La plupart des entreprises préfèrent se charger elles-mêmes de leur recouvrement d'impayés plutôt que de le confier à des sociétés de recouvrement Les entreprises sont disposées à parler de tout, sauf de leurs problèmes de recouvrement Les entreprises du BTP sont les plus disposées à parler de leurs problèmes de recouvrement “S'il vous plaît, pouvez-vous attendre que le patron vous reçoive pour lui exposer les motifs de votre visite”, lance une secrétaire à l'agent de recouvrement d'une société qui étale volontairement des factures impayées devant des clients venus s'approvisionner. Ne sachant plus à quel saint se vouer, nombreux sont les agents de recouvrement qui n'ont trouvé que ce moyen pour se faire payer : gêner, perturber, harceler ou encore véhiculer une mauvaise image de l'entreprise créancière dans la société elle-même. Les entreprises ont-elles d'autres moyens pour se prémunir des impayés ou les recouvrer ? Pourtant, le renseignement commercial, les relances, la gestion des contentieux, l'assurance-crédit ou factoring, sont autant d'outils censés protéger des impayés. Mais encore faut-il être un as du recouvrement de créances ou avoir les moyens de recourir aux sociétés spécialisées. Entre les deux solutions, la plupart des entreprises choisissent de se charger elles-mêmes de leur recouvrement d'impayés, même si elles reconnaissent la nécessité d'une véritable politique de prévention... et de gestion des recouvrements. En effet, la quasi-totalité de celles interrogées sur la question trouvent soit les honoraires des sociétés spécialisées très élevés, soit ignorent leur existence ou doutent de leur efficacité. “Les défaillances d'entreprise ont augmenté et les délais de paiement ne cessent de s'allonger”, souligne le patron d'une entreprise spécialisée dans la vente d'appareils électriques, qui préfère garder confidentiel le niveau de ses factures impayées. Selon lui, on oublie trop souvent que, pour amortir un impayé de 100.000 dirhams, une entreprise qui dégage un bénéfice de 5 % doit réaliser 2 millions de dirhams de chiffre d'affaires supplémentaire... C'est dire que l'enjeu est de taille. Cet enjeu semble être vital pour les entreprises du bâtiment et des travaux publics (BTP), qui sont davantage disposées à aborder dans les faits les problèmes de recouvrement, elles qui dépendent pour beaucoup des commandes de l'Etat. “70 % de nos activités sont liées aux commandes de l'Etat, qui tarde toujours à payer. Ce qui nous porte préjudice, surtout dans le démarrage de nouveaux chantiers ou dans les appels d'offres”, souligne un professionnel du secteur. Pour les fournisseurs de l'administration et des communes, les entreprises semblent préférer mettre en avant leurs relations pour débloquer les dossiers en souffrance. Depuis l'avènement des centres d'appels, les entreprises ont également de plus en plus recours au télé-recouvrement pour relancer et accélérer les recouvrements. Dans ce casse-tête chinois, les exportateurs français ont leur mot à dire, surtout pour ceux d'entre eux qui s'intéressent au marché maghrébin. Selon une enquête réalisée récemment par une association de professionnels du secteur, les trois pays de l'UMA (Maroc, Tunisie et Algérie) restent pénalisés par une certaine fragilité financière, et des problèmes de solvabilité s'y posent régulièrement. Les exportateurs européens, grands groupes ou simples PME, sont placés de ce fait devant d'importants problèmes de recouvrement, surtout si les contrats de vente ne bénéficient pas d'une assurance export. Selon cette enquête, de manière générale, le Maroc et la Tunisie ne posent cependant pas trop de problèmes de paiement, car les circuits bancaires y sont assez bien organisés. En cas de retard, il suffit donc de s'armer de patience et de trouver un représentant local, commercial ou juridique, suffisamment tenace pour faire avancer la procédure de recouvrement.