L'Office doit supporter en 2004 un effort financier de 1,2 milliard de DH. L'ONE (Office national de l'électricité) va subir, cette année, des pressions financières très importantes. Outre la baisse des tarifs de vente de l'électricité haute et moyenne tension intervenue depuis janvier 2004 et qui générera un manque à gagner annuel de 219 millions de dirhams, le prix du charbon sur le marché international a littéralement flambé depuis la fin 2003. Avec le renchérissement du fret, conséquence d'une forte demande, notamment de la part de la Chine (achat massif de blé et de minerais) et de l'Europe (pour l'importation du blé), le prix de la tonne de charbon, obtenu par l'ONE lors de son dernier appel d'offres, a été de 72,90 dollars, contre seulement 37 dollars à la même période de l'année dernière. A partir des prévisions des analystes, qui prévoient le maintien de cette tendance à la hausse tout au long de 2004, l'ONE table sur un prix moyen du charbon importé de 64 dollars la tonne. Sur cette base, et sachant que 77 % de la production nationale d'électricité sont produits à partir du charbon, le surcoût pour l'ONE est estimé à 1 milliard de dirhams en 2004. En cumul avec la baisse du prix de l'électricité HT et MT, l'effort financier que l'office devra supporter est donc de 1,2 milliard de dirhams. Pour autant, ce surcoût ne sera pas répercuté sur les consommateurs, ce qui, indirectement, s'apparente à une baisse pour ces derniers. Depuis 1997, la baisse de la facture d'électricité, toutes catégories de clients confondues, a coûté 2,8 milliards de dirhams, dont 1,60 milliard supporté par l'ONE et 1,16 milliard pris en charge par l'Etat sous forme de dégrèvements fiscaux. Le secteur industriel est celui qui a le plus bénéficié des réductions tarifaires décidées : 34 % pour la moyenne tension, 26 % pour la haute et très haute tension en régime optionnel, et 20 % pour la haute et très haute tension en régime général. Le portefeuille clients est passé de 980 000 en 1995 à 2,5 millions en 2003 La question reste néanmoins de savoir comment financer cette charge supplémentaire découlant de l'augmentation du prix du charbon. Par les gains que l'ONE devrait, enfin, réaliser cette année, explique en substance son directeur général, Ahmed Nakkouche. «L'année 2004, précise-t-il, est celle où nous allions, en effet, récolter les fruits de la politique de rationalisation de la gestion», fruits qui ont à peine commencé à mûrir puisque, on peut l'annoncer déjà, l'ONE a réussi en 2003 à équilibrer ses résultats. Cela signifie-t-il alors que l'office va devoir renouer avec les déficits des années précédentes? «L'exercice 2004 sera malgré tout équilibré», rassure le patron de l'ONE. Les données disponibles montrent en effet que les efforts déployés en matière de rationalisation de la gestion ont abouti à des résultats appréciables. Un indicateur, au moins, illustre cette amélioration : la forte augmentation de la productivité. En 1995, l'ONE comptait 10 600 agents pour 980 000 clients. En 2004, le nombre d'agents a été réduit à 9 200, tandis que le portefeuille clients culmine à 2,5 millions ; cette forte progression de la clientèle résulte pour une large part de la mise en place du PERG (Programme d'électrification rurale généralisée), qui a fait passer le taux d'électrification rurale de 18 % en 1995 à 55 % en 2003. Conséquence: l'ONE se positionne désormais comme le premier distributeur, avec 53 % de parts de marché, le reste étant couvert par les régies publiques et les gestionnaires délégués (Lydec à Casablanca, Redal à Rabat et Amendis à Tanger-Tétouan). Mieux : selon Ahmed Nakkouche, la demande nationale, qui variait bon an mal an entre 5 et 6 %, a augmenté de 8 % en 2003 (effet du PERG + une croissance de 5,5 %) et, là encore, c'est l'ONE qui a réalisé la progression la plus importante avec plus de 10 % d'augmentation et près de 6 % pour les régies publiques et les gestionnaires délégués réunis. Le prix du kwh acheté à JLEC passe de 60 à 48 centimes Deuxième facteur ayant contribué à la réduction des charges de l'office, la détente intervenue au niveau des achats d'électricité. Au cours des années 2000 à 2002, le prix du kilowattheure (kWh) acheté à JLEC (Jorf Lasfer Energy Company) avait atteint les 60 centimes, un pic prévu, il faut le signaler, dans le contrat conclu entre l'ONE et ABB/CMC, les concessionnaires des centrales électriques de Jorf Lasfer. A partir de septembre 2002, le prix du kWh a amorcé un processus baissier (toujours en vertu du contrat), pour se situer aujourd'hui à 48 centimes. Le gain est énorme, certes, mais c'est encore loin du niveau des prix sur le marché espagnol, par exemple, où d'ailleurs l'ONE réalise des achats, quand il le juge opportun, pour compléter la production nationale. Quand, en plus de tout cela, la pluviométrie se fait généreuse, comme en 2003 (l'hydraulique ayant participé pour 8,60 % à la production nationale de l'électricité l'année précédente), on comprend que le management de l'ONE soit quelque peu contrarié par la survenance de la contrainte conjoncturelle que représente la flambée du prix du charbon, dans la mesure, effectivement, où cette contrainte va annihiler les gains obtenus et, si l'on peut dire, remettre le compteur à zéro. Malgré tout, non seulement les prix de l'électricité ne subiront pas de hausse, mais en plus, le programme d'investissement (4,2 milliards de dirhams) sera réalisé comme prévu, déclare M. Nakkouche. Ces investissements, rappelons-le, porteront, notamment, sur le doublement de l'interconnexion Maroc-Espagne, le renforcement du réseau national de transport, le renouvellement de la station de dispatching national, la poursuite du PERG, etc. Et si, qu'à Dieu ne plaise, le niveau actuel du prix du charbon se maintient au-delà de 2004 ? «A ce moment-là, nous aviserons !», répond laconiquement le DG de l'ONE