Le chef d'Etat tunisien est soucieux d'impulser la coopération maghrébine malgré les obstacles qui entravent l'avancement de l'UMA. Il ne cesse d'œuvrer pour l'unification des rangs. Dans son interview accordée la semaine dernière à la revue de l'opposition, Al- Maghreb Al- Mouahad (Le Maghreb Uni), le président tunisien a souligné que l'édification du Maghreb constitue, pour la Tunisie, un choix stratégique irréversible, un impératif historique et une nécessité vitale et déterminante pour ses peuples. Il estime qu'il est du devoir de tous de conforter ce projet unioniste, de compléter ses structures et de dynamiser ses institutions. Pour ses proches collaborateurs, les consignes qu'il donne quotidiennement aux ministres et aux responsables de l'establishment tunisien, consistent à consolider les relations entre les pays frères maghrébins, et s'éloigner de tout ce qui les sépare. «Les données et les divergences ne sont que passagères, j'ai la conviction que nos frères sont capables de les surmonter», répète Ben Ali. Dans les réunions hebdomadaires du Conseil des ministres, le chef de l'Etat tunisien a mis un point sur l'ordre du jour intitulé le «Maghreb». Celui-ci est consacré au suivi des relations et des projets aussi bien politiques que socioéconomiques dans le cadre de la complémentarité. Il considère que les pays maghrébins se trouvent tous confrontés à des défis intérieurs et extérieurs, qu'ils ne pourront relever qu'au moyen de l'unification des rangs et la conjonction des efforts de tous. «Nous serions beaucoup plus forts si nous négociions d'une seule voix avec nos partenaires européens», disait-il un jour à l'ancien secrétaire de l'Union du Maghreb Arabe (UMA), Habib Boularès. Le volet économique, qui est pour lui un des fondements essentiels de la construction de l'ensemble maghrébin, devrait toujours être mis en exergue. La crise financière internationale et ses répercussions sur les économies maghrébines et la nécessité d'anticiper sur toutes les éventualités, lui donnent raison. Il n'y a que la complémentarité économique et la levée des barrières entre les peuples maghrébins qui pourraient faire face à cette conjoncture morose. Ben Ali, qui affirme que les chefs d'Etat maghrébins ont œuvré en permanence à favoriser les échanges, à harmoniser les politiques économiques et à encourager les initiatives bilatérales en matière de coopération, voit, en revanche, qu'il y a encore beaucoup à faire pour atteindre les objectifs définis lors de la création de cette entité maghrébine. Outre la réalisation des grands projets maghrébins qui revêtent une importance majeure dans la dynamisation du processus, la réalisation de l'intégration et de la complémentarité des pays de la région. Dans son interview accordée à notre confrère tunisien, Ben Ali a tenu à donner une idée de l'évolution continue des échanges commerciaux de son pays avec l'ensemble de son environnement maghrébin. «Ces échanges ont totalisé, pour les dix premiers mois de l'année 2008, un montant de 3,6 milliards de dinars (1 euro = 1,80 DT), contre 2,8 milliards en 2007». Ce qui veut dire que si le politique est confronté à quelques obstacles, l'économique, quant à lui, est en train de se développer et de se consolider au fil des jours. Cependant, ces chiffres, malgré leur signification, demeurent bien en deçà des ambitions. Espoirs malgré les à coups Tout en reconnaissant les à coups dûs à certains facteurs conjoncturels, Ben Ali, estime par contre, que cela ne doit pas perdre de vue la vérité que représentent les étapes parcourues depuis la proclamation de la naissance de l'UMA et en premier lieu, les structures politiques et les institutions mises en place. Dans ce cadre, force de noter les multiples réalisations qui ont été mises en place dans de nombreux secteurs vitaux. Le président tunisien ne cesse de former le voeu de voir se concrétiser la naissance de la Banque Maghrébine d'Investissement et de Commerce Extérieur. Un organisme qui devrait booster l'intégration économique des pays de la région. Une banque spécialisée qui vient s'ajouter aux fonds d'investissements lancés par le secteur privé de l'entité maghrébine qui ont donné leurs fruits, jusque-là, sur le plan du financement de différents projets. C'est dans ce même ordre d'avancement, que l'Union maghrébine des hommes d'affaires a vu le jour. Idem pour la réactivation de l'Union maghrébine des agriculteurs. En dépit de l'optimisme constant chez le chef de l'Etat tunisien, il ne cache pas néanmoins ses craintes du retard enregistré impliquant un coût à plus d'un niveau. A ses visiteurs maghrébins, il dit que sur le plan politique, il n'échappe plus à nos peuples que la non émergence d'une entité maghrébine puissante et cohérente, finira par réduire la capacité de faire face aux mutations profondes et rapides qui se produisent actuellement partout dans le monde. Ce qui devrait nous faire comprendre que les Etats, plus particulièrement arabes, maghrébins, ne peuvent individuellement relever les défis. Laissant les chiffres parler d'eux-mêmes, Ben Ali insiste toujours sur les indicateurs démontrant l'absence d'intégration économique maghrébine. Ce qui, selon lui, fait perdre aux pays de la région, l'occasion de réaliser un taux de croissance annuel de 2% à l'heure où s'aggravent les enjeux du développement et s'accentuent les pressions au niveau de chaque pays maghrébin, tout particulièrement en matière d'emploi. ■