Les habitants de la ville de Casablanca se sont réveillés dimanche matin sur les rythmes de coups de matraques et d'arrestations des manifestants du mouvement du 20 février. Les habitants de la ville de Casablanca se sont réveillés dimanche matin sur les rythmes de coups de matraques et d'arrestations des manifestants du mouvement du 20 février. Les forces de l'ordre étaient, dès la soirée du samedi 12 mars, présents en force dans les rues du centre de la capitale économique. Un déploiement des agents de différents corps de police qui a laissé pantois les habitants. Ceux-ci assisteront le lendemain à des scènes longtemps oubliées, des « images dignes des évènements du 21 juin 1981 », a même osé un passant. Les faits Suite à l'appel du mouvement du 20 février de Casablanca, un sit-in était programmé le matin du dimanche 13 mars devant la préfecture de Casablanca, dans la place que le mouvement a baptisé « Alhourria » (liberté). Une place où des sit-in ont été tenus tous les dimanches depuis le 20 février dernier. Par petits groupes, les manifestants ont convergé vers la place. Un parcours rendu particulièrement ardu par le blocage par les forces de l'ordre des artères et ruelles menant au point de rendez vous des manifestants. Même les passants n'étaient pas épargnés, certains seront dissuadés par la force. Dans le boulevard Lalla Yacout, une centaine de militants du mouvement islamiste d'Al Adl wal Ihssane seront accueillis à coups de matraques, le tout assorti d'insultes et de formules d'humiliation. Les femmes et les enfants y passeront. A « la place liberté », deux cents personnes réussissaient à scander les slogans habituels du mouvement, mais la protestation aura été de courte durée. Les militants tenteront alors de joindre le local du Parti socialiste unifié (PSU), situé Rue d'Agadir. 123 personnes n'y arriveront pas. Elles seront arrêtées. Parmi elles des citoyens lambda dont le seul tort étaient de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. Devant le local du PSU, rue d'Agadir, les manifestants commenceront à se rassembler, atteignant les 1500 personnes. Ils feront un sit-in ouvert dans la rue pour réclamer la libération de leurs camarades. « Certains sont restés à la rue, d'autres militants faisaient le décompte des arrêtés et des blessés, le local du PSU s'est transformé en une infirmerie, puisque les ambulances ont tardé » a déclaré Youssef Mezzi du mouvement du 20 février à Lakome.com. « Pendant ce temps-là, les forces de l'ordre n'ont cessé de se renforcer en face de nous, et des deux bouts de la rue. On est complètement encerclés ». Plusieurs manifestants ont reçu des pierres, des œufs et des jets d'acides du haut des immeubles. Ils ont craint l'intervention des baltajias (les casseurs). « Non, c'est le gouverneur de la sûreté nationale, Mustapha Mouzouni qui a personnellement donné l'ordre à ses agents en civil de nous attaquer du haut de ces immeubles » déclarait un militant présent. Mamfakinch Il était 13h quand un responsable de la police s'est approché des manifestants pour leur annoncer la relaxe imminente de leurs camarades. Une promesse qui a tardé à se concrétiser. Les manifestants persisteront à manifester avec force slogans jusqu'à ce que tous leurs camarades soient relâchés sains et saufs. D'autant plus que la police continuait d'arrêter et de transférer à la préfecture toutes les personnes se dirigeant vers le rassemblement. A 15h, les détenus étaient relâchés. Le sit-in se renforcait et se transformait en protestation contre la brutalité policière. Les évènements prendront alors une autre tournure. Les forces d'intervention rapide ont commencé à avancer vers les manifestants avant de finalement charger. Encerclés des deux bouts de la rue, et derrière eux, le local du PSU, comble, ne pouvait accueillir plus de monde. « Ils nous ont frappés à l'aveuglette, ils ne se souciaient pas des parties sensibles du corps, encore moins des vieilles personnes, des femmes ou des enfants » poursuit Youssef Mezzi. Certains « vieux militants », dont Mohamed Sassi et Mohamed Hafid, ainsi que l'humoriste interdit Ahmed Snoussi (Bziz), formaient une chaîne humaine pour protéger les jeunes…ils ne seront pas épargnés. « Tous ceux qui cherchaient à fuir par les rues d'à côté ont subi la matraque, l'humiliation et plusieurs ont été arrêtés, battus dans les estafettes avant d'être relâchés quelques ruelles plus loin » explique Rachid Alaoui, du mouvement 20 février Casablanca. Vers 17h, les hostilités s'arrêtaient. « On recompte nos blessés, un petit comité est parti à l'hôpital» précise Rachid Alaoui. Selon les organisateurs, une centaine de blessés ont été enregistrés, dont un jeune dans un état grave. Suite au matraquage, Mehdi Sehami a eu la colonne vertébrale fracturée. Les journalistes venant couvrir l'évènement n'ont pas été épargnés non plus. Le journaliste Salaheddine Lemaizi s'est vu confisquer son téléphone et son appareil photo et a passé deux heures au commissariat. Le journaliste du quotidien Al Ahdath Al Maghribia, Mouh Oussi, a été également battu. Dans le lot, on a confisqué le matériel de deux photographes du même journal, coups de pied et insultes à l'appui. Alors que l'indignation a été le sujet de toutes les déclarations des organisations, associations et partis politiques, ainsi que des personnalités publiques, dans les JT des chaînes publiques marocaines, ces évènements se réduisaient à une simple opération de maintien de l'ordre. La dispersion d'une « marche non autorisée », qui a rassemblé une centaine de personnes militants de l'organisation Al Adl Wal Ihssane.