L'un des pionniers de la résistance et de l'Armée de Libération nationale dans le Rif, Abbas Lemsaâdi, originaire de Ouarzazate, résistant à Casablanca a installé son quartier général dans le Rif et se proposait de poursuivre la lutte dans le nord et l'oriental jusqu'à l'indépendance totale de l'ensemble des pays du Grand Maghreb. Assassiné en juillet 1956, sa mort commanditée à partir de la direction de l'Istiqlal à Rabat coiffée par un certain Mehdi Benbarka, est le premier grand acte de règlement de compte et d'assassinat politique au Maroc. Portrait d'un révolutionnaire sacrifié. De son vrai nom Mohamed Ben Abdallah Lemsaâdi, il était plutôt connu par son nom de guerre : Abbas Lemsaâdi, l'homme qui sera plus tard, le chef incontesté de la résistance et de l'Armée de Libération dans le nord du Maroc, en particulier dans la zone du Rif et l'oriental. Il était pourtant originaire de la région de Ouarzazate et faisait partie des quatre leaders de la direction de ce mouvement, dont le but était encore plus vaste puisqu'il s'agissait à l'époque de la libération de l'ensemble du Grand Maghreb arabe. Compagnon de Boudiaf et Larbi Ben Mhidi Un poste de commandement au sein duquel siégeaient deux marocains : Abdallah Senhadji et Abbas Lemsaâdi aux cotés de leurs compagnons algériens Mohamed Boudiaf et Larbi Ben M'hidi. Mais, c'est à Casablanca, qu'Abbas Lemsaâdi fera ses toutes premières armes sous la direction des compagnons de feu Mohamed Zerktouni. Il était aussi parmi les militants les plus actifs du parti de l'Istiqlal au niveau de Casablanca. Arrêté par les forces d'occupation française en 1952 dans la vague de répression et d'arrestations ayant suivi les manifestations ouvrières déclenchées à la suite de l'assassinat du leader syndicaliste tunisien Ferhat Hachad, il rejoindra le nord du Maroc, juste après l'annonce de la mort de Feu Mohamed Zerktouni. Dès son installation dans le Rif, il se consacra totalement à la lutte armée contre le double colonialisme, espagnol dans le nord et dans le Rif et français dans l'oriental, pour mieux appuyer la lutte pour l' indépendance, qu'engageait déjà le peuple algérien de l'autre coté de la frontière. La sincérité qui coûte trop chère Abbas Lemsaâdi était d'abord connu en tant que militant sincère et tout à fait désintéressé, un révolutionnaire exigeant avec lui même et intraitable avec les autres. Sérieux dans son action et dans ses relations humaines. Beaucoup de ceux qui l'ont connu de près, affirment encore aujourd'hui, que son caractère hyper sérieux et sa droiture à toute épreuve, étaient peut-être à l'origine de tous les malheurs et des épreuves qu'il a endurés, notamment avec certains de ses compagnons d'armes. Tous ses proches précisent également que Abbas Lemsaâdi était un chef totalement autonome, indépendant dans sa façon d'agir, d'exprimer son point de vue et d'expliquer ses attitudes. Il avait à ce titre eu des contacts réguliers avec Mehdi Benbarka à Rabat, loirsque celui-ci, assumait la responsabilité au plus haut niveau, au sein de la direction du parti de l'Istiqlal. Il avait surtout sollicité le soutien de la direction du parti, pour lui apporter les armes et la logistique nécessaire, susceptibles de lui permettre de poursuivre sa guerre sainte jusqu‘à la libération de tout le Maghreb Arabe . La rupture avec Benbarka Face aux hésitations et aux atermoiements d'un Mehdi Benbarka, beaucoup plus préoccupé par les retombées politiques de la poursuite de la résistance dans le nord, Abbas Lemsaâdi finira par se révolter, alors que Benbarka excédé par son refus de respecter la discipline du parti, finira lui aussi par lâcher : «Vous êtes des révolutionnaires, nous sommes des politiciens. Chacun a ses raisons que la raison n'a pas». A partir de ce différend, le fossé ne cessera de se creuser entre les deux hommes. Abbas Lemsaâdi choisira alors de faire cavalier seul, de s'éloigner définitivement de tout ce qui est action partisane et des hommes politiques dans leur ensemble. Il se définissait dès lors, comme un authentique guérillero au service de la libération de l'ensemble des pays du Maghreb. Il continuait alors à recruter des volontaires au service de sa cause, à travers les montagnes du Rif et de tout l'Atlas marocain. C'est principalement pour cette raison, que de nombreux résistants et militants marocains de l'époques, n'étaient pas surpris d'apprendre, au soir du 8 Juillet 1956, quelques mois à peine après la proclamation de l'indépendance marocaine, que Abbas Lemsaâdi a été assassiné et que l'auteur s'appelait tout simplement feu Karim Hajjaj, qui fut entre autre un militant de l'UMT, président de la section Football du Raja et avant tout, un résistant notoire de Casablanca. Tout le monde savait qu'il agissait pour le compte de l'Istiqlal et de sa branche armée, dirigée par Fquih Mohamed Basri et Mohamed Bensaid Ait Idder, les deux principaux hommes de mains de Benbarka. Le premier règlement de compte Quelles que soient les raisons mystérieuses de cet assassinat, que son auteur Karim Hajjaj avouera devant feu le roi Hassan II, il n'en reste pas moins qu'il s'agissait ce jour-là, du tout premier grand assassinat politique dans l'histoire du Maroc indépendant. Karim Hajjaj ne sera pas pour autant poursuivi et jugé, au même titre que ses commanditaires. Tout le monde semblait considérer cette mort comme une résultante normale. Un simple règlement de compte entre compagnons de lutte. Juste après l'assassinat de Abbas, l'Armée de libération sera tout simplement démantelée. Ses principaux chefs vont, pour la plupart, rejoindre les rangs des Forces Armées Royales, alors que les amis fidèles de Lemsaâdi n'avaient d'autres choix que d'observer le silence. Le silence que docteur Abdelkrim El Khatib, Mahjoubi Aherdane, Abdallah Senhdji, Houcine Berrada, El Ghali Laraki, Said Boinailat, Mehdi Benaboud et autre Hassan Laârej, ses co- légionnaires du mouvement de résistance n'ont pu briser, malgré toutes les actions entreprises pour transférer le corps de Abbas Lemsaâdi de la ville de Fès vers la région du Rif. Abbas Lemsaâdi restera dans le cœur de ses compagnons et de ses disciples, comme un authentique leader, un chef guerrier et un militant convaincu en l'union inéluctable des peuples du grand Maghreb. Prochain article : Cheikh Abou Chouaib Doukkali Combattre le charlatanisme par la religion