En fixant «la monarchie parlementaire comme horizon», le congrès de l'USFP a relancé une drôle de controverse. Analyse. Abdelouahed Radi, a peine intronisé et qui a clairement manifesté son intention de quitter le gouvernement, doit remettre les pendules à l'heure. Il n'est pas question pour le Premier secrétaire de l'USFP de laisser libre cours aux interprétations possibles du texte adopté par le congrès du parti. Celui-ci parle de l'horizon d'une monarchie parlementaire. Radi, mais plusieurs membres éminents du parti préfèrent insister sur des autres réformes proposées comme la régionalisation avancée par exemple. C'est que le sujet est très sensible. Cette revendication était apparue en 1978, il y a 30 ans. À l'époque, les rapports entre l'opposition et le régime étaient exécrables et la répression battait son plein. «La monarchie parlementaire» constituait le mi-chemin entre les tendances révolutionnaires de l'USFP et la ligne démocratique. Les autres partis de la Koutla ont réagi très sèchement et accusent leur allié de faire de la surenchère. «C'est de l'arrogance politique aurait même déclaré Abbas El Fassi. La grande peur c'est le retour de la tension autour de la question constitutionnelle». Du côté du sérail, on rappelle que le Souverain a clairement défini l'institution monarchique marocaine, comme une monarchie exécutive. Pour le reste, le débat est ouvert : «La réforme constitutionnelle n'est pas un sujet tabou, mais elle n'est ni une urgence ni une priorité». Ni tabou, ni urgence Un fin connaisseur explique «il faut que les partis cessent d'expliquer leurs déboires par la constitution. Si celle de 1996 n'est pas appliquée c'est parce que les responsables abandonnent leurs prérogatives». Des ténors comme Mohamed El Yazghi ne disent pas autre chose. Dans le débat à l'intérieur de l'USFP, Il y a plusieurs éléments qui ont joué. Le traumatisme des élections, les aléas de la formation du gouvernement ont laissé des traces. C'est aussi une profonde inquiétude identitaire qui explique cette insistance sur la réforme constitutionnelle. La preuve que les esprits ne sont pas clairs, c'est que cette réflexion ne se décline pas en position politique immédiate. Elle est là pour soigner les ego des ittihadis et rien d'autre.En homme d'état, Radi veut mettre les points sur les i. Il l'a fait d'ailleurs lors d'une longue interview au journal de son parti pour clarifier ce qu'il avait dit au Matin du Sahara. Il sait qu'au sein du bureau politique certains sont tentés par ce radicalisme verbal, censé redonner une virginité politique à l'USFP à l'approche des élections municipales. Alors il fixe les règles du jeu, il n'est pas question de laisser la surenchère l'emporter. Il a été élu sur une ligne politique en continuité avec les positions du parti depuis l'alternance, il va s'y maintenir. La clarté du débat D'ailleurs c'est Talbi, l'ex-idéologue du PSD qui a tiré le premier en exprimant sa réserve quant à la revendication de la monarchie parlementaire, y compris comme horizon. Il rappelle que ce n'est pas en important des concepts qu'on avance et qu'il ne faut surtout pas oublier le poids de l'histoire. En fait, la réforme constitutionnelle a toujours été une revendication de rupture au Maroc. Il faut rappeler que l'USFP n'a voté oui qu'en 1996. Aujourd'hui elle apparaît comme une surenchère verbale sans contenu réel. Elle sous-entend que la praxis gouvernementale a établi la nécessité de changer de constitution, ce qui est faux. Aujourd'hui ce qui pose problème c'est la faiblesse de l'encadrement politique et le faible intérêt pour la démocratie votative. Certains lient l'abstention à la constitution. «C'est parce que les représentants de la nation n'ont aucun pouvoir réel, que les Marocains ne voient pas d'intérêt aux élections». L'explication est un peu courte, elle est surtout très abusive. Il n'y a pas au Maroc un mouvement fort pour la limitation des prérogatives de l'institution monarchique. Mieux, les Marocains, dans leur écrasante majorité pensent que le Roi utilise à bon escient ses pouvoirs au point qu'ils seraient d'accord pour une forme d'autoritarisme éclairé. L'horizon monarchie parlementaire est historiquement correct, mais politiquement, dans la conjoncture actuelle, une simple fanfaronnade. La classe politique manque de légitimité populaire et ne peut mettre ses déficiences sur le compte des institutions. L'horizon ne peut se concevoir sans toute une démarche de construction qui commence par le renforcement de l'action partisane et son rayonnement. Les institutions issues des élections fonctionnent très mal, en particulier, les communes. Il faut donc remettre le débat sur ses pieds et entamer la longue marche de la constructions démocratique. On peut alors concevoir que dans une échéance lointaine, des politiques jouissant d'une véritable légitimité populaire revendiquent et obtiennent la définition de la politique générale du pays par le Premier ministre élu. On en est loin encore. Abdelouahed Radi veut éviter une confusion des genres, au sein des alliances de l'USFP même s'il aura fort à faire face à des cadors de son parti. Sur le reste, les propositions d'agencement technique des représentations territoriales par exemple, cela ne mange pas de pain. Il faut d'ailleurs noter que tous les partis gouvernementaux, sans exception, sont d'accord pour ces réformes qui ne touchent pas à la nature même du régime. Le vrai débat est ailleurs c'est le PPS qui le pose clairement en réclamant un nouveau contrat avec l'institution Monarchique pour ajouter un palier supplémentaire à la construction démocratique. Cette démarche a plus de chances d'aboutir, que des slogans forts inadaptés au rapport de forces réel. ■