Tous les partis politiques sans exception sont secoués par des spasmes aggravés par l'arrivée du MTD. Au lieu des alliances, des éclatements sont en vue. Les effets du 07 septembre ne sont pas digérés. Les partis politiques, les plus sérieux et représentatifs s'entend, ne peuvent faire comme si de rien n'était. On sait que l'USFP connaît sa crise la plus grave, non au niveau organisationnel seulement, mais une vraie crise d'identité, de survie qui n'a pu être réglée, voire même discutée au dernier congrès. A l'Istiqlal, on a cru que la première place et la primature ont mis fin aux dissensions, c'était mal connaître la profondeur de celle-ci. Maître Khalifa nous a déclaré, en guise de commentaire sur l'échec du congrès de l'USFP: «C'est ce qui va arriver au congrès de l'Istiqlal si Abbès El Fassi maintient sa candidature pour un troisième mandat». Cette histoire d'amendement des statuts pour permettre au Premier ministre de rempiler, cache mal des dissensions plus profondes. La main mise de quelques familles est très contestée au sein du vieux parti, qui vit lui aussi une vraie crise d'identité. Parti conservateur, salafiste, il est allié à la gauche moderniste depuis la motion de censure. Si cette alliance avait du sens quand il s'agissait d'arracher des acquis démocratiques, elle n'en a plus à l'heure de choix sociétaux non consensuels. D'autant plus que l'Istiqlal se fait déborder sur sa droite par la mouvance Islamiste et le PJD. Le PJD n'est pas le havre de paix dont il veut donner l'image, son aile conciliatrice est très chahutée par les bases depuis l'échec du 07 septembre. Pour avoir trop cru aux sondages traficotés, les intégristes pensaient leur heure venue. La stratégie d'El Othmani et consorts est contestée par une aile radicale plus combattante, dont Ramid est la figure la plus médiatisée. Au RNI le clivage entre les historiques et les pièces rapportées est de plus en plus criard. Ce parti de notables accepte de moins en moins la tutelle et surtout les ministres repeints RNI au moment de leur nomination. L'UC, malgré une avancée sérieuse aux législatives, vit des heures sombres. Ce parti n'arrive pas à trouver ses marques dans l'opposition, ni les voies du retour vers une coalition gouvernementale qui ne peut passer que par le RNI et L'UMP. Justement, les Harakis, déstabilisés par leur exlusion du gouvernement El Fassi, n'en finissent pas de traîner leur mal-vie et leur incapacité à digérer une union imposée sinon fortement suggérée. L'invasion du tracteur C'est dans cette ambiance d'éclatement généralisé qu'est apparu le MTD, comme décrit plus haut, l'éclatement a d'abord des raisons endogènes. La classe politique est victime de l'essoufflement d'une fabrication factice qui a épuisé toutes ses raisons d'être après 10 ans de co-gestion «consensuelle». Si l'alliance, sans bornes, se justifie politiquement pour le cabinet Youssoufi, elle n'a aucun sens aujourd'hui. Or, parce que l'USFP et la gauche n'ont pas dit Basta, l'on se retrouve dans l'incapacité de monter un autre schéma. Ceci est compliqué par la mouvance islamiste qui hypothèque une alliance de droite, pourtant majoritaire dans le pays. La crise est objective, c'est la fin d'une étape historique. Le MTD est apparu dans ces conditions. Les chefs ont adopté une attitude confinant au wait and see, alors que les opposants à l'intérieur des structures partisanes ont saisi l'opportunité pour faire de la surenchère. Les premières à réagir, parfois avec violence, ont été Ramid, Driss Lachgar, Khalifa, les caciques du RNI et Aherdane. Ensuite, ce sont les actions du MTD qui ont élargi ce front du refus. A l'USFP, les tenants d'une révision déchirante de la période du consensus ont trouvé un argument supplémentaire. «Le Palais, après nous avoir vidé, veut créer son propre parti». Derrière cette outrance, se cache une réalité. L'USFP est pris entre le marteau des Islamistes et l'enclume du MTD, il se doit de se redéfinir rapidement. Si plusieurs slogans anti El Himma ont été repris lors du congrès avorté, ce n'est que l'expression de ce malaise. A l'Istiqlal, les réactions sont feutrées, mais l'on sait que la même suspicion existe. Mais c'est chez la droite que le MTD a fait le plus de casse. Au RNI, le clivage anti-Mezouar est en réalité contre le MTD. La dernière décision de ne pas donner suite à la proposition de pôle libéral est dans cette logique. Le RNI, parti de Dar El Makhzen à la base, voit d'un mauvais œil cette stratégie de pression «externe». L'UMP a rejeté l'offre poliment mais fermement, même si certains dirigeants, à l'affût, ne veulent pas écarter une possibilité de retour au navire gouvernemental. L'UC est encore plus mal à l'aise. L'offre de pôle libéral lui sied, car c'est son unique chance de revenir dans le jeu. Mais le débauchage, ou la ruée des siens vers ce nouveau «parti» que tous voient comme porteur d'avenir personnel, l'angoissent. Le MTD agit, non pas comme un élément de réunification mais comme un agent aggravant des divisions. Le processus en cours est porteur de bouleversements importants. L'avenir nous dira lesquels. Erreur fatale El Himma vs Mussolini Plusieurs confrères utilisent le jeu de mot facile «le tracteur trace son sillon», c'est facile mais historiquement injurieux. Mussolini appelait son mouvement «le sillon» qui n'est «ni de gauche, ni de droite mais Italien». Aucun opposant au MTD n'a osé le comparer au fascisme parce que c'est faux et cela serait ordurier. Mais un peu de connaissance des références historiques ne ferait pas de mal dans notre paysage.