Le Maroc et Malte déterminés à renforcer davantage leur partenariat dans tous les domaines    Le Maroc et l'Espagne vivent le « meilleur moment de leurs relations bilatérales »    CPS de l'UA: Le Maroc insiste sur l'urgence d'une réponse collective pour faire taire les armes en Afrique    Le dirham s'apprécie de 2,3% face au dollar américain au T3-2024    Batteries au lithium: Le scientifique marocain Rachid Yazami décroche un brevet en Chine    Royal Air Maroc renforce ses alliances avec les voyagistes brésiliens    Maroc-Allemagne : l'ONEE et la KfW signent un contrat de prêt de 50 M€    Libye : 6 ans après Skhirat 1, le Maroc toujours médiateur clé    Paris, ville la plus attractive du monde (classement 2024)    Casablanca : Trois morts dans un accident au niveau de la station de tramway Ibn Tachfine    Températures prévues pour le jeudi 19 décembre 2024    CAN 2025 : Le tirage au sort se tiendra le 27 janvier à Rabat (CAF)    Maroc – Qatar 2024 : Le «Tbourida Show» célèbre l'art équestre national à Doha    Le Maroc livre à Israël le suspect de l'attentat de 2021    Après la visite de Tebboune à Nouakchott, le président mauritanien se rend à Rabat    Béni Mellal : Mise en échec d'une tentative de trafic de 3,96 tonnes de résine de cannabis    Maroc : Les sœurs Asmaa et Sara Abouchi déterminées à réaliser leur rêve d'acrobates    Une association marocaine fustige le recensement des amazighs par le HCP    Andrew Tate, condamné au Royaume-Uni pour fraude fiscale : 2 millions de livres saisies    Syrie: La récompense US pour des informations sur Al Joulani maintenue    La DGSN accélère la digitalisation et commence par la fiche anthropométrique    Cyclone à Mayotte : le roi Mohammed VI adresse un message de condoléances au président Emmanuel Macron    L'UM6P lance "The Forge", programme pour faire émerger des licornes entrepreneuriales    Ouverture à Fès de la 6ème session ordinaire du Conseil supérieur de la Fondation Mohammed VI des Ouléma africains    Sahara : le Chili soutient une solution politique dans le cadre de l'initiative (d'autonomie) marocaine de 2007    Signature à Bakou d'un mémorandum d'entente et de coopération    Casablanca : un camion percute une station de tramway, faisant trois morts    La task force «Maroc services» voit le jour    Sonia Noor dévoile son nouvel album « Dawini » : Un voyage sonore entre tradition et modernité    Exposition "Interférences" : Art, nature et humanité    Le parti se félicite du vote positif de notre pays en faveur du moratoire universel sur la peine de mort    Vinicius sacré meilleur joueur Fifa de l'année, doublé pour Bonmati    Stress hydrique : Des jeunes marocains proposent des solutions innovantes (Students' Innov'Up 2024)    Finale Coupe Intercontinentale FIFA 24 / Real-Pachuca: Horaire? Chaînes?    Basket/DEX(H): WAC et MAS ont mis fin à la J8    Sécurité sociale : les Marocains, premiers contributeurs étrangers en Espagne    Diplomatie : Pedro Sánchez attendu samedi à Rabat    La femme qui a dit non    Spectacles nocturnes inédits au Palais Bahia, du 18 décembre au 10 janvier    Lahjomri : «La paix et la sécurité, une responsabilité collective pour un monde plus juste et équitable»    Le Français NGE signe son premier contrat ferroviaire au Maroc portant sur le lot 3 de l'extension de la ligne reliant Kénitra à Marrakech    Maintenance de la centrale thermique de Jerada : l'appel d'offres pour le projet d'acquisition de pièces de rechange UPS annulé, China Power prépare une nouvelle annonce    Quels impacts sur la santé ?    Xi Jinping prononce un discours lors de la Conférence centrale sur le travail économique    Hakim Ziyech regrette d'avoir rejoint Galatasaray et annonce son départ en janvier    Le temps qu'il fera ce mercredi 18 décembre 2024    Le Maroc abritera le siège du Bureau Afrique de la FIFA    Un musée virtuel trilingue pour préserver l'héritage de la communauté marocaine juive voit le jour    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Mauriac, un chroniqueur engagé
Publié dans La Vie éco le 16 - 01 - 2009

«Pour le journaliste, quelle tentation que le silence lorsqu'il se trouve engagé lui-même de tout son cÅ"ur et de tout son esprit dans l'événement qu'il a mission de commenter ! (…)»
Heureuse initiative que celle d'avoir rassemblé les chroniques de François Mauriac en un seul volume de plus de 1100 pages aux éditions Robert Laffont, Collection Bouquins. Il faut dire que l'entreprise n'est pas des plus simples, car il en a écrit des textes et des chroniques au cours de sa longue et riche carrière ! Mais signalons que l'auteur de Thérèse Desqueyroux avait lui-même déjà réuni et présenté quelques écrits journalistiques dans différents ouvrages avant de les rassembler pour les besoins de la publication de ses œuvres complètes dans la Pléiade, en 1952. Le volume qui vient de sortir regroupe l'ensemble de ses chroniques, soit cinq tomes des recueils intitulés Journal, plus un autre portant ce titre explicite Le bâillon dénoué, et, enfin, des chroniques plus thématiques : Mémoires politiques.
Dans la préface à ses écrits journalistiques rédigée par François Mauriac dans la Pléiade, le Prix Nobel de littérature livre une des plus fines approches de la chronique et du journalisme en général. Pour Mauriac, la rédaction régulière des chroniques relève de ce qu'il appelle «un journal à demi intime». Il précisera plus tard : «Il me semble que cette conception du journalisme m'est particulière. Les recueils d'articles sont le plus souvent voués à l'insuccès et à l'oubli. Mais je me suis toujours efforcé de donner autant d'importance à un article de journal qu'à la page d'un livre, et de ne jamais oublier que je suis d'abord un écrivain (…) Je n'ai jamais cru qu'il fallait se servir d'un journal quotidien pour y donner ses scories et pour entretenir à bon compte le pot-au-feu. J'ai pris le journalisme au sérieux : c'est pour moi le seul genre auquel convienne l'expression de littérature engagée».
On retrouve dans cette conception du journalisme le même accent que chez Albert Camus, avec lequel il avait d'ailleurs travaillé au journal Combat et pour un temps dans l'Express, de Jean-Jacques Servan-Schreiber. Même s'ils n'ont pas toujours partagé les mêmes opinions sur un certain nombre de sujets en rapport avec la politique de l'époque. On peut lire, parmi ses chroniques, celle où il répond à Camus qui avait publié un édito sur les prises de positions de Mauriac, jugées «trop incrédules» à propos du projet d'un gouvernement mondial défendu par un groupe d'intellectuels en 1949. Comme on peut lire aussi avec profit une réponse, faite la même année dans le Figaro à Jean-Paul Sartre. Il faut dire que les protagonistes sont de grande envergure et que le débat vole très haut si on le situe dans le contexte politique et idéologique de l'après-guerre. De plus, le style et l'élégance du propos de ces chroniques, ajoutés à la charge ironique et subtile des échanges, leur confèrent une valeur littéraire certaine. Voilà pourquoi François Mauriac tenait ce journalisme-là pour le seul genre méritant l'expression de littérature engagée.
Mauriac a fait de ses chroniques dans lesquelles il pouvait passer, par le biais de subtiles digressions, d'un événement international qu'il observe ou d'une cause juste qu'il défend avec acharnement, à un souvenir d'enfance, un bout de paysage, une admiration de tel écrivain ou poète et aussi des détestations au sein de la gente littéraire ou artistique. Dans ce dialogue en continu où il mêle le subjectif, voire l'intime, aux faits publics, Mauriac s'ouvre au collectif, c'est-à-dire aux lecteurs, et partage ses impressions et émotions avec le sens de la générosité de l'écrivain et l'engagement résolu et indigné du chroniqueur. Le tout en restant ironiquement lucide sur les limites de l'exercice devant le tragique de l'histoire. Comme par exemple dans l'incipit de cette chronique publiée dans Le Figaro le 18 janvier 1947, alors que la parution des journaux était interrompue durant une semaine pour cause de grève : «La presse a quelques ressemblances avec ce coq qui croyait que, sans son cocorico, le soleil ne se lèverait pas. Mais l'Histoire n'a nul besoin de nos commentaires pour aller son train. La gent politique, absorbée dans sa partie de poker, s'est à peine aperçue que nous faisions une cure de silence (…)».
Au Maroc, on saura toujours gré à Mauriac de son engagement en faveur de l'Indépendance du Maroc. Il avait été à la tête d'un mouvement d'intellectuels et hommes politiques – dont Robert Barrat et bien d'autres – pour la défense de la cause marocaine lors de la lutte pour la libération. On peut lire d'ailleurs, parmi ses Mémoires politiques, une belle chronique désabusée – publiée dans Le Figaro du 24 août 1953 au lendemain de la déposition du Roi Mohammed V – et traversée par un grand souffle littéraire et philosophique : «Pour le journaliste, quelle tentation que le silence lorsqu'il se trouve engagé lui-même de tout son cœur et de tout son esprit dans l'événement qu'il a mission de commenter ! (…)». La suite est un très beau texte prémonitoire sur les événements et la réaction du peuple et de la jeunesse marocaine après le forfait accompli par les colonisateurs.
Ainsi, au-delà de l'écrivain et de ses tourments, Mauriac aura été pendant très longtemps, à travers ses écrits
journalistiques – les cinq tomes du Journal, les Mémoires politiques et les Blocs notes-, cet homme libre, lucide et engagé que nous admirons et ce journaliste à qui, comme l'écrit Laurence Granger dans une préface, «l'Histoire a rarement donné tort»


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.