Les Anciens Abattoirs de Casablanca ont accueilli du 28 au 31 mai la onzième édition du Tremplin du L'Boulevard. Au menu de ce week-end de fête, la compétition attendue, mais aussi des concerts et des créations. Un succès d'autant plus méritoire que l'édition 2009 a failli ne jamais voir le jour. Les gagnants sont… Ils reviennent de loin les organisateurs du L'Boulevard 2009. Finalement, après moult rebondissements, la compétition des jeunes talents de la scène rock, rap et fusion marocaine s'est déroulée sans encombre. Oubliées les difficultés financières, la culture urbaine a trouvé durant trois jours refuge dans le très beau site des anciens Abattoirs de Casablanca. Et comme un pied de nez aux sponsors inscrits aux abonnés absents cette année, l'esprit revendicatif qui a fait la marque de fabrique du Tremplin a trouvé sa revanche dans le succès populaire qu'a rencontré l'évènement. Pour ne rien gâcher, le talent était aussi au rendez-vous. Sans oublier ce qui contribue autant au spectacle que la musique sur scène: le public hyperlooké du L'Boulevard ! Du gothique au gangsta rappeur en passant par les innombrables rastaman, la foule bigarrée de l'événement est à l'image de ses organisateurs : libre et rebelle. A l'issue de trois jours de compétition, la liste des gagnants du Tremplin 2009 a donc été dévoilée. Sur les 22 groupes sélectionnés pour cette 11e édition, il n'en est resté que six. Dans la catégorie Rap/Hip Hop, c'est le groupe Nichane de Casablanca qui a remporté le premier prix. Le groupe de rock Impload a quant à lui raflé la mise dans cette catégorie. Enfin, pour la fusion, ce sont les six Gadiri de Mouja Vibration qui ont su conquérir le public du Tremplin par leur musique métissée entre reggae et gnaoua berbère. Malheureusement, faute de budget cette année, pas de chèques pour les gagnants, mais la garantie d'enregistrer deux morceaux pour les premiers groupes de chaque catégorie, et un morceau pour les seconds. Musique et Street Art Mais le Tremplin du L'Boulevard, c'est aussi des concerts de groupes confirmés et des street happenings. Cette année, le public a pu assister aux concerts de groupes nationaux et internationaux invités à l'évènement. La soirée d'ouverture du Tremplin a été inaugurée par le rappeur rbati, Would cha3b, puis les Psy4 de la Rime, rappeurs français, ont enflammé un public de connaisseurs. On notera la belle performance de Speed Caravan, un groupe de fusion franco-algérien qui mélange avec brio oud, rock et électro, et le fruit de la résidence « Casser le mur », organisée conjointement avec le festival espagnol de Las culturas Pirineos Sur, qui a réuni sur scène la chanteuse Oum, Hicham Bajjou ou DJ Mood entre autres. Côté Street Art, des taggers ont rajeuni les murs des anciens abattoirs de leurs fresques colorées, tandis que les skatters et bikers ont exercé leurs figures dans un coin dédié. A l'intérieur de l'un des bâtiments, une expo a retracé l'évolution des créa' du L'Boulevart. Comme quoi le Tremplin, après onze années d'existence, continue de jouer ce rôle indispensable d'exutoire pour une jeunesse marocaine en mal de lieux d'expression culturelle. Même amoindri, L'Boulevard a en tout cas prouvé qu'il pouvait créer sans moyens. Non sans mal. Et pour combien de temps encore ? ■ La fête : tranquille, conviviale, heureuse. Comme chaque année, le mauvais temps tourne autour. Comme chaque année, ça menace mais ne tombe pas. Il y a un Dieu pour le Boul'vard. Imaginez une foule de jeunes gens, garçons et filles – en vérité plus de mecs que de gonzesses – qui profite du plaisir de se retrouver ensemble, dans un lieu protégé, à écouter leur musique. C'était ça, pendant quatre jours aux Abattoirs. L'occasion aussi pour les stylistes sages en panne d'imagination de se ressourcer. Qui a dit que la mode c'est dans la rue qu'elle se crée ? A cette aune, la rue casablancaise a une créativité folle. Fallait voir. Costume cintré trois pièces en lamé argent, tenues (?) largement dénudées pour ces mad max casaouis. Pas assez de muscles quand même. Pour les dames : Voilures en dentelle pourpre et caftans cintrés en cuir, avaient une sacrée gueule. Vendredi, avec Speed caravan et dimanche, avec Festi del Sur ; cela fait deux concerts extraordinaires, magnifiques, magiques… sur quatre soirées. Il y a plus d'un festival international qui voudrait bien en faire autant. Seule fausse note, ce poète français (poésies engagées niveau 4ème de transition) qui s'obstine à réciter son « voisin de palier ». Jadis, le grand Chirac stigmatisait les odeurs, celui-ci s'émerveille de constater que son voisin malien parle « magnifiquement » le soninké ! L'idée de départ n'est pas la même pour les deux, mais le résultat est le même : il y a donc des gens qui ne sont pas comme eux. Comme c'est bizarre ? Quand donc, au Maroc, cessera-t-on, d'Oujda à Casablanca en passant par Essaouira, de nous infliger les traditionnels discours anti-Sarko qui n'apportent rien ? Ni aux Français, encore moins aux Marocains. Et ce groupe de hip-hop toulousain qui a conclu son concert par une vibrante communication au public : «merci aux organisateurs qui vous ont permis de sortir… » comme si on les avait attendus pour « sortir » ! Bref, à part ces deux réserves, les services de sécurité publics et privés ont fait preuve d'une grande capacité à encadrer fermement et gentiment les rares débordements. Comme quoi, quand on veut… Les restos de viande en face, se frottent les mains et engrangent les bénéfs. 60dhs pour 400g de méchoui de mouton, ça décoiffe. Rien que du bon donc. Pour l'inauguration le mois dernier des Abattoirs, les organisateurs avaient promis un évènement par mois. Promesse tenue ! Au fait, c'est quoi la prochaine ? Qu'on ne la rate pas. ■