Mis en service en 2002, le complexe d'une capacité annuelle de 75 000 t peine à attirer les chevillards. Le nouveau gestionnaire turc a ramené les taxes de 5 à 2,50 DH le kilo Les Casablancais consomment encore 6 000 t de viandes provenant d'abattage clandestin. Tout porte à croire que le complexe des abattoirs de Casablanca est définitivement sorti de la zone de turbulences dans laquelle il était entré dès sa mise en service en mai 2002. Aujourd'hui, la production croît certes lentement, mais à un rythme très encourageant. Pour Umit Akçay, coordinateur principal de Unluer Maroc, la société turque qui a pris la succession de la société espagnole qui avait géré le complexe jusqu'à mai 2008, l'avenir est prometteur. En 2009, la production totalisait près de 25 054 tonnes, contre 22 000 en 2006. Elle avait même chuté à 20 000 tonnes deux ans plus tôt, alors que le complexe avait enregistré 22 700 tonnes à l'issue de la première année. Ce volume était déjà très loin des 27 000 tonnes réalisées par les anciens abattoirs. Le nouveau complexe a peiné à remplir pleinement sa mission. D'abord parce que les chevillards avaient renouvelé les mots d'ordre de grève pour protester contre les montants jugés trop élevés des taxes qui dépassaient 5 DH par kilo, pratiquement le double de ce qu'ils payaient dans les anciens locaux qui étaient cependant vétustes et n'offraient plus, depuis longtemps, le minimum en matière d'hygiène et de sécurité. Aujourd'hui, l'ensemble des taxes perçues ramenées à 2,50 DH dont 1,90 DH va à la société délégataire et le reste dans les caisses de la commune. Assis Zaïd, directeur technique et coordinateur du complexe, note que la taxe de 1,90 DH n'est en vigueur que depuis début janvier 2010. Auparavant, le nouveau concessionnaire ne percevait qu'un dirham. C'est d'ailleurs ce qui a retardé la construction des salles de vente de la viande et de la triperie, principales revendications des chevillards. Mais, aujourd'hui, les études ont été commanditées et le début des travaux est pour bientôt. L'objectif est de dépasser le cap de 30 000 tonnes Le nouveau complexe, d'une superficie de près de 9 ha et dont le coût est supporté par la commune (70 MDH), a une capacité annuelle totale de 75 000 tonnes pour ce qui est de la viande bovine et ovine et 4 200 tonnes de viande chevaline, cameline, asine et porcine (dans une salle d'abattage indépendante). Chaque mois, 260 chevaux, 60 cochons, 40 chameaux et une trentaine d'ânes et de mulets destinés au zoo sont abattus. On le voit bien, l'unité qui a tout de même permis de créer 300 emplois est sous-exploitée. Le nouveau concessionnaire pense pouvoir dépasser le cap des 30 000 tonnes rapidement. Tout porte à croire que les freins au développement tiennent aux difficultés du concessionnaire à élaborer une politique commerciale adéquate, l'abattage clandestin et la viande foraine. Le Dr Abdelilah Ammioui, vétérinaire en chef pour Casablanca-ville, est catégorique : «Les besoins de la ville doivent se situer entre 50 000 et 55 000 tonnes par an, dont les 25 000 des abattoirs. D'après nos estimations, la viande foraine doit représenter 11 000 à 12 000 tonnes. Si on prend en compte les 10 000 tonnes de viandes de Aïd Al Adha, on peut conclure qu'il y a plus ou moins 6 000 tonnes consommées dont l'origine est inconnue». Bien évidemment, cette part vient tout simplement de l'abattage clandestin. D'ailleurs, depuis 2008, les autorités ont mis en place un système de contrôle et de visites des boucheries qui a abouti à la saisie de près de 16 000 tonnes de viandes rouges défectueuses, soit provenant de l'abattage clandestin, soit impropres à la consommation. Mais il n'y a pas que chez des bouchers indélicats que l'on procède à des saisies. Dans l'enceinte même des abattoirs, des quantités importantes de viandes sont retirées chaque jour et des bêtes écartées de la tuerie. Pour 2009, les services vétérinaires ont retiré du circuit et incinéré plus de 17,6 tonnes de viandes pour cause de tuberculose, en particulier, et pas loin de 120 tonnes d'abats et tripes, le plus souvent touchés par des affections parasitaires. Chaque année, soit lors des inspections avant l'admission des animaux ou à la fin de l'abattage, 100 à 147 tonnes sont saisies aux abattoirs depuis 2003. En plus de cette vigilance, il faudra sans doute multiplier les campagnes de sensibilisation pour inciter le consommateur à prendre conscience des dangers du circuit informel.