Habitat clandestin Depuis des années, les pouvoirs publics multiplient les mesures législatives et réglementaires dans le but de combattre les constructions clandestines. La dernière trouvaille en date est la circulaire interministérielle tripartite datée du 11 juillet dernier. Mais en tentant de mettre tout sur le dos des élus, la circulaire semble se tromper de cible. La circulaire précitée sera-t-elle assez dissuasive pour freiner tant soit peu l'anarchie qui règne dans le domaine de l'habitat anarchique ? Selon les experts, le nouveau texte peut effectivement diminuer les infractions constatées mais son efficacité diffère selon la nature du champ d'application. Ainsi, la circulaire aura certainement quelques résultats au niveau des villes et autres centres urbains où la réglementation est généralement respectée et le contrôle assuré. Par contre, dans les zones rurales, en particulier les communes limitrophes des grandes villes -notamment Casablanca- on peut d'ores et déjà avancer qu'elle sera de peu d'effet. De nombreuses causes se conjuguent, pour aboutir à cette conclusion. Tout d'abord, galvanisée par la crise du logement, la très forte demande pour l'achat de petites superficies "constructibles" à prix modique (100 m2 à raison de 200 Dh le m2 environ). Ensuite, une disponibilité de l'offre importante provoquée par la nature des terrains qui n'ont plus de vocation agricole que le nom. En effet, il y a belle lurette que l'agriculture a pratiquement disparu des communes de Dar Bouazza, Bouskoura, Médiouna, Lahraouyine …à cause, d'une part de l'assèchement des puits ou tout au moins de l'accroissement du degré de leur salinité et, d'autre part, du morcellement des terrains dû à l'héritage. Faute de ressources, les propriétaires de ces terrains se voient contraints d'en vendre des parcelles pour pouvoir survivre. Et comme le schéma directeur du grand Casablanca classe ces terrains en zone rurale donc non constructibles, toutes ces transactions se déroulent clandestinement. Moyennement un contrat de vente établi par un écrivain public mais non enregistré à la Conservation foncière. Une fois le contrat d'achat du terrain conclu, il reste à résoudre la question de la construction de l'habitat désiré. Les yeux de l'autorité dans ce domaine sont le moqaddem et le cheikh dont le supérieur hiérarchique est le caïd de la commune (qui relève du gouverneur ou du wali). Par conséquent, pour pouvoir construire une habitation hors réglementation, la pratique veut que l'on s'arrange pour fermer les yeux de ces agents d'autorité grâce à des moyens sonnants et trébuchants. Dans ces affaires, l'élu n'intervient guère parce que dans les zones rurales, c'est le caïd qui détient le vrai pouvoir. Et c'est justement cette réalité que la circulaire interministérielle semble occulter.