Hormis le stress lié aux examens, les élèves subissent l'angoisse de leurs parents. En plus des cours de soutien, les familles recourent de plus en plus au coaching scolaire avant d'affronter cet examen décisif... A soixante jours des examens du baccalauréat, la tension monte d'un cran dans les familles. Un stress qu'il est aisé de comprendre lorsque l'on connaît toute l'importance de ce diplôme qu'il faut absolument décrocher pour accéder à de grandes écoles et réussir sa vie professionnelle. Ou sa vie tout court. En effet, le bac, examen validant les études du second cycle du cursus scolaire, a trois dimensions, souligne Waffae Hajjani, coach scolaire : une dimension réelle, étant donné qu'il s'agit d'un ensemble d'épreuves ; une dimension symbolique, puisqu'il s'agit d'un sésame ouvrant les portes d'une réussite professionnelle et sociale ; et enfin une dimension rituelle puisqu'il est une étape reconnue comme déterminante pour entrer dans l'âge adulte. Cette triple dimension explique et justifie la situation de stress et d'anxiété précédant les examens. Ceux-ci se dérouleront, comme chaque année, début juin et les parents et les lycéens, tous stressés, s'y préparent et mettent les bouchées doubles pour la réussite. Comment les familles gèrent-elles le stress du bac? Comment les lycéens se préparent-ils à ce rendez-vous important et quels en sont les enjeux ? La bonne attitude est, en principe, de rester zen, car il s'agit d'un examen comme un autre. Les lycéens ne sont-ils pas habitués, depuis les petites classes, aux évaluations et autres compositions et examens ? Présentée comme cela, la situation paraît simple et gérable. Pourtant, dans la réalité, elle est plus compliquée et il y a une angoisse qui peut sembler, selon les psychologues, disproportionnée par rapport aux enjeux de l'examen fatidique. Les psychologues recommandent aux intéressés de prendre du recul et relativiser car, ajoutent-ils, il y a des personnes, des célébrités, des hommes d'affaires qui ne sont pas bacheliers et qui ont réussi leur vie... Mais l'on a beau relativiser, pour les parents, le bac de leurs enfants reste une étape importante dans leur vie et ils se sentent, pour un grand nombre d'entre eux, concernés au premier degré par cet examen, car il est indispensable pour leur réussite professionnelle. C'est ce qui explique toutes les mesures qu'ils prennent pour accompagner leurs enfants dans les préparations de l'examen : cours particuliers, coaching pour gérer le stress, etc. Ainsi, même si les lycéens travaillent régulièrement et sérieusement depuis le début de l'année, les parents paniquent et recourent aux cours particuliers dont le rythme s'accélère à l'approche de l'examen. Il y aurait, selon les spécialistes de la question, comme une sorte de culpabilité ressentie par les parents qui veulent assurer toutes les chances de réussite à leurs enfants. Preuve en est, selon Mme Hajjani, «même les élèves brillants n'échappent pas aux cours particuliers». Les écoles de soutien scolaire ainsi que les professeurs mettent, eux aussi, tous les moyens pour répondre à cette demande qui enregistre, chaque année, une croissance régulière et soutenue. Aujourd'hui, les parents doivent prévoir, en sus des frais de scolarité, un budget variant de 8 000 à 12 000 dirhams pour des cours de soutien dispensés dans un établissement. Lorsqu'il s'agit de cours dispensés à domicile le budget peut atteindre les 15 000 dirhams pour les matières scientifiques. Sans compter les cours de langues, en particulier l'arabe et l'anglais. Il est clair donc qu'en plus de leur investissement émotionnel, les parents sont appelés à faire également un important investissement financier. C'est dire tous les enjeux de ce baccalauréat. Les lycéens piégés par les divers enjeux du bac En plus de leur engouement pour les cours particuliers, les parents, angoissés et craignant une «mauvaise surprise», optent de plus en plus pour un programme d'accompagnement de leurs enfants. Le coaching scolaire, en développement depuis trois ans, a donc de beaux jours devant lui. «Les familles recourent de plus en plus à des spécialistes pour aider les enfants et permettre un suivi durant la période des examens du bac mais aussi après, notamment pour les préparations aux concours d'entrée en médecine, aux grandes écoles et aux classes préparatoires», avance Mme Hajjani qui, depuis deux ans, suit régulièrement des lycéens. Cet accompagnement, qui doit permettre de reconnecter le lycéen avec la confiance en soi et l'estime de soi, peut commencer dès le début de l'année de terminale comme il peut démarrer au troisième trimestre. Soit à la veille des examens. Les spécialistes prévoient un suivi qui se déroule à raison d'une à deux séances par semaine. Celles-ci sont facturées de 500 à 1 000 dirhams selon les coachs. Les prix n'étant pas réglementés dans ce secteur, il est difficile de justifier la variation de la fourchette tarifaire. Par ailleurs, souligne une maman, «il faut noter que lors des séances qui durent 60 à 90 minutes, c'est l'enfant qui travaille dans le cadre du processus de questionnement, bien sûr sur la base et à l'aide des outils qui lui sont donnés par le coach. Donc en fait, à mon avis, il est difficile de justifier les tarifs atteignant 1000 dirhams». On notera également que contrairement à ce que l'on pourrait croire, le recours au coaching n'est pas propre aux familles aisées. Les spécialistes avancent que des familles de la classe moyenne font l'effort financier de payer ce suivi car les parents veulent assurer au maximum les chances de réussite. Bien que le coach n'est tenu par aucune obligation de résultat quant à la réussite de l'examen. Il s'agit d'un accompagnement pour gérer le stress et redonner confiance en soi. Pour Mehdi, lycéen en terminale, «le suivi chez le coach n'est pas une nécessité, en tout cas pour mon cas, je n'en ressens pas le besoin mais je dois le faire pour ma mère qui estime que c'est utile. Mais est-ce utile pour elle ou pour moi ?». Un tel questionnement révèle que nombre de parents projettent leurs angoisses sur leurs enfants, et on peut même dire qu'ils sont davantage une source d'angoisse que d'encouragement pour un candidat au baccalauréat déjà stressé par son examen. Poussant plus loin la réflexion, il apparaît clairement que les lycéens sont piégés par les divers enjeux du baccalauréat. «En effet, les enfants sont partagés entre l'enjeu de l'importance de l'examen pour les parents, l'enjeu de la moyenne à obtenir pour pouvoir passer les concours d'entrée aux écoles, universités et autres classes préparatoires et l'enjeu de la fierté, de la peur de décevoir et la peur de l'échec. Tout cela apporte une charge supplémentaire de stress au candidat», souligne Waffae Hajjani. C'est pour cela que les spécialistes du coaching scolaire conseillent aux parents de lever le pied à la veille des examens et aux lycéens de réviser en dehors de chez eux lorsque la pression est trop forte à la maison. Cependant, il est à noter que tous les parents n'angoissent pas pour le baccalauréat. Et cela peut être aussi nuisible pour le moral du candidat qui peut se sentir délaissé ou abandonné par sa famille alors qu'il s'apprête à passer un examen déterminant pour sa vie professionnelle et sociale. Que faire alors ? Les coachs recommandent le juste milieu : il faut prendre le bon côté des choses, se projeter dans la réussite et adopter une attitude positive. Le stress est normal, estiment les spécialistes du coaching scolaire, mais il faut le contrôler et surtout positiver. Outre les enjeux de réussite professionnelle et sociale du bac, on peut dire que cet examen a aussi un enjeu commercial pour les établissements scolaires. Le taux de réussite au baccalauréat est un argument central dans la stratégie marketing des établissements privés et publics également. Ce qui explique les mesures prises par certains établissements en vue d'organiser des cours de soutien, des séances de révision, des examens type bac et enfin et surtout leur concurrence pour le recrutement des meilleurs professeurs pour les classes de terminale.