L'affaire de l'augmentation des frais d'inscription Campus France pour les étudiants extra-européens refait surface. Deux professeurs de l'université de Lorraine ont révélé la manipulation des chiffres de Campus France, par le ministère français de l'Enseignement supérieur, dans le but de montrer que la hausse des frais d'inscription «ne fait pas fuir les étudiants extra-communautaires ». Les étudiants marocains sont concernés. Les détails. Le site français d'investigation « Mediapart » rapporte que Thomas Stoll et Gérald Tenenbaum, professeurs de Mathématique à l'Institut Elie Cartan de Lorraine à Nancy, ont dévoilé des informations selon lesquelles « le ministère français de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation aurait changé les règles de décompte de candidatures étrangères pour pouvoir multiplier artificiellement leur nombre ». Selon eux, souligne Mediapart, l'objectif est de «prouver une stabilité dans le nombre de candidatures au niveau local de chaque Université, pour montrer que la hausse des frais d'inscriptions ne fait pas fuir les étudiants extra-communautaires». Dans un courrier envoyé à des enseignants-chercheurs de l'Université de Lorraine, les deux professeurs expliquent le mode opératoire de cette manipulation : « Jusqu'au 31 mars 2019, les étudiants étrangers postulant à une première année universitaire remplissaient leurs demandes selon la procédure « Etudes en France », plateforme du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, en effectuant trois vœux classés pour leur établissement d'accueil (l'instruction des dossiers étant assurée par Campus France lorsqu'il s'agit de l'un des 43 pays relevant de la procédure) », rapporte Mediapart. « Les réponses étaient déployées en trois vagues. À chaque étape, une seule université était amenée à répondre au candidat : celle qui correspondait au premier vœu dans la première phase, au second (lorsque le premier avait reçu un avis défavorable) dans la deuxième phase, et au troisième (les deux premiers ayant reçu un avis défavorable) dans la troisième phase. Ainsi, à chaque étape, les demandes reçues par chaque université correspondaient à des sollicitations réelles, pouvant conduire à une inscription effective en cas d'acceptation », ajoutent-ils dans leur courrier. Les professeurs soulignent également dans leur courrier que « depuis le 1er avril 2019, une simultanéité du traitement des vœux a été mise en place. L'examen des trois vœux se fait en parallèle par les trois établissements, sans transmission du dossier de candidature d'un établissement à un autre. Cela a évidemment pour conséquence de multiplier par 3 le nombre des demandes initiales et incidemment de surcharger les commissions d'admission, qui seront tenues de statuer sur des demandes virtuelles. En conséquence, le ministère peut ainsi, au mépris le plus complet de toute honnêteté intellectuelle, afficher une statistique nationale en hausse et justifier de facto sa politique d'augmentation des frais de scolarité ». Pour mieux saisir la manipulation dont parlent les deux professeurs, il faut savoir qu'auparavant, un étudiant, accepté à son premier vœu, était compté une fois, car seule la première université traitait son dossier. La même règle s'appliquait pour l'étudiant étant refusé à son premier vœu et accepté à son vœu 2, il était compté deux fois, car deux universités distinctes traitaient ses vœux. Même cas pour l'étudiant ayant été refusé ses vœux 1 et 2, il était donc comptabilisé 3 fois. Mais ce que les professeurs souhaitent avertir, et que dans tous les cas, et avec le futur décret « Bienvenu en France », l'étudiant est compté trois fois, ce qui par conséquent, souligne Mediapart, permet d'augmenter artificiellement le nombre de dossiers à traiter et donc le nombre de candidatures enregistrées au niveau local. Les étudiants marocains étant concernés par cette augmentation des frais d'inscription Campus France, Hespress Fr avait dans ce sens contacté la Directrice de l'Institut français au Maroc, Clélia Chevrier Kolačko, pour savoir incidemment si une baisse des candidatures des étudiants marocains a été observée pour l'année 2019. Sachant que les étudiants marocains sont classés parmi les premiers étudiants étrangers en France. La DG a estimé que « c'est normal », relevant que « le gouvernement français s'attend bien sûr à une baisse du nombre de candidats». Elle a également expliqué que «les réformes génèrent toujours des périodes de rééquilibrage. Seules les inscriptions en 1ère année de licence sont actuellement enregistrées, et les chiffres sont encore provisoires. Ces inscriptions ne constituent en outre qu'une partie du flux de candidats marocains vers la France. Les chiffres les plus pertinents pour analyser l'impact de la réforme seront obtenus en fin de processus, sur le nombre d'étudiants effectivement sélectionnés par les universités et ayant rejoint leur faculté à la rentrée universitaire». Rappelons que le gouvernement d'Edouard Philippe, qui a subi une révolte du monde universitaire suite à sa décision d'augmenter les frais d'inscription Campus France pour les étudiants extra-européens, avait annoncé en novembre 2018 via un communiqué de presse, la hausse des frais de scolarité, passant de 170 euros à 2770 euros en licence, et de 243 et 380 euros en master et doctorat à 3770 euros. Une décision qui n'a pas été du goût des nombreux marocains souhaitant poursuivre leurs études en France.