Les indépendants sont mieux rémunérés que les salariés et bénéficient d'avantages fiscaux en termes de déductions. Ils doivent cependant être prévoyants, déclarés au fisc et tenir une comptabilité régulière. Deux statuts juridiques possibles : entrepreneur individuel ou SARL à associé unique. Est-il plus avantageux de travailler en tant que salarié ou comme indépendant ? Arrivés à un niveau élevé d'expertise, de nombreux cadres se posent la question, au moins une fois dans leur vie. Beaucoup d'entre eux finissent par franchir le pas. Qu'ils soient spécialisés dans le domaine de l'informatique, de la publicité et communication, du conseil (comptabilité, droit, fiscalité…) ou dans d'autres métiers, tous ont finalement profité des différents avantages qu'offre le statut de free-lance, comme on l'appelle dans les milieux professionnels. Bien entendu, si l'indépendance est synonyme de liberté, un travailleur indépendant, pour bien gagner sa vie, doit être bien organisé et rigoureux. Ce qui nécessite une bonne connaissance des contraintes et des obligations liées à ce statut, des dispositions réglementaires et fiscales… L'un des principaux avantages à être free-lance est incontestablement le niveau de rémunération. En effet, pour un même travail, un indépendant touche beaucoup plus qu'un salarié et ce, pour plusieurs raisons. D'abord, le free-lance connaît des périodes d'inactivité assez fréquentes, contrairement à un permanent. Cela constitue pour lui un risque, que les entreprises doivent rémunérer. D'autant plus qu'en étant engagé sur une mission, il peut en rater d'autres. Ensuite, une entreprise paie davantage le travail d'un indépendant car elle ne supporte pas, en ce qui le concerne, toutes les charges dont elle s'acquitte pour un salarié. «Pour un salaire net de 10 000 DH, une entreprise supporte un brut réel 4 à 6 fois supérieur à ce montant, suivant la taille de la société et son secteur d'activité. Donc, même si la rémunération du free-lance est élevée, elle revient beaucoup moins cher à l'entreprise que le coût global d'un salarié», explique Mohamed Benboubker, directeur de Freelance.com. Car on ne doit pas considérer seulement la partie impôts, mais tout l'investissement que peut faire une entreprise pour son salarié en termes de moyens de travail (charges de structure), de frais de formation, de prise en charge de certaines dépenses comme la restauration, sans compter les retards, les absences, les heures payées mais non travaillées effectivement… En faisant appel à un indépendant, en revanche, l'entreprise ne supporte ni couverture sociale (CNSS, CIMR…), ni frais de formation, ni périodes de congé, ni jours de retard ou d'absence, ni avantages en nature ou indemnités de licenciement : il s'agit pour elle d'un achat de service. Ainsi, pour des missions précises ou ponctuelles, il est plus rationnel pour elle de travailler avec un free-lance même si elle doit lui payer plus que la rémunération nette d'un salarié. Le free-lance peut déduire une multitude de frais de son revenu imposable Enfin, l'indépendant est mieux rémunéré que le permanent car la société qui fait appel à lui est plus exigeante en terme de qualité du travail rendu et qu'elle peut rompre son engagement avec lui à tout moment. L'autre avantage appréciable lié au statut de travailleur indépendant est d'ordre fiscal. D'abord, il faut savoir que, contrairement aux salariés dont l'impôt sur le revenu est prélevé à la source par l'employeur, les free-lance doivent procéder eux-mêmes à la déclaration de leurs revenus et au paiement de leur impôt chaque année avant le 31 mars. Sur ce point, l'indépendant a le droit de déduire une multitude de frais et de dépenses de son revenu imposable, frais que le salarié, lui, n'a pas le droit de soustraire. En effet, outre les frais de couverture sociale, déductibles que l'on soit free-lance ou permanent, le travailleur indépendant peut déduire de son revenu tous les frais de transport et de déplacement (restauration, hôtels…), de téléphone, d'achat de services, de fournitures et de matériels… Il peut même retrancher une partie de son loyer ou des intérêts d'un crédit immobilier si son adresse professionnelle est la même que celle de domicile. Outre la rémunération et les avantages fiscaux, un indépendant profite aussi de l'image liée à ce statut. En témoignent les nombreux free- lances qui, après des parcours réussis, ont pu occuper d'importants postes de responsabilité au sein d'entreprises de renommée. «Un travailleur indépendant sérieux est très bien perçu par les entreprises car passer des années avec ce statut témoigne de l'existence de plusieurs qualités personnelles et professionnelles», affirme M. Benboubker. En effet, un bon free-lance est un entrepreneur qui développe à travers son expérience des capacités managériales et des connaissances dans plusieurs domaines. Sans oublier qu'un indépendant est censé être un bon commercial car il est toujours amené à se vendre pour pouvoir décrocher des missions. Cela dit, pour pouvoir durer et réussir en tant que free-lance, il faut avoir un grand sens de la responsabilité et de l'organisation. Contrairement à un salarié, qui bénéficie de la sécurité du travail et de la régularité du revenu, un indépendant est souvent confronté à des périodes d'inactivité. Il doit donc savoir gérer ses revenus pour faire face aux périodes creuses. Il doit également prendre personnellement en charge sa couverture médicale et la préparation de sa retraite. S'inscrire au rôle des patentes est plus simple que de créer une SARL Concernant l'aspect juridique et fiscal, le free-lance doit obligatoirement déclarer son activité auprès des administrations concernées (fisc, registre de commerce…) pour exercer sa profession en toute légalité et pouvoir bénéficier de services tels que l'assurance et le financement bancaire. Sur ce point, le travailleur indépendant peut opter pour l'un des deux statuts juridiques définis par la loi. Le premier consiste à s'immatriculer en tant qu'entrepreneur individuel. Pour ce faire, il faut déterminer une adresse professionnelle (qui peut être le domicile du travailleur indépendant), s'inscrire au rôle des patentes et préciser l'activité à exercer, s'immatriculer au registre de commerce et, enfin, demander un identifiant fiscal. Le deuxième statut juridique est la société à responsabilité limitée (SARL) à associé unique. Dans ce cas, il faut disposer d'un capital minimum de 10 000 DH (avec possibilité de ne libérer que 25% du capital, le reste pouvant être étalé sur cinq ans), rédiger et enregistrer les statuts de la société, procéder à l'immatriculation au registre de commerce et suivre toutes les autres démarches de constitution d'une société, quelle que soit sa forme juridique. La première option présente l'avantage d'être très simple à mettre en place, dans la mesure où il n'y a pas de notion de capital social, de dénomination ou de siège social. Elle est également moins coûteuse que la seconde et plus facile à gérer en termes de comptabilité, de fiscalité et de formalisme juridique. Cependant, elle souffre d'un inconvénient majeur. «Les patrimoines professionnel et personnel d'un free-lance qui opte pour ce statut sont juridiquement confondus. Il devient donc responsable personnellement des dettes qu'il contracte sur le plan professionnel et risque d'engager l'ensemble de ses biens», précise un expert comptable. La création d'une SARL, elle, est une option qui permet justement de dissocier le patrimoine personnel de celui de l'associé unique, sa responsabilité n'étant engagée qu'à hauteur du montant du capital. Elle offre également la possibilité d'avoir un salaire au sein de la société et une certaine crédibilité vis-à-vis des différents partenaires (banquiers, clients, fournisseurs…). Cela dit, les inconvénients de ce statut sont la lenteur dans les démarches de constitution et le formalisme juridique au niveau du fonctionnement. Ce qu'il faut savoir, c'est que la majorité des travailleurs indépendants optent pour le premier statut, c'est-à-dire l'inscription au registre des patentes en tant qu'entrepreneur individuel. Néanmoins, même dans ce cadre, il faut respecter certaines obligations fiscales. En effet, il faut tenir une comptabilité régulière (conserver les factures et les pièces justificatives), procéder à la déclaration de la taxe sur la valeur ajoutée -TVA – (trimestriellement si le chiffre d'affaires annuel ne dépasse pas 1 MDH et mensuellement s'il dépasse ce montant), s'acquitter de la taxe professionnelle (exonération pendant les cinq premières années d'activité), calculée sur la base de la valeur locative du domicile fiscal, et, enfin, déclarer annuellement les revenus soumis à l'IR. Sur ce dernier point, plusieurs régimes pour le calcul de l'IR professionnel sont définis par le Code général des impôts. Le premier, qui est général, est dit «régime du résultat net réel». Il est adapté aux sociétés de taille assez importante. Le deuxième, optionnel, est le régime du «résultat net simplifié». Il peut être choisi si le chiffre d'affaires annuel du travailleur indépendant ne dépasse pas 500 000 DH. Quant au troisième régime, dit «bénéfice forfaitaire», il peut être appliqué si le chiffre d'affaires annuel ne dépasse pas 250 000 DH. Enfin, pour ce qui est de la couverture sociale, la seule solution pour un indépendant qui a choisi d'être simplement patenté est de souscrire une assurance maladie et un plan d'épargne retraire. Ceux qui ont opté pour la SARL, en revanche, doivent s'affiler à la CNSS afin de bénéficier de la couverture sociale en tant que salariés.