Sept membres de l'Institut royal pour la culture amazighe (IRCAM) ont démissionné la semaine dernière. L'événement n'a pas manqué de secouer, et l'institut et le microcosme politique. Car, de taille. D'abord, c'est la première fois qu'un responsable (ou groupe de responsables), désigné par dahir présente sa démission. De mémoire de nos institutions, jamais un Marocain, choisi par le Monarque n'a pris cette décision avant qui de droit. Certes, les démissionnaires ont adressé leur lettre au recteur de l'IRCAM, il n'en demeure pas moins que c'est une première. Le contenu, ensuite. Les sept démissionnaires se disent "mécontents du rythme avec lequel l'amazighité se consacre dans la société". Deux cibles, précisément : l'enseignement et la communication. On reproche au ministère de Lahbib Malki "d'entraver l'enseignement de la langue amazighe et de sa généralisation dans les écoles du pays". Au département de la Communication, on reproche toute présence effective de l'amazigh dans les deux chaînes nationales. Presque deux ans après sa création et constitution, c'est la première fois qu'une tempête met au premier plan de l'actualité "la nature du rapport" qui le relie aux autres institutions, exécutives surtout. Vue sous l'angle des démissionnaires, la relation devait être celle d'une haute institution (l'IRCAM en l'occurrence) avec une autre exécutante. "Faux"rétorque le recteur, Ahmed Boukous. "Nos rapports sont établis dans un cadre structuré par des conventions". Est-ce pour rappeler ces évidences que Habib Malki et Ahmed Boukous ont tenu, la réunion de la semaine dernière ? Et pour d'autres choses encore. Mais, force est de constater que la réaction des hautes sphères du pouvoir ne s'est pas fait attendre. A peine la démission publiée par la presse, des contacts ont eu lieu entre un groupe de responsables de l'IRCAM et un "messager" royal. S'ensuit une rencontre entre le ministre de l'Education nationale et la même haute personnalité. Conclusion : "le point d'orgue des deux réunions aura été l'adéquation des décisions de l'IRCAM et les clauses de la charte de l'enseignement, qui lui sont antérieures". Côté audiovisuel, les prochains jours verront le lancement de plusieurs programmes et émissions sur les deux chaînes nationales (RTM et 2M). Mais également sur la Quatrième, dédiée à l'éducation. Fallait-il vraiment qu'il y ait une démission pour faire avancer "la cause amazighe" ? A en croire certaines sources, les motivations des démissionnaires sont loin d'être celles revendiquées par eux. Sans céder à "la théorie du complot", la presse proche des partis politiques y a vu "des manœuvres pour donner une autre coloration à la cause amazighe", comme on a pu le lire sur les colonnes de "Bayane Al youm", organe du PPS. Le quotidien casablancais "Libération" dont le directeur n'est autre que Mohamed Elyazghi, le chef de l'USFP, n'a pas hésité à parler "de surenchère". L'objectif de cette démission, accuse le quotidien, est de "saper" tous les efforts fournis pour défendre la cause amazighe. L'enseignement de l'amazigh y lit-on est davantage une question de moyens, matériels et humains, que de choix de principe. A y voir de plus près, la démission visait "la déstabilisation" du gouvernement via l'institut royal. Une tactique de haut vol que le dénouement rapide, efficace et réaliste de l'affaire a fait capoter. ( A suivre )