Avec l'appui actif de l'ambassade de France à Rabat, l'ENA française poursuit ses missions de soutien, d'expertise et d'accompagnement des institutions marocaines vouées à la formation des hauts potentiels de l'administration publique. Au partenariat déjà en vigueur liant l'institution produisant les «énarques» à l'ENAP et l'ISA dans le Royaume, est venue s'ajouter, depuis le 8 juin, une nouvelle convention entérinée avec l'Ecole de perfectionnement des cadres de Kénitra du ministère de l'Intérieur. Dévoilant un risque éventuel de reconduire, par ces conventions, le modèle français en en copiant les procédures et les cursus académiques d'éclosion des élites, la réaction d'Antoine Durrleman fut très vive en tranchant dans le vif : «Au contraire, il n'y a pas du tout du copier-coller mais un véritable partage d'expériences». Et à l'interrogation sur la crédibilité de ce partenariat accompagnant la modernisation des secteurs publics au Maroc, le Directeur de l'ENA fut, encore une fois, très prompt à la réplique : «J'ai senti une très forte volonté politique de modernisation de l'administration publique marocaine à travers le levier essentiel de la formation des cadres. Ce qui m'a le plus frappé, c'est cette vision stratégique de développement des ressources humaines en cours de réforme dans l'espace de la Fonction publique dans le Royaume». Non sans mettre en garde que «ces efforts ne pourraient produire leurs pleins effets que si les compétences sont mobilisées, car les standards d'efficacité dans l'administration, à l'instar des entreprises, exigent des professionnels et des potentiels». La formation «énarque» contre la crise de gouvernance Il est vrai que le débat en cours d'auditeurs, de partenaires internationaux dans les milieux bancaires et patronaux, à la BM et au FMI ainsi que dans les universités et même au gouvernement épingle une «crise de gouvernance» au Maroc. A telle enseigne que le mal diagnostiqué s'adosserait à des facteurs explicatifs liés à un déficit de formation managériale ou de culture persistante de résistance au changement. A cette carence, Durrleman a tenté une réponse circonstanciée en rappelant que «la formation est un outil essentiel au service d'une volonté politique. La crise de gouvernance se résout par des actions multiples qui ne sont pas directement liées à un déficit de formation. Mais quels que soient les facteurs entraînant la crise gouvernance, leur dépassement appelle à des formations appropriées. C'est pourquoi la formation est le seul outil de sortie véritable de crise ». Illustrant ses propos par la réussite des entreprises aiguillonnées, il est vrai, sous la contrainte de la concurrence et de la compétitivité économique libérale. Mais il était important d'apprendre que des hauts fonctionnaires marocains bénéficient de cycles longs ou courts de formation à l'ENA qui a transféré ses scolarités du quartier des ministères de Paris (où l'on avait tendance à voir la France d'en haut) à Strasbourg où la tendance est renversée en tâchant de regarder la France de plus près. Ces hauts fonctionnaires sont mis au goût des enseignements culturels et managériaux propices à la gestion efficace d'une administration moderne au service de la collectivité nationale. Antoine Durrleman a salué les initiatives marquantes de Chakib Benmoussa et Mohamed Boussaïd, respectivement ministres de l'Intérieur et de la Modernisation des secteurs publics, qui sont les maîtres d'œuvre de cette quête de maîtrise d'œuvre en engageant des nouvelles formations territoriales impactant la dynamique en cours de décentralisation et de déconcentration. Les deux ministres en vogue du gouvernement Jettou ont souligné fort, a expliqué le Directeur de l'ENA, la forte demande du Royaume en expertise de très haut niveau à travers la formation des cadres comme levier essentiel de changement des procédés et de la culture dans l'administration publique.