La prise de risque est un acte inhérent même à la vie quotidienne d'un manager. Un manager ne sait pas forcément tout. Consulter ses collaborateurs, sa hiérarchie ou des supports externes peut aider à mieux cerner les risques. Veille, collecte et analyse des informations sont nécessaires mais avec aussi une bonne dose d'expérience et d'intuition… Manager, c'est prendre parfois des risques difficiles. Rupture d'un contrat commercial, réorientation stratégique, abandon d'un produit, licenciement d'un collaborateur, communication de crise, démission, fermeture d'un site …, ce sont des décisions qui ont des répercussions importantes sur une carrière ou la bonne marche de l'entreprise que l'on dirige. Quels que soient le niveau de connaissance technique et l'état d'esprit (confiance en soi ou peur de l'incertitude), on n'est jamais à l'abri d'un mauvais choix, aujourd'hui plus qu'hier eu égard au changement continu de l'environnement de l'entreprise. Le bâtiment, Abdelhakim M. n'en connaissait rien il y a quelques années. Et pourtant ce manager a décidé de sauter le pas. Après plus de 25 ans dans le domaine pharmaceutique, d'abord dans le marketing et vente et après dans les ressources humaines, il décide de changer de cap en se lançant dans la promotion immobilière. D'abord, parce que c'était une question de passion, ensuite de désir de se fixer toujours une nouvelle frontière, une nouvelle vie. «Pour changer de métier, vous devez avoir une bonne dose de prise de risque et de confiance en soi. Vous sortez de votre zone de confort où vous avez l'habitude de tout maîtriser, et vous affrontez un nouvel environnement où les autres personnes sont expertes dans leur domaine. A mon avis, la clé du succès c'est de rester humble, passer du temps à poser des questions et écouter les autres. Votre background et compétences vont forcément rapporter quelque chose à cette équation». Il est évident aussi que tout changement comporte des risques d'échec professionnel, sans compter les répercutions sur la vie privée : organisation familiale pas forcément modulable, obligation de déménager, baisse des revenus… Selon Zakaria Fahim, expert-comptable et DG de BDO Asmoun, «le risque fait partie des règles du jeu, il est stimulant». Il ajoute que «toute reconversion ou changement dans un parcours requiert beaucoup d'énergie et de volonté. C'est une question d'engagement personnel». En principe, une décision personnelle comme un changement de cap est plus facile à gérer, sachant qu'on est seul à en subir les conséquences. Mais quand on engage la responsabilité de l'entreprise, les risques sont alors plus nombreux. Pour beaucoup d'individus, la prise de risque est inhérente même à la prise de décision. Comment prendre la mesure d'un ou de plusieurs risques potentiels ? Comment identifier ses différents impacts ? Comment dès lors mettre en place un plan d'action, une ligne à suivre ? Selon Omar Benaini, consultant associé à LMS ORH, «certains managers pensent mieux cerner les risques en centralisant et en personnalisant au maximum le processus de décision. Le manager se considère plus comme celui qui sait que comme celui qui doit s'adapter à un nouvel environnement. Et ça, c'est fatal». Avoir la capacité à accepter de rectifier le tir après coup A l'évidence, ce sont ces conséquences négatives que l'on appréhende qui rendent plus lourdes les responsabilités. Doit-on décider seul ? Doit-on plutôt consulter les collaborateurs ou la hiérarchie ? Trancher dans l'immédiat ou prendre son temps ? Tout dépend de la nature du dossier à traiter, du tempérament et du niveau de responsabilités. Pour Zakaria Fahim, «tout manager doit prendre en compte certains facteurs pour bien gérer les risques potentiels». Il doit d'abord assurer une veille à tous les niveaux. Pour cela, il doit remettre en permanence en cause le fonctionnement de l'entreprise. Le manager qui se démarquera est celui qui n'attendra pas que le changement soit devenu incontournable pour le mettre en œuvre. Cela signifie qu'il doit observer en permanence le marché et plus généralement l'environnement concurrentiel, législatif, technologique… Une telle démarche demande d'oser des solutions nouvelles même quand tout va bien. Que la décision ait un caractère courant ou stratégique, que ce soit une décision qui n'engage que soi-même ou qui peut avoir des conséquences sur la vie de l'entourage (les collaborateurs ou les proches), il convient d'abord de bien maîtriser l'information en essayant de distinguer les données essentielles de l'accessoire. A ce niveau, il est important de noter que l'expérience et l'intuition sont souvent déterminantes, tout comme la capacité à accepter de rectifier le tir après coup, en cas d'erreur, à chaque fois que c'est possible. Mais dans tous les cas, on doit impliquer les collaborateurs ou la hiérarchie. «En acceptant de mutualiser et partager la réflexion, l'information et l'énergie de tous les acteurs de l'entreprise, on contribue à réduire le risque et on arrive à mieux le calculer et le maîtriser», précise M. Benaini. Cela ne signifie pas qu'il faut opter pour une décision collégiale à tous les coups pour fuir ses responsabilités, mais qu'un échange peut toujours être fructueux. Mieux, il permet de neutraliser les préjugés et de renforcer l'engagement des uns et des autres. A défaut de pouvoir bénéficier de ce soutien interne ou pour des raisons de confidentialité, une assistance extérieure est souvent nécessaire. En définitive, le danger, le seul, c'est de s'enfermer dans sa tour d'ivoire. Mais à un certain moment, on est amené à prendre le taureau par les cornes. Et là, il n'y a que le courage qui sert de guide. C'est pourquoi dans certaines grandes écoles, des sports comme le saut à l'élastique ou encore quelques épreuves d'endurance (escalade, course de fond…) sont très prisées pour essayer de développer cette qualité chez les étudiants.