Les concernés sont déjà couverts par la CNSS ou la CNOPS. L'Agence nationale de l'assurance maladie prendra en charge la gestion financière du régime en attendant la création d'une agence dédiée qui sera sous sa tutelle. Les patients seront obligés de passer par les centres de santé qui sont habilités à les orienter vers l'hôpital qui convient. Un nouveau schéma de gestion sera soumis au chef du gouvernement. Combien a coûté le Régime d'assistance médicale des économiquement démunis (Ramed) depuis sa généralisation à l'échelle nationale en 2012 ? La question reste, pour l'heure, sans réponse. Car les dépenses au titre de ce régime sont, selon des sources proches du dossier, diluées dans les budgets des hôpitaux. Ce manque de visibilité est dû à deux raisons: l'absence d'un gestionnaire dédié au Ramed et le fait que le budget théorique du régime, 3 milliards de DH par an, soit intégré dans la subvention globale octroyée par le ministère de la santé aux hôpitaux. Cette subvention représente 75% du budget des hôpitaux mais on ignore la part exactement allouée au financement du Ramed. Au-delà de ses implications sur la gestion financière du régime, ce dysfonctionnement remet surtout en cause le principe de gratuité sur lequel il est basé. Des sources proches du dossier reconnaissent qu'actuellement la population concernée ne bénéficie pas d'une gratuité totale dans la mesure où les hôpitaux, en manque de moyens financiers, sont dans l'incapacité d'assurer certaines prestations. Les patients sont alors contraints d'effectuer, dans le secteur privé, certains examens radiologiques et biologiques ou d'acheter leurs médicaments. C'est pour toutes ces raisons que l'Agence nationale de l'assurance maladie (ANAM) entend mettre de l'ordre dans le fonctionnement et la gestion du Ramed. Et pour cela, cette agence, qui n'a depuis le démarrage du régime, joué que son rôle de régulateur de la couverture médicale de base (CMB), a décidé de remplir la deuxième mission qui lui est conférée par l'article 60 de la loi 65-00. Celui-ci dispose que, «outre les attributions qui lui sont dévolues par l'article 59, l'agence est chargée de la gestion des ressources affectées au régime d'assistance médicale dans les conditions fixées par la présente loi et les textes pris pour son application». L'exercice de ces deux missions est, selon une source proche du dossier, tout à fait compatible dans la mesure où l'agence dispose de deux conseils d'administration distincts. Le premier, relatif à l'AMO, est composé du patronat, des syndicats et de l'ANAM alors que dans celui du régime d'assistance médicale siègent, aux côtés de l'agence, les ministères de la santé, de l'intérieur et les CHU. Par la suite, le conseil sera élargi aux représentants des bénéficiaires du Ramed. Une loi relative à ce volet est en cours d'élaboration. La récupération de la gestion du régime est une nouvelle vision prioritaire dans la feuille de route de l'ANAM. Il faudra toutefois préciser que cette responsabilité sera exercée pendant une période transitoire de deux ans, 2015 et 2016. Un organisme dédié dont la création est prévue en 2016 prendra le relais une année plus tard. La loi 65-00 relative à l'AMO sera en conséquence amendée. Le nouveau texte précisera les missions de l'ANAM et celles du nouvel organisme qui sera sous son autorité et indépendant du ministère de la santé, précise une source bien informée. Durant la période transitoire, le budget global du Ramed sera versé à l'ANAM qui en assurera la répartition auprès des hôpitaux. En vue d'une transparence de la gestion, l'agence signera des conventions avec les hôpitaux. Les «contrats d'objectifs et de moyens», c'est ainsi qu'elles seront appelées pour les distinguer des conventions de l'AMO, fixeront les modalités de prise en charge des «assurés de l'ANAM» par les hôpitaux et les CHU. Un projet de conventionnement sera soumis au chef du gouvernement Abdelilah Benkirane dans une réunion prévue dans les prochains jours. L'ANAM ne veut plus être uniquement le gendarme de la couverture médicale de base L'ANAM doit également concevoir (l'appel d'offres a déjà été lancé) un système national de gestion et d'information intégré. L'objectif est de se mettre en réseau avec les hôpitaux et les ministères de la santé et de l'intérieur pour une meilleure gestion de la facturation. Grâce à ce système, elle compte améliorer la maîtrise de la prise en charge des Ramédistes par le biais de la dématérialisation des factures et d'un système d'octroi d'une allocation forfaitaire en fonction du nombre d'indigents pris en charge. Ce système de gestion et d'information sera doublé de la feuille de référence du centre de santé en vue de rationaliser les dépenses du Ramed et d'éviter les abus. Selon une enquête de l'agence, seuls 24% des bénéficiaires du régime passent par les centres de santé, étape pourtant obligatoire pour déterminer le type de soins nécessaires et l'orientation des patients vers l'hôpital compétent. A partir de janvier 2015, la feuille de référence sera obligatoire et engage la responsabilité du médecin du centre de santé qui doit y apposer sa signature. Les fraudeurs sommés de rembourser les frais de soins dont ils ont bénéficié La maîtrise de la gestion financière du Ramed passe également par la correction des dysfonctionnements actuels du régime et dont le plus important est la double affiliation. L'ANAM a en effet identifié 220 000 cas de double affiliation. Il s'agit d'assurés de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) et de la Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (CNOPS) qui sont en même temps détenteurs de cartes Ramed. On présume que ces fraudeurs voulaient éviter de payer le ticket modérateur ou faire profiter indûment la gratuité des soins à d'autres personnes. Le pot aux roses a été découvert à la suite d'un rapprochement des fichiers de l'agence avec ceux des deux caisses. Une fois identifiées, ces personnes indélicates, à qui l'ANAM a retiré les cartes, ont été sommées de rembourser les frais de soins dont ils ont bénéficié. Mais il y a dans le lot des assurés AMO aux droits fermés en raison d'une déclaration irrégulière. Les cartes ont été retirées mais une alternative pourrait leur être proposée afin qu'ils puissent bénéficier d'une couverture médicale. Par ailleurs, pour verrouiller les immatriculations, l'agence et le ministère de l'intérieur ont décidé de faire en sorte que le système de déclaration soit beaucoup plus fiable. Une commission regroupant les ministères de l'intérieur, de la santé et l'ANAM effectuera des enquêtes sur le terrain et travaillera de pair avec les commissions locales permanentes censées bien connaître les indigents relevant de leur territoire. Ce nouveau schéma de gestion doit être définitivement validé par le chef du gouvernement qui a mis en place un groupe de travail qui s'est penché sur les nouvelles procédures proposées par l'ANAM. C'est sur la base de ces procédures que se fera le changement des cartes d'immatriculation prévu, selon la loi, tous les deux ans afin de préserver l'équilibre du régime d'assistance médicale.