Robert Richard, l'émir français, condamné en 2003 à la réclusion criminelle, pour son implication aux attentats du 16 mai de Casablanca, envoie, à travers son avocat français, une missive au Président Français, Nicolas Sarkozy, où il demande de purger sa peine en France. Il pousse même le bouchon un peu loin, en déclarant, qu'il a renoncé au jihad et souhaite rencontrer un prêtre afin de renouer avec ses racines culturelles et religieuses. L'avocat de l'islamiste français, Pierre Robert, alias Abou Abderrahmane, alias Yacoub, condamné à vie par la Cour d'appel de Rabat, pour liens directs avec les attentats du 16 mai 2003 de Casablanca, ne désespère pas pour obtenir l'extradition de son client vers la France (et pourquoi pas son rejugement). Dernière tentative en date de l'avocat parisien, Me Courcelle Labrousse, la lettre qu'il a écrite récemment au Président de la république française, Nicolas Sarkozy, où il lui demande d'intervenir pour permettre à son client de regagner son pays d'origine pour y purger sa peine, comme le lui autorise la convention judiciaire franco-marocaine sur l'extradition des détenus. Arrêté à Tanger et condamné à la réclusion criminelle en 2003 pour «atteinte à la sûreté de l'Etat et appartenance à une bande criminelle terroriste», Pierre Richard Robert avait demandé, en février 2007, aux autorités judicaires marocaines, de bénéficier de la convention de 1981, liant les deux pays et qui permet aux détenus de purger leurs peines dans leur pays d'origine. Une demande restée lettre morte, puisqu'elle n'a jamais abouti. Comme celle d'ailleurs de son transfert à Tanger, où vivent son épouse et ses enfants au lieu de celle de Salé où il passe le plus clair de son temps en cellule individuelle. «Tout en ayant toujours gardé à l'esprit que le Maroc était un Etat souverain, je n'ai rencontré depuis l'origine de cette affaire que frilosité, non-dit et gêne de la part des autorités françaises au sujet de Richard Robert», écrit Me Courcelle-Labrousse à Nicolas Sarkozy. Et d'ajouter dans sa lettre : «Mon client demande simplement que les dispositions résultant d'une convention bilatérale, conclue dans l'intérêt des Français incarcérés à l'étranger, soient mises en œuvre». Avant de conclure : «J'en appelle donc à votre pouvoir pour que, tant notre ministère de la Justice que les autorités du Maroc, lorsque vous ne manquerez pas de vous y rendre, voient leur attention réveillée sur le sort de ce garçon». Seul ressortissant étranger à être condamné au Maroc pour des activités terroristes, Pierre Robert a notamment été reconnu coupable d'avoir participé à l'organisation de camps d'entraînement djihadistes dans le Nord du Maroc, pour lancer une campagne d'attentats visant à déstabiliser le pays pour y instaurer un Etat islamiste. Avant d'y renoncer complètement, comme le rapporte Me Courcelle-Labrousse, dans une déclaration au quotidien le Parisien dans une toute dernière édition : «Mon client est un repenti. Pour témoigner de son erreur, il a décidé de renoncer au jihad pour éviter à d'autres jeunes de répéter le même faux-pas». En plus clair, et selon toujours la même source, Pierre Robert a sollicité un rendez-vous avec un prêtre afin de renouer avec ses racines culturelles et religieuses. Est-ce une autre manoeuvre désespérée pour obtenir son extradition en France ? Personne n'en est sûr. Rappelons que lors de son procès à la Cour d'appel de Rabat, l'émir aux yeux bleus avait déclaré en pleine audience, qu'il a été embauché par la DST française pour le compte de laquelle il aurait infiltré la mouvance islamiste algérienne. Démenti formel Selon ses aveux, qui ont jeté un véritable pavé dans la mare, Pierre Robert aurait été impliqué dans le démantèlement d'un réseau de seize Algériens, Tunisiens et Marocains, opéré conjointement dans cinq pays européens, dont la Belgique et la France, qui menaçaient, à travers des attentats à la bombe, la Coupe du monde 1998 ainsi que la cathédrale de Strasbourg. «J'ai été contacté à l'époque de la Coupe du monde de 1998 par la DST, pour enquêter dans les réseaux islamistes algériens en France et je l'ai fait», a-t-il lâché devant ses juges à Rabat. Et de poursuivre qu'il avait mené une autre enquête en Belgique et que «des sommes d'argent» lui avaient été versées pour ces missions. Bien que le ministère de l'Intérieur français ait immédiatement démenti ces informations, les déclarations de Robert ont fait sensation. Cela n'empêche cependant pas la justice marocaine, de le condamner lourdement. L'accusé ne donnera aucune précision sur les relations qu'il aurait pu conserver avec la police française et sur la durée des «missions» effectuées. Pierre Robert livrera également le nom de son contact, un certain «monsieur Luc», au sein de la DST, qui devait être son officier traitant, en affirmant qu'il avait perçu des «sommes d'argent» pour ses différentes missions d'infiltration dans les milieux islamistes algériens, sans préciser lesquels. À un juge qui lui demandait si ce sont les services français qui l'avaient envoyé au Maroc, Pierre Robert, volontairement énigmatique, s'est contenté de répondre : «Secret défense». Né au Chambon-Feugerolles en 1972, le futur émir se serait converti à l'islam en 1990, à 18 ans, au retour d'un voyage en Turquie, par l'intermédiaire d'une association turque qui opère dans les environs de Saint-Etienne. Selon le chef d'accusation, le ressortissant français avait fait des voyages en Turquie et en Afghanistan, où il avait suivi des entraînements militaires et appris à manipuler les armes et fabriquer des explosifs. En Afghanistan, le suspect s'est même entraîné à des actes de guérilla. Le Français et des membres de son groupe intégriste, auraient recruté des jeunes au Nord du Maroc pour les former à la manipulation des armes et à la fabrication d'explosifs. Trois ans après son arrestation et sa condamnation, le Ben Laden aux yeux bleus reste et restera une énigme pour les deux pays. Son pays d'origine, qui l'aurait sommé d'introduire les réseaux islamistes, et son pays d'accueil dans lequel il voulait exécuter ses projets terroristes.