Etat de l'immobilier au Maroc Si depuis ces cinq dernières années le secteur de l'immobilier ne cesse de gagner en croissance et en dynamisme, pour autant, on est loin du pari de 200.000 logements par an. Les difficultés mises en avant par les promoteurs tournent surtout autour de l'accès à la réserve foncière de plus en plus rare, et donc chère, des autorisations de construire au compte-gouttes et la faillite des collectivités locales quant à la dotation des zones à bâtir en infrastructures de base. "Il faut être aveugle pour ne pas constater que le marché de l'immobilier se porte bien », constate un Casablancais. Remarque d'ailleurs corroborée par Youssef Iben Mansour, président de l'Association des lotisseurs et promoteurs immobiliers de Casablanca (ALPIC) quand il déclare : « Il faut avouer que ces dernières années, le secteur a connu une dynamique et une croissance jamais égalées dans l'histoire de l'immobilier au Maroc ». Si jusqu'à une date récente, se construisaient au Maroc annuellement entre 75.000 et 85.000 logements, il a été annoncé dernièrement que le nombre de 113.000 a été dépassé en 2005. « Ce qui fait que la cadence des constructions a augmenté et nous avons enregistré 20 à 25 % de hausse du nombre des logements construits et livrés en 2005 », indique encore Youssef Iben Mansour. En plus de ce chiffre réalisé, les dernières statistiques annoncent 350.000 unités en chantier. Cela ne doit pas pousser à un optimisme de bon aloi dans la mesure où il n'est pas dit qu'en 2006 les réalisations de 2005 seront doublées. Mais ce qui est très probable, dit-on, c'est que l'année en cours dépassera de 10 à 15 % le nombre de logements de l'année 2005. La promotion immobilière privée a, quant à elle, représenté 61 % par rapport aux 113.000 avancés. « La part du privé a tendance à augmenter bien que nous estimions qu'elle peut aller au-delà de ce chiffre-là si certaines conditions sont remplies », estime pour sa part Miloud Chaâbi président-directeur général de Chaâbi Liliskan, filiale de Ynna Holding. Devant l'éloquence de ces chiffres et leur évolution géométrique, où se trouvent alors les difficultés qui freinent le marché de l'immobilier, notamment celui détenu par les promoteurs privés ? La réponse à cette question se trouve dans le système mis en place pour produire des logements sociaux au Maroc. Car inutile de se leurrer, c'est sur cette catégorie de logements que les demandes sont les plus importantes et donc intéressent les promoteurs de divers horizons. Sur le seul Grand Casablanca, le marché du logement social brasse annuellement quelque 10 milliards de dirhams de chiffre d'affaires. Ce qui fait de ce secteur à forte valeur ajoutée une industrie à part entière avec un effet d'entraînement extraordinaire sur le reste de l'économie. Et pourtant, tout ne semble pas si rose que cela puisse paraître. Trop d'obstacles ! En dépit d'une offre en logements qui augmente de plus en plus à travers tout le pays et notamment à Casablanca, il n'en demeure pas moins que des obstacles majeurs peuvent freiner cet élan. C'est particulièrement le cas au niveau du foncier ou des difficultés liées à la délivrance des autorisations de construire. Cette augmentation de l'offre se traduit aujourd'hui au niveau de Casablanca par une baisse de 20 % des marges des promoteurs. «Dans la perspective d'un projet d'habitation économique, il y a 10 ans de cela, il était possible de trouver un terrain à Casablanca qui coûte entre 200 et 300 DH le m2. Aujourd'hui, les choses étant ce qu'elles sont, il faut multiplier ces prix par cinq ou six pour en acquérir », avance un responsable du groupe Addoha. Une des conséquences de cette situation est de voir les promoteurs se tourner de plus en plus vers les régions. Pour preuve, tous les projets ayant fait dernièrement l'objet de convention entre les promoteurs et l'Etat sont destinés aux régions. « Ce n'est pas un hasard si les promoteurs vont chercher de la marge ailleurs », fait constater Youssef Iben Mansour. Les promoteurs immobiliers qui ont opté d'ouvrir des chantiers à Casablanca s'installent beaucoup plus sur les segments des moyen et haut standings où les marges peuvent atteindre au moins celles susceptibles d'être réalisées à l'intérieur du pays. Par ailleurs, force est de constater aussi que pour réaliser un programme, il faut qu'il soit équilibré. Pour ce faire, il faut qu'il y ait un raccordement entre le programme et les infrastructures de base. À cet égard, nombreux sont les promoteurs qui estiment aujourd'hui qu'il est temps qu'on prévoie les équipements nécessaires, les transports... si on veut relancer les chantiers des logements économiques sur toute l'étendue du territoire. « Les programmes doivent s'intégrer et s'inscrire dans une approche globale des espaces. Ce n'est pas toujours le cas, malheureusement », remarque Youssef Iben Mansour. « Le privé ne peut aller dans des zones à sa guise pour faire les programmes d'une façon endogène. Il faudrait qu'il soit intégré dans un plan d'aménagement et d'urbanisme. De plus, il faut qu'en face s'exprime une demande »,. ajoute Miloud Chaâbi. Concrètement, pour les promoteurs du secteur privé, si le Maroc veut atteindre le niveau de 200.000 logements par an comme l'avait voulu le Roi Hassan II durant les année 90, il lui faudrait outre les infrastructures, des facilitations administratives dans les autorisations à construire. À ce niveau, tout semble encore très lourd. Si le problème des autorisations s'est beaucoup amélioré dans certaines villes, dans d'autres ce n'est pas encore le cas. Casablanca en fait partie ! Le délai dans la capitale économique est plus long qu'ailleurs. L'Etat a installé des guichets uniques dans les localités où il y a moins de lourdeur aujourd'hui. Il y a moins de deux semaines que le guichet unique de Casablanca a vu le jour.