ! Donc oui, c'est un choix de vie. Vous prenez tout votre temps pour préparer vos albums. Xinti est sorti en 2009 et vous êtes toujours en tournée... Oui, je prends beaucoup de temps, comme lorsqu'on décide d'avoir un enfant. Je peaufine, j'écris, réécris, je prends ma guitare, pose des bases rythmiques et laisse mes musiciens, de différentes cultures et différents univers, proposer des choses. J'aime prendre le temps de faire les choses. Il faut dire aussi que j'ai été très malade en 2011, ce qui a ralenti la tournée. Il n'en demeure pas moins que je prends mon temps. On a quelques dates après le Maroc, mais pas beaucoup. Je prépare actuellement mon prochain album, j'écris, je compose. Je ne peux en revanche pas vous dire pour quand il est prévu...(Sourire). Une voix qui touche les coeurs Elle rentre telle une ombre avec une guitare et des mouvements dont seuls les habitants des îles ont le secret. Elle est elle-même, bien dans sa peau et cette belle énergie positive se transmet et hypnotise. Dans la salle, certains la connaissent, d'autres la découvrent et quelle découverte ! Celle d'une voix singulière entre l'incantation des tribus africaines et le velours des voix jazzy et blues. Un blues presque heureux qui envoûte avec des paroles tantôt en portugais, créole et anglais, des sonorités aux influences capverdiennes et lusophones. Un moment de musique que la chanteuse, compositrice et guitariste partage avec ses musiciens, en parfaite osmose avec eux, dans une ambiance zen et entraînante à la fois. Si le public paraissait timide au début du concert, touché par le talent de la jeune femme, il n'est pas resté de marbre longtemps devant les rythmes des percussions et des mélodies de l'Afrique. En effet, pendant les dernières chansons, le théâtre s'est transformé en une piste de danse géante. Sara Tavarès a fait chanter, danser et pleurer. Elle parle à son public avec une aisance incroyable en lui faisant bénéficier des histoires de ses chansons, de celles qui parlent de l'âme, de la vie, des rencontres, de l'amour. «Balancé», son titre phare a réveillé le public et la chanson finale «One love» a mis l'audience dans la poche de Sara, à jamais. Si certains trouvent que la musique de Tavarès est monotone et se répète, la majorité a passé un moment coloré qui marquera pendant longtemps. Ceux qui ne connaissaient pas la chanteuse se sont promis de se ruer sur les chaînes en ligne pour découvrir l'étendue de son talent et profiter encore plus de ses morceaux authentiques. Ce moment fort de la 12e édition du Festival Mawazine peut se résumer en un «Peace, love and God Bless» monumental.