« C'est la hogra. Ils m'ont méprisé. Mon gagne-pain est perdu ». C'était la dernière phrase qu'a prononcée Hamid El Kanouni, le vendeur ambulant, qui s'est immolé dimanche soir dans la ville de Berkane. Ces propos ont été rapportés par un de ses amis l'ayant accompagné dans l'ambulance, lors de son dernier voyage à Casablanca. « Hamid a perdu connaissance après qu'on lui ait administré un calmant dans l'ambulance. Quand on s'est approché de Casablanca, il a retrouvé ses esprits. Mais il a prononcé des mots inaudibles. Mais j'ai pu comprendre qu'il disait : « Ils m'ont méprisé », « je suis brûlé » « il est où Hicham» », nous informe son compagnon dans une déclaration à Lakome.com. Par la suite, Hamid a perdu connaissance une deuxième fois, avant de succomber à ses brûlures le lendemain, mardi 9 août 2011, à 7 heures du matin. Selon son ami, Hamid vendait du pain sur une carriole depuis le début du mois de ramadan, sur le boulevard Mohamed V à Berkane. Le dimanche 7 août, en fin de journée, il a été surpris par une voiture de police, arrivée à la demande de la propriétaire de la boulangerie située sur le même boulevard. « La police a soutenu la boulangère, et un des policiers lui a saisi sa carriole. Il a aussi été giflé et insulté. Il s'est senti humilié, donc il est parti devant le commissariat de la ville, s'est aspergé d'essence et a mis le feu à son corps », raconte son ami d'une voix tremblante. Mustapha El Kanouni, frère du défunt Hamid El Kanouni, a affirmé dans une déclaration à Lakome.com, que les autorités locales ont proposé à la famille d'enterrer le corps à Casablanca au lieu de le faire à Fès, où vit sa famille. « Les autorités veulent éviter tout forme de protestation lors des funérailles», ajoute Mustapha El Kanouni, depuis le Centre hospitalier Ibn Roshd de Casablanca, ce mardi 9 août 2011. Des militants associatifs et politiques ont organisé une manifestation devant le siège régional de la Sûreté nationale pour exiger l'ouverture d'une enquête par le Procureur du roi. La ville a vu l'arrivée massive de forces de maintien de l'ordre en prévision de mouvements de protestation plus importants. " Dès l'annonce de la mort de ce jeune, le Mouvement du 20 février a appelé à une manifestation populaire à Berkane le soir du 9 août 2011", explique Abderrahim Seddiqi, président de la section locale de l'AMDH (Association marocaine des droits de l'Homme). Contacté par Lakome.com, un autre militant des droits de l'Homme de Berkane a affirmé que le Procureur avait entamé un dialogue avec le groupe de militants qui organisait la manifestation. Il aurait promis d'ouvrir une enquête.