Le contexte de crise et de manque de visibilité sur le marché boursier a poussé les investisseurs à s'orienter vers les produits de taux. Les dépôts à terme et les OPCVM monétaires, dont les rendements restent intéressants, attirent de plus en plus de particuliers en quête de placements à faible risque. Après l'éclatement de la crise financière internationale en 2008, les investisseurs, principalement les particuliers, ont montré partout dans le monde une grande aversion au risque vis-à-vis des marchés des actions et de l'immobilier. La chute des indices de plusieurs Bourses mondiales le confirme bien. La conséquence directe de ce mouvement de panique a été l'orientation de l'épargne vers les produits de taux, notamment les bons du Trésor et les instruments monétaires, vu le faible niveau de risque qu'ils présentent. Les montants investis dans ces marchés ont connu une forte augmentation et ce, malgré les rendements très bas offerts par les émetteurs suite aux abaissements successifs des taux directeurs pour relancer les économies des pays les plus touchés. Au Maroc, le marché financier n'a pas été directement affecté par la crise internationale et les effets de cette dernière sur l'économie sont à la fois indirects et différés dans le temps (impact à travers la demande adressée au Maroc dans les secteurs du tourisme, du textile…). Toutefois, les investisseurs ont décampé de la Bourse de Casablanca depuis septembre dernier en raison de la conjonction de plusieurs facteurs, économiques (cours gonflés de certaines valeurs et perspectives de résultats moins prometteuses pour d'autres) mais aussi psychologiques (contamination par la crise internationale et succession des scandales sur le marché boursier marocain). Ce qui s'est traduit par une chute mémorable des indices et par une perte de confiance généralisée. Dans ce contexte, et compte tenu du manque de visibilité sur la tendance future de la Bourse, les institutionnels et les petits porteurs marocains se sont tournés eux aussi vers les produits de taux. Dépôts à terme (DAT), comptes sur carnet, marché monétaire et dans une moindre mesure bons du Trésor, tous ces instruments ont attiré nombre d'investisseurs souhaitant trouver une alternative de placement autre que la Bourse et courir moins de risque. Et si les rendements de ces produits sont très bas sous d'autres cieux, au Maroc, ils sont à des niveaux très attractifs. Car, il faut le rappeler, au moment où toutes les banques centrales du monde baissaient leurs taux directeurs pour faire face à la crise, Bank Al-Maghrib (BAM) a relevé le coût de l'argent d'un quart de point (à 3,50%) pour contrer les pressions inflationnistes. Ce qui, conjugué à d'autres facteurs, a maintenu, voire augmenté les rendements. L'encours des DAT a augmenté de 20% à fin novembre 2008 Commençons d'abord par les produits bancaires qui sont les plus accessibles aux personnes physiques. Il faut savoir que l'encours des DAT s'est apprécié de 20,25% à fin novembre 2008 par rapport au début de l'année, à 150,9 milliards de DH (dernier chiffre disponible). Outre l'arbitrage des investisseurs suite au contexte de crise qui règne sur la Bourse de Casablanca, la ruée vers ce placement, qui s'est accentuée au cours du second semestre de l'année passée, s'explique également par les taux d'intérêt intéressants que les banques ont commencé à offrir. En effet, alors que le taux appliqué à un dépôt sur un an ne dépassait pas les 3,5% dans le meilleur des cas auparavant, il a atteint depuis 2008 des niveaux approchant les 5%, et même des fois les dépassant quand il s'agit de dépôts colossaux. «C'est que les banques n'ont jamais eu autant besoin de liquidités», explique un banquier. Jusqu'en 2006, le secteur bancaire bénéficiait d'un matelas de liquidités confortable, grâce à l'expansion des dépôts et aux excédents monétaires émanant des recettes touristiques et des transferts des MRE. Seulement, dès 2007, il s'est retrouvé avec un marché interbancaire complètement asséché suite à l'aggravation du déficit commercial et aux placements massifs en devises à l'étranger, et avec une production de crédits qui évolue beaucoup plus rapidement que les dépôts. Face à cette situation, et afin de pouvoir maintenir un rythme d'activité normal, les banques n'ont eu autre choix que de proposer des taux de rémunération élevés pour collecter plus de ressources. «Si les taux d'intérêt standards des DAT restent toujours aux alentours de 2,75% sur 3 mois, 3% sur 6 mois et 3,25% sur un an, les agences bancaires demandent et obtiennent toujours des dérogations de leurs directions pour offrir aux clients des taux plus élevés. Il s'agit d'une pratique courante», confie le directeur d'une agence bancaire de la place. L'actif net des fonds monétaires a atteint plus de 40 milliards de DH L'autre instrument qui n'a pas manqué lui aussi d'attirer plusieurs investisseurs en cette période de crise boursière est le marché monétaire. Les avances hebdomadaires demandées par les banques à BAM le montrent bien, le compartiment interbancaire a été très demandeur de liquidités durant toute l'année 2008 et continue toujours de l'être, ce qui tire les taux proposés vers le haut. A cela s'ajoute le relèvement du taux directeur en septembre dernier de 3,25 à 3,50% qui a mécaniquement augmenté les rendements monétaires. La détente observée sur le marché dernièrement suite à la baisse du taux de la réserve monétaire obligatoire de 15 à 12%, qui s'est traduite par l'injection de 11 milliards de DH dans le circuit, n'a été que passagère puisque le Taux moyen pondéré (TMP) du marché interbancaire est rapidement revenu à un niveau supérieur au taux directeur. Si les particuliers peuvent se demander comment investir dans ce compartiment connu pour être réservé aux institutionnels et aux grandes entreprises, il faut savoir que les Organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) sont conçus pour cette fin. En effet, nombre d'investisseurs, y compris les personnes physiques, se sont positionnés sur les fonds monétaires dernièrement étant donné le risque quasi nul qu'ils présentent et les rendements intéressants qu'ils réalisent. Au 9 janvier 2009, l'actif net des OPCVM monétaires a atteint plus de 40 milliards de DH, soit 40,1% de l'actif net global du marché toutes catégories confondues, en augmentation de 23% par rapport à début 2008. «Nous conseillons à nos clients d'investir dans les fonds monétaires car le marché est en situation de sous-liquidité qui va croître durant les mois à venir. Les taux monétaires vont donc rester intéressants, même en comparaison avec le marché des bons du Trésor, pour un risque beaucoup moindre», affirme Kamal Bennani, directeur commercial de la société de gestion Orange Asset Management. Les rendements des fonds monétaires sur l'année 2008 en témoignent. Le niveau le plus bas se situe à 2,65%, alors que la majorité des OPCVM de ce type qui sont ouverts au grand public a réalisé des performances supérieures à 3% (voir tableau). Ceci sachant que ces instruments n'ont profité que durant trois mois du relèvement du taux directeur intervenu en septembre 2008. Certains peuvent dire qu'un rendement annuel de 3% pour un fonds monétaire est inférieur de 2 points au maximum qu'on peut avoir pour un DAT sur douze mois. Seulement,un OPCVM monétaire présente des avantages qui peuvent le rendre beaucoup plus intéressant. A commencer par l'aspect fiscal. Alors que les intérêts servis au titre d'un DAT sont impôsés par voix de retenue à la source au taux de 30%, les intérêts que perçoit un OPCVM sur ses placements monétaires sont exonérés d'impôt. L'investisseur ne supporte en effet que la TPCVM (taxe sur les profits de cession des valeurs mobilières) qui est de 20% sur la plus-value réalisée au moment de sa sortie du fonds. Il y a donc une économie d'impôt de 10 points sur le rendement brut qu'on peut réaliser si on investit dans un fonds monétaire. Ce dernier offre également l'avantage de la liquidité. L'investisseur peut en effet récupérer sa mise à tout moment, la valeur liquidative des OPCVM monétaires étant calculée quotidiennement. Dans le cas d'un DAT sur 12 mois, l'argent reste bloqué durant toute la durée de placement et un retrait anticipé donne lieu à des pénalités importantes. A cela s'ajoute l'avantage de l'accessibilité et du traitement égalitaire des investisseurs. La valeur liquidative des fonds monétaires, soit le montant qu'on débourse pour acquérir une part d'OPCVM ou qu'on obtient en la cédant, démarrent actuellement à 130 DH seulement (Alistitmar Chaâbi) et peuvent être de 1 000 DH, 10 000 DH ou de plus de 100 000 DH selon le fonds. Et l'investisseur qui misera 50 000 DH bénéficiera du même rendement que celui qui placera 5 MDH. Alors que pour un DAT, les taux élevés ne sont proposés qu'aux clients qui déposeront des montants importants. Enfin, la majorité des OPCVM monétaires ne donne lieu à aucun frais d'entrée ou de sortie.