Le journaliste condamné à trois ans de prison et récemment nommé au Prix RSF 2018 pour la liberté de la presse, Hamid El Mahdaoui, a dénombré « cinq graves erreurs » dans son jugement délibéré par la Chambre criminelle de première instance à la cour d'appel de Casablanca. Un document détaillant des phases clés de son procès, a été envoyé comme requête au Cabinet royal. Reporters sans frontières a dévoilé les noms des nominés de son Prix pour la liberté de la presse pour cette année. Journaliste marocain condamné le 29 juin dernier à 3 ans de prison suite à un appel téléphonique, Hamid El Mahdaoui fait partie des 12 figures médiatiques mondiales reconnues par l'ONG comme ayant « fait preuve de courage dans l'exercice, la défense ou la promotion du journalisme, dans un environnement hostile et en dépit du danger pour sa liberté ou sa sécurité ». Deux jours plutôt, le directeur du site Badil.info, jugé en même temps que les leaders du Hirak du Rif et incarcéré avec eux dans le pénitencier d'Oukacha a fait savoir, par le biais de son épouse Bouchra El Khounchafi, qu'il a adressé une requête au cabinet royal. Dans le document dont, Bouchra El Khounchafi a partagé le contenu sur son compte Facebook, El Mahdaoui déclare avoir « été soumis à des injustices par l'instance de juridiction qui a examiné son dossier en première instance », allusion faite à la Chambre criminelle de première instance à la cour d'appel de Aïn Sbaâ à Casablanca. En premier lieu, le journaliste qui a écopé de trois an de prison estime que son « verdict comprenait de graves erreurs mettant le tribunal sous la coupe de l'Article 97 du Statut des juges. Ce dernier détaille les cas où un magistrat peut être immédiatement suspendu de ses fonctions s'il a commis une faute grave. Le journaliste déclare que la juridiction a pris sa décision en évoquant le cas d'une personne « fantôme » présentée comme étant « connue pour ses tendances séparatistes », et qui l' « avait contacté par téléphone ». El Mahdaoui considère en conséquence que ce qui est juridiquement et légalement admis et confirmé par la jurisprudence est que le juge pénal ne peut justifier sa décision par le terme « connu » mais par des descriptifs plus précis, cités comme pièces à conviction dans le dossier d'instruction. Deuxièmement, le journaliste rappelle que durant son procès, le tribunal a accepté par décision du juge d'écouter des enregistrements qui appuient sa défense. « J'ai été sidéré de savoir que le juge a programmé ma demande dans la délibération, avant de la refuser. C'est à ce moment que ma défense a demandé la lecture du procès-verbal pour vérifier cette décision mais le juge a refusé, en contradiction avec les dispositions de l'Article 305 du Code pénal » raconte-t-il. Recevant plus tard une copie de son jugement, El Mahdaoui assure qu' « il ne reste aucune trace de sa demande dans le PV de l'audience du 12 février 2018 qui mentionne tout de même que le tribunal a accepté l'écoute des enregistrements » La « troisième erreur », selon l'intéressé est que « le tribunal a affirmé, à tort, dans la copie du jugement qu'il n'avait pas contesté le contenu des enregistrements » et que « les procès-verbaux des audiences et le compte rendu détaillé de l'interrogatoire l'avaient prouvé ». La « quatrième et plus grave de toutes les erreurs », d'après le journaliste, serait « une preuve tangible de la continuelle infiltration du parquet ». « Le Procureur général a modifié certains faits du dossier en prétendant que j'ai effectué un appel téléphonique durant la nuit alors qu'en vérité, l'appel a eu lieu le jour », fustige l'auteur de la requête. Ensuite, El Mahdaoui détaille longuement sa version des faits, quant aux circonstances de cet appel téléphonique retenu contre lui. Dans cette communication avec un Marocain résident aux Pays-Bas, « l'introduction d'armes et de chars au Maroc » aurait été évoquée selon le ministère public, d'où son accusation pour « non-dénonciation d'un crime portant atteinte à la sûreté de l'Etat ». Le directeur du site Badil.info considère que la « cinquième erreur » de son procès réside dans le fait que « le tribunal a catégoriquement ignoré les plaidoyers et mémorandums des avocats », mais aussi mes siens. Pour lui, « le tribunal s'est contenté de l'unique version du Procureur général (...) et a relégué le rôle du législateur dans la formulation des plans et des actions énoncés au chapitre 209 du Code pénal » El Mahdaoui rappelle également dans sa lettre envoyée au cabinet royal que la décision du tribunal d'inclure son dossier dans celui des leaders du Hirak a été rendue conformément à la loi, « mais lorsque le tribunal a décidé de séparer le dossier, il n'a inclus dans la copie du jugement aucune phrase justifiant la séparation ».