Les surfaces cultivées en betterave sucrière et canne à sucre sont en baisse à cause du manque d'eau et de la hausse des intrants agricoles. Le gouvernement est intervenu afin de soutenir la production et limiter les importations. Après des années de forte croissance, la production locale de sucre marque le pas, pâtissant d'une conjoncture des plus difficiles. La campagne 2021-2022 aura été particulièrement douloureuse: dans un contexte de sécheresse prolongée et généralisée, la production nationale de betterave sucrière et de canne à sucre au titre de la campagne de l'an dernier s'est limitée à 321.000 tonnes. Le repli est de 17% par rapport à la campagne précédente, de 36% par rapport à la récolte de l'année 2020, et de 47% par rapport à la récolte de l'année 2019 ! Conséquence : le taux de couverture de la consommation nationale, qui s'élève à plus d'un million de tonnes par an, s'est considérablement détérioré, passant sous la barre des 30% et propulsant les importations à près de 700.000 tonnes. Pour cette année, les perspectives ne sont guère meilleures. Outre la persistance de la problématique du stress hydrique pour une culture produite essentiellement dans des périmètres irrigués, les producteurs de betterave à sucre et de canne à sucre sont confrontés à une hausse sensible des intrants agricoles, notamment les engrais azotés et les produits phytosanitaires, dans le sillage de la flambée des cours mondiaux des matières premières. Des conditions qui ont incité un certain nombre d'agriculteurs à délaisser cette culture engendrant une diminution des surfaces cultivées. C'est notamment le cas du périmètre irrigué de la région Doukkala-Abda, l'une des principales zones de culture de betterave à sucre du Royaume, avec une superficie dédiée de plus de 21.000 hectares selon les chiffres du ministère de l'Agriculture. Des difficultés dont Cosumar, opérateur unique et historique de la filière au Maroc, s'est fait l'écho cette année. «Les opérations de plantation de la canne à sucre et de semis de la betterave à sucre sont finalisées dans des conditions hydriques difficiles», a souligné le groupe dans sa dernière communication financière.
Le gouvernement entre en ligne Dans ce contexte, le gouvernement a décidé de réagir et d'apporter son soutien à une filière dont le poids économique est considérable, puisqu'elle garantit, tout de même, un revenu à quelque 80.000 producteurs qui exploitent une superficie de 64.500 hectares dans cinq régions du Maroc et créent, chaque année, 10 millions de journées de travail. Ce soutien s'est matérialisé par la mise en place, au cours du mois d'avril, d'une grille tarifaire plus avantageuse pour les plantes sucrières. Le gouvernement a en effet décidé d'augmenter les prix de vente de 80 dirhams la tonne pour la betterave sucrière et de 70 dirhams la tonne pour la canne à sucre. De fait, la tonne de betterave sucrière, qui représente le gros de production marocaine de sucre, coûte désormais 550 DH contre 470 DH auparavant. Il faut dire que le gouvernement considère le sucre comme un produit stratégique et essentiel pour les ménages. A ce titre, il mobilise un arsenal d'instruments et de mesures dont le maintien des droits de douane à l'importation du sucre brut à 35% du prix, la fixation d'un prix cible et l'octroi d'une subvention additionnelle à l'importation, la garantie d'un prix rémunérateur aux agriculteurs sucriers ou encore l'octroi d'une subvention forfaitaire à la consommation à travers la Caisse de compensation. Le coup de pouce de l'Etat est donc bienvenu dans la mesure où il doit inciter les agriculteurs à produire davantage de betterave sucrière et de canne à sucre et, partant, d'augmenter les surfaces cultivées et de baisser les importations de ce produit. D'autant que les prix mondiaux du sucre ont considérablement augmenté au cours des dernières semaines, atteignant des plus hauts depuis dix ans, à cause des mauvaises récoltes chez les plus gros producteurs mondiaux, comme l'Inde et la Thaïlande. Ceci étant dit, le problème du manque de ressources hydriques reste entier. Cette culture étant très consommatrice en eau (jusqu'à 1.000 mm par an), les principales régions de production sont situées sur les grands périmètres irrigués à Doukkala, Tadla, le Gharb, le Loukkos et la Moulouya. Des régions qui, mis à part celles du Nord du Royaume, sont confrontées à un tarissement inquiétant des retenues des barrages et des nappes. Une situation qui rend d'autant plus urgent l'achèvement des différents projets de barrages, notamment collinaires, et des stations de dessalement de l'eau de mer.