La crise s'étend et s'approfondit avec des réactions très fortes de la part des Etats et des banques dont la séropositivité n'est pas déclarée. Nous écrivions la semaine dernière, concernant les interventions des Etats ; «ce n'est qu'une digue et elle ne tiendra qu'un temps». Lundi la digue a cédé de manière extraordinaire, le plan Bush a été rejeté, les bourses ont accéléré leur descente aux enfers et les ministres des finances font des nuits blanches. Cinq banques ont fait faillite le même jour !. La comparaison avec la crise de 1929 s'impose. La différence, c'est que cette fois les gouvernements réagissent et plutôt vite. En Europe, les institutions de l'UE étant lourdes à manier, ce sont les Etats nations qui se sont impliqués, ce qui ne manquera pas de relancer le débat sur l'Europe et de renforcer les Euro-sceptiques, l'année même des élections européennes. Allemagne, Belgique et Angleterre ont nationalisé ou financé le rachat des banques tombées. Seulement les nouvelles sont mauvaises. Commerz bank, la société générale sont sur la liste des candidats à la déconfiture, et là il s'agit de banques aux connexions multiples. La banque centrale Européenne a débloqué 120 milliards d'euros pour le système bancaire européen, ce qui apparaît déjà comme un petit pourboire. Digérer les grands malades Partout, les banques en faillite ont pour vocation d'être avalées, soit en entier, soit dépecées en secteur d'activités, par d'autres censées mieux armées. Deux sortes de problèmes surgissent : - Les rachats se font dans des délais très courts, l'évaluation est faite en fonction des besoins pour la relance de l'activité concernée - Les banques sauvées par les Etats en vue d'être remises sur le marché, sont assurément porteuses d'un risque de rechutes, les fonds injectés n'étant que le coût de la survie. Une bizarrerie : Dexia est tombée. Il s'agit d'une banque qui finançait quasi-exclusivement les collectivités locales et qui n'avait pas vocation à développer les produits dérivés, faussement accusés d'être les agents de l'infection. Dexia avait pour actionnaires l'Etat belge, la Caisse de dépôt et consignation Française et son homologue luxembourgeoise. Christine Lagarde, ministre des Finances française a déclaré «il s'agit d'une banque belge». Pas de solidarité le jour de l'apocalypse now ! La solidarité de place, entre les banques elles-mêmes, ne joue pas non plus, bien au contraire. Les taux interbancaires atteignent 12 %, les banques ne se prêtent plus d'argent à très court terme, elles n'ont plus confiance. «Tous ceux qui ont une marge de manœuvre, se préparent à digérer ceux qui tomberont», selon la formule d'un confrère Américain. Alan Grenspan, ancien patron de la FED dit à ce sujet «nous risquons de sortir de la crise plus affaiblis que quand nous y sommes entrés. La concentration, cela signifie que nous allons agglomérer les agents de risque infectés ». C'est une vraie bonne question. Tout le monde s'accorde à dire qu'on n'a pas identifié tous les départs de feu, et qu'on ne connaît que les aspects visibles de l'incendie. La concentration, fragilise l'ensemble, si la crise, devait repartir ailleurs. Et au Maroc ? Chez nous, il y a la face visible et la face cachée. La face visible, c'est le discours lénifiant sur la solidité de notre système bancaire et sa capacité à résister à la faillite au monde entier. La face cachée, c'est ce que se disaient les financiers dans le cadre de leurs soirées ramadaniennes. « Si la crise s'étend, l'on sait que l'un des réflexes pour les Européens sera de rapatrier le cash. Il est donc fort probable que BNP, Société générale Crédit Lyonnais, et d'autres, cèdent leurs actifs au Maroc. Cela offrira des opportunités de croissance que l'on évalue en ce moment », affirme le PDG d'une très grande banque. Le must du must, c'est ce qui se chuchote : la naissance d'une méga banque par la fusion d'AWB et de la BMCE. Il y a des années, Othman Benjelloun avait sèchement déchiré la demande en mariage. Qu'est ce qui a changé ? Si cette rumeur, insistante, prenait corps, nous serions face à un problème politique : AWB-BMCE (et les petites banques), l'ONA, la SNI, dans le même panier, cela donnerait des allures de Maroc S.A. L'on sait que cela ne dérange nullement les concepteurs du Meccano.