Le sud de l'Ukraine est en train de devenir un point majeur de la guerre, entrée cette semaine dans son sixième mois, au lendemain de bombardements sur le port d'Odessa et alors que Kiev affirme vouloir libérer la région de Kherson. Celle-ci « sera définitivement libérée d'ici septembre et (...) tous les plans des occupants échoueront », a déclaré dimanche le conseiller du chef de l'administration militaire régionale de Kherson fidèle à Kiev, Sergiy Khlan. « Nous pouvons parler de retournement de situation », a-il assuré. « Nous passons d'une phase défensive à une contre-offensive ». Selon lui, les frappes ukrainiennes visant deux ponts stratégiques, ainsi que celles sur des dépôts de munitions et des postes de commandement ennemis, ont préparé une offensive terrestre en cours. Les Russes avaient pris le contrôle de Kherson dès le 3 mars. Phillips O'Brien, professeur d'études stratégiques à l'université britannique de Saint-Andrews, relève que l'intensité des combats a diminué. « A moins que les Russes soient subtils et reconstituent lentement et silencieusement leurs stocks de munitions pour une grande offensive, ils souffrent », estime-t-il. Des responsables américains ont cette semaine souligné l'avantage que constituent selon eux les nouveaux systèmes d'artillerie de précision Himars, des lance-roquettes multiples montés sur blindés légers avec une portée de 80 kilomètres. Des données diffusées par la NASA montrent un volume moins important de frappes russes sur le front, suggérant là aussi l'impact des Himars. Mais l'analyse est difficile à confirmer de façon définitive et indépendante. Cap au sud « Mykolaïv a de nouveau été bombardée » dimanche au lendemain d'une frappe qui a fait cinq blessés, selon la présidence ukrainienne. « Les habitants de presque tous les districts de la région (...) signalent de nombreux bombardements et explosions ». Selon Sergiy Khlan, les frappes ukrainiennes visant deux ponts stratégiques, des dépôts de munitions et des postes de commandement russes ont servi à préparer le terrain à l'offensive terrestre en cours. Phillips O'Brien assure que Kiev a attiré sciemment les soldats ennemis dans le sud. « La stratégie pourrait être de les saigner dans le Donbass, les saigner à Kherson, les vaincre à Kherson ». « Les forces ukrainiennes préparent probablement une offensive ou l'ont déjà lancée dans la région de Kherson », affirme l'Institut américain pour l'étude de la guerre (ISW), qui admet des informations parcellaires et note que les civils ukrainiens ont été priés de ne pas communiquer sur le sujet. L'institut fait valoir que la zone entre le front et Kherson est rurale et parcourue de villages, rendant plus opaques les évolutions militaires. Quant aux frappes sur Odessa, Moscou a assuré qu'elles avaient détruit la veille dans le port un navire militaire ukrainien et des missiles antinavires Harpoon livrés par les Etats-Unis. « Une usine de réparation et de modernisation de navires de l'armée ukrainienne a aussi été mise hors d'usage », selon Moscou. L'Ukraine a accusé le président russe Vladimir Poutine d'avoir « craché au visage » de l'ONU et de la Turquie et de compromettre l'application de l'accord signé vendredi à Istanbul sur la reprise des exportations des céréales bloquées par le conflit. Nord-Est et Est La présidence ukrainienne a fait état de bombardements dans la région de Kharkiv, deuxième ville du pays, où « plusieurs bâtiments résidentiels ont été endommagés et des bâtiments résidentiels incendiés ». L'ISW évoque de son côté un « assaut terrestre limité au nord-ouest de Sloviansk », des bombardements au sud-est et sud-ouest d'Izioum et des frappes sur Dibrovne, Krasnopillya et Mazanivka, le long de la frontière entre les régions de Kharkiv et de Donetsk. L'état-major ukrainien laisse entendre que les forces russes pourraient aussi « se rapprocher des alentours de Siversk depuis ses positions à l'est ». Les frappes se poursuivent au nord, sud et est de la ville. Des combats sont aussi enregistrés autour de Bakhmout, assurent l'institut comme le ministère britannique de la Défense.