De 2008 à 2016, les investissements dans les Fintechs ont été multipliés par treize dans le monde. Les régulateurs marocains y mettent du leur pour booster le domaine. Dans le cadre des activités d'animation des membres de sa communauté, Casablanca Finance City a organisé, le mardi 9 mai, une conférence sur les Fintechs, animée par des experts internationaux du domaine (Luxembourg For Finance, B-Part consulting, PwC) et des représentants des régulateurs marocains (Bank Al-Maghreb et l'Autorité marocaine des marchés des capitaux). Le terme Fintech, un mot barbare jusqu'à il y a une dizaine d'années, est né de la contraction de Finance et Technologie. L'ambition des Fintechs est claire : bousculer les banques et révolutionner le monde de la finance. Et c'est déjà le cas ! Selon le World FinTech Report 2017, la moitié des clients des banques dans le monde utilisent des produits ou services proposés par les FinTechs sans forcément le savoir. En effet, ces dernières ont bénéficié d'un écosystème favorable à leur développement : une modification de la réglementation, des technologies digitales plus performantes et une utilisation intensive du smartphone. Les Fintechs proposent des services accessibles n'importe où, n'importe quand et via n'importe quel canal. C'est la raison pour laquelle elles ont réussi à casser le monopole des grandes institutions bancaires à l'international, en se spécialisant dans certains des services traditionnels offerts par les banques (paiement alternatif, néo banques, robo advisor, tenue de compte). «Les Fintechs arrivent à proposer des services à des prix défiants toute concurrence car elles se concentrent sur des niches, profitent de technologies éprouvées à des prix concurrentiels et surtout elles sont plus agiles ! Les banques s'en inspirent de plus en plus dans leur management», a déclaré Jean Jacques Le Bon, cofondateur de B-Part consulting. Dans sa dernière étude sur les Fintechs, le cabinet de conseil et d'audit PwC révèle que plus de 80% des banques, assurances et sociétés de gestion internationales prévoient de renforcer leurs partenariats avec des Fintechs dans les trois à cinq prochaines années. Les établissements financiers traditionnels choisissent donc la collaboration avec les Fintechs alors que 88% d'entre eux s'inquiètent de perdre une partie de leur activité au profit de ces nouveaux acteurs. En moyenne, les entreprises multinationales estiment qu'un quart (24%) de leur chiffre d'affaires est aujourd'hui menacé. Selon la plateforme DeNovo de PwC, les start-up dans les Fintechs ont attiré 40 milliards de dollars d'investissements cumulés dans le monde ces quatre dernières années. PwC souligne que les sociétés financières prévoient un retour moyen sur investissement de 20% sur leurs projets en lien avec les Fintech. Entre 2008 et 2016, les investissements dans ce secteur ont été multipliés par treize. A la pointe du mouvement, les Etats-Unis concentrent 80% des capitaux investis. Les stars de la FinTech sont cotées au Nasdaq de New York comme par exemple Square, la société de paiement mobile de Jack Dorsey (le fondateur de Twitter) qui pèse déjà 3 milliards de dollars. Quant à SoFi, la Fintech qui s'attaque aux prêts étudiants, elle revendique à ce jour 18 milliards de dollars de prêts émis. En Europe, le Royaume-Uni et la place financière de Londres attirent à eux seuls 40% des investissements réalisés en la matière sur le Vieux Continent. Et le Maroc dans tout ça ? Nous sommes évidemment bien loin derrière ces avancées mondiales vertigineuses. Cependant, l'engouement pour la digitalisation est de plus en plus palpable et des projets se concrétisent régulièrement. Une bonne volonté de la part des acteurs du secteur mais également de la part des régulateurs. D'ailleurs, Bank Al-Maghrib s'intéresse sérieusement au monde des Fintechs, à en croire Asmaa Bennani, Directrice en charge de la surveillance des systèmes et moyens de paiement et de l'inclusion financière. «Bank Al-Maghrib s'intéresse au monde des Fintechs pour plusieurs raisons, notamment le fait qu'elles devront stimuler la concurrence sur le marché et contribuer à la réduction des coûts des services financiers. De plus, l'introduction de ces services met le défi réglementaire en perspective». La Banque centrale a adopté il y a un peu plus d'un an une nouvelle loi bancaire (Loi 103-12) introduisant deux concepts indispensables pour que la Fintech au Maroc ait un avenir : le concept de l'Etablissement de paiement et celui d'Agent de paiement. Le premier met fin au monopole des banques sur les services et moyens de paiement. Dans l'ancienne loi, seules les banques avaient la possibilité d'opérer et mettre sur les marchés des moyens de paiement (cartes bancaires, chèques, espèce, etc.). Aujourd'hui un opérateur télécoms peut faire une demande d'agrément pour obtenir le statut d'établissement de paiement et commencer à ouvrir des comptes de paiement, sans que ses clients aient l'obligation de passer par une banque. Par ailleurs, les établissements de paiement peuvent désormais mandater deux catégories d'agents de paiement (deuxième concept): des agents de paiement principaux qui peuvent offrir des services de paiement pour le compte d'un seul établissement dans le cadre de son périmètre d'agrément ; et des agents de paiement détaillants, mandatés directement par un ou plusieurs établissements, ou par leurs agents de paiement principaux.