Ou sont passés les fonds saoudiens ? Les saoudiens, échaudés par les dernières déclarations des politiciens du pays de l'oncle Sam et les informations parues dans la presse américaine, ont rapatrié leurs fonds placés dans les banques américaines vers les institutions bancaires et financières européennes. Fallait-il qu'une partie de ces liquidités aillent dans des banques arabes pour qu'elles servent au développement des investissements interarabes qui n'arrivent toujours pas à décoller à défaut notamment de fonds suffisants. Les différentes initiatives menées ici ou là échouent faute de partenaires et d'investisseurs stratégiques. À combien se chiffre, exactement, la somme des montants des liquidités que les hommes d'affaires et les rentiers saoudiens ont retiré des comptes des établissements bancaires, des banques d'affaires et des institutions financières américaines ? 100, 200, 300 milliards de dollars ? Qu'importent les chiffres ! ils ont vidé, rapporte-t-on dans les colonnes de la presse anglaise, tout ou partie de leurs comptes ouverts auprès des différentes “ majors ” américaines. Ce qui est sûr, c'est que les montants rapatriés vers les institutions bancaires et financières européennes se chiffrent à une centaine de milliards de dollars ! Cette manne d'argent, qui faisait le bonheur des banquiers du pays de l'oncle Sam depuis le premier choc pétrolier, est allée donc renflouer les caisses des établissements financiers, bancaires ou non bancaires, européens. Les rentiers saoudiens, échaudés en effet par les dernières déclarations du président Bush fils et des membres de l'establishment américain ainsi que par les dernières informations parues dans les colonnes de la presse américaine concernant l'intention des familles des victimes du World trade center d'engager un procès contre des hommes d'affaires saoudiens soupçonnés de soutenir les réseaux «benladiens», ont manifesté leur colère contre ces déclarations hâtives par le retrait des fonds bloqués dans les banques américaines. Des hommes politiques américains sont allés jusqu'à préconiser un gel des fonds de quelques richissimes saoudiens. Parmi ceux-ci, il y a des investisseurs qui ont liquidé leurs investissements pour un montant de 200 millions de dollars. À la lumière de ces faits récents, on peut se demander s'il n'est pas judicieux de la part de cette élite saoudienne de virer une partie de ces fonds vers des pays arabes, puisque les dirigeants et les milieux affairistes arabes crient sur tous les toits leur souhait de concrétiser des rapprochements et des alliances économiques et financières horizontales entre les différents états arabes. Les variables qui fondent les décisions de ce jet-set saoudien ne sont pas connues. On ne les saura peut-être jamais. Mais une chose est sûre : des institutions bancaires arabes peuvent répondre efficacement aux attentes de ces investisseurs. Ces dernières n'ont en effet rien à envier aux établissements bancaires américains ou européens dans les domaines de la gestion et des placements des fonds. Le symposium organisé par l'Union des Banques Arabes, en début du mois d'avril dernier à Doha, auquel ont pris part des banquiers, des hommes d'affaires et des spécialistes économiques arabes, a été une réussite totale puisque ses résolutions finales ont dicté une nouvelle voie de coopération entre les états arabes, notamment dans les domaines économique, bancaire et financier. Les congressistes ont fait le point sur les performances des grandes banques arabes qui ont pu hisser le niveau de leurs pratiques au rang des établissements bancaires internationaux. Les différents participants ont préconisé qu'il était temps de tisser des alliances entre les institutions financières pour faciliter le développement d'investissements interarabes dans différents secteurs dont le secteur gazier. Reste que le développement de ces investissements est bloqué par la rareté des fonds, pas par le manque d'initiatives. On le sait, les pays du Golfe disposent de fonds abondants, mais qui étaient placés depuis toujours dans les banques des pays développés, essentiellement les banques américaines. De l'autre côté, les pays comme le Maroc, la Mauritanie, l'Egypte ou encore la Tunisie sont par nature des pays demandeurs de capitaux étrangers. Leurs gouvernements mettent en place des mécanismes d'incitation aux investissements étrangers, multiplient les sorties médiatisées et envoient régulièrement des délégations dans les pays étrangers pour présenter les potentialités que recèlent leurs économies. Dans ce registre, plusieurs traités de coopération et de partenariat ont été signés par différents pays arabes pour accélérer cette dynamique de rapprochements, mais les dispositions préconisées sont restées lettres mortes. Les pays européens eux-mêmes préconisent dans le cadre des accords de partenariat les liant à des partenaires arabes de développer des espaces économiques régionaux pour faciliter leur arrimage à l'Union européenne. Il est peut-être temps pour les dirigeants arabes de multiplier les rencontres pour ouvrir la voie à de nouvelles alliances… économiques.