Me Abderrahim Berrada Le Conseil consultatif est une institution makhzénienne. C'est une institution relevant du Palais. Rien n'émanera d'elle sans être au diapason de la politique officielle de l'Etat marocain, tracée par le Palais. Une politique qui fait croire tout le monde qu'elle est nouvelle, basée sur le nouveau concept de l'autorité, l'indépendance de la justice, le respect des droits de l'Homme, à sa tête la volonté sincère de lutte contre la torture”, Abderrahim Berrada ne décolère pas, il fulmine. Il a ses arguments ! : “Même le gouvernement n'a présenté son projet (pénaliser la torture) que la semaine dernière. Alors que la nouvelle ère date d'il y a cinq ans déjà”. Taxé, non sans sarcasme de retardataire, le gouvernement n'en donne pas moins une réelle joie à notre cher Maître. Au début du même entretien avec “Al Ayyam”, l'avocat que ses camarades aiment surnommer le timonier rouge ne cache pas son allégresse : “je suis heureux, déclare-t-il, que le gouvernement ait répondu aux doléances des organisations nationales des droits de l'Homme”. Par la suite, il perd le goût de la joie et la ...mémoire : ce qui lui a donné le plaisir du début devient, au milieu de l'interview, source de cynisme. Risible, ce même projet présenté par le même gouvernement redevient un signe... de retard, de “décalage horaire”. Qui croire : le gai savoir (clin d'œil à Nietzsche) ou le droit sarcastique ? Quoi qu'il en soit, la grogne du magistrat debout continue sur un fond d'exagérations : la vérité donc est ailleurs. Ni les rapports “lénifiants et rébarbatifs” du CCDM, ni les slogans “creux et fanfares” n'y peuvent rien : “il suffit, nous conseille Me A. Berrada, d'aller voir du côté des marchands ambulants pour se rendre de la réalité des... tortures dans ce pays”. Et voilà, A. Berrada qui parlait au début des cellules dormantes ne trouve rien de plus convaincant pour défendre son pessimisme que ces “marchands malmenés par quelques agents de police”. Las, l'un des éminents avocats du pays cède facilement à la facilité, et du coup le voilà propulsé sur la double voie et du ridicule et du pathétique. Rien d'étonnant “si des anciens amis” qui “jouissaient jadis d'une bonne réputation ont perdu toute crédibilité”. Ainsi, aisément, et presque sans remords, il tire sur un rapport pour tuer la respectabilité d'anciens “camarades”. Motif ? Un seul : ils sont différents, ils osent “positiver” là où il ne broie que du noir. Aussi hargneux que sournois, l'avocat ne voit rien qui mérite le regard. L'espoir ? C'est un péché originel. Le Maroc qui change ? Un leurre. Si ce n'est pas une rumeur : “la culture du makhzen (ce qu'il a la peau dure ce makhzen !) veut que l'on ne dit au Roi que ce qui lui plaît, ou ne le met pas en colère”. Et si c'est le contraire qui est vrai ? Alors : “ce ne sont que des rumeurs. Même si elles courent pour dire que le Roi aime entendre la vérité, toute la vérité”. Bien évidemment, Driss Jettou en a eu lui aussi pour son frais. “Lui, fait partie du bloc makhzénien. Il ne sera jamais courageux dans la quête de la vérité”. Le comble : “on le paye pour ça” ! Voilà l'expression qui sonne creuse dans la bouche d'un magistrat de renommée. Le nec plus ultra, cependant, on le trouve à la fin de l'entretien : “le Roi doit sortir de son silence et rallier, en tant que soldat parmi d'autres, les rangs des défenseurs des droits de l'Homme”. Simple écart du langage ? Rien n'est moins sûr: “c'est la deuxième fois que je lui demande de nous regagner dans notre combat”. Il a le sens de la formule, l'officier recruteur ! Certainement, on se surprend parfois à regretter le silence quand on voit ce que parler peut engendrer de... perles !