Au lendemain de la prise du pouvoir par les talibans en Afghanistan, et les critiques qui s ont abattues sur le président américain Joe Biden qui a retiré les troupes américaines et celles de l'Otan après 20 ans de déploiement, les talibans ont cherché à rassurer les Occidentaux, notamment sur le droit des femmes et des filles qui inquiète la communauté internationale. Ayant repris le pouvoir de force dans le pays 20 ans après en avoir été chassé par les Américains, les talibans comptent bien le garder cette fois-ci, et trouver une légitimité internationale en tenant un discours moins extrémiste, qui cherche à rassurer la communauté internationale sur le sort des femmes et des filles dont l'avenir reste incertain. Le filles et les femmes au cœur des préoccupations Alors que la veille le président français Emmanuel Macron a alerté sur le sort des femmes dans le pays, le président américain Joe Biden a également montré une position similaire. « Les femmes afghanes ont le droit de vivre dans la liberté et la dignité », a affirmé lundi Emmanuel Macron, tandis que Joe Bien a promis que les Etats-Unis s'engageront pour « les femmes et les jeunes filles ». Une semaine avant, c'était le chef de l'ONU, qui s'était montré inquiet sur le sort des filles et des femmes en Afghanistan sous la domination des talibans. Antonio Guterres avait jugé « particulièrement horrifiant et déchirant de voir que les droits durement acquis par les filles et les femmes afghanes sont en train de leur être enlevés », dans les zones sous contrôle taliban. Car, lorsqu'ils étaient au pouvoir entre 1996 et 2001 (après avoir renversé un gouvernement élu, ndlr), les filles devaient quitter l'école à 8 ans, les femmes étaient obligées de porter le voile intégral, ne pouvaient pas travailler et étaient interdites de sortie de chez elles sans un accompagnant masculin de sa famille, et les mariages forcés étaient une pratique courante. Mardi, les nouveaux chefs de file des talibans ont tenté de montrer une image différente de celle d'il y a deux décennies. Les talibans sont « attachés aux droits des femmes dans le cadre des règles islamiques », a indiqué, mardi, un porte-parole des talibans. Le port de la burqa, le voile intégral, ne sera pas obligatoire pour les femmes car « 'il existe différents types de voile », a-t-il déclaré, affirmant que « La burqa n'est pas le seul hijab (voile) qui peut être porté, il existe différents types de hijab qui ne se limitent pas à la burqa », sans toutefois préciser quel sera le type de voile obligatoire pour les femmes afghanes, qui est en soi, une violation de leurs libertés. Concernant le droit des filles à l'éducation, « elles peuvent recevoir une éducation du primaire à l'université. Nous avons annoncé cette politique lors de conférences internationales, à la conférence de Moscou et ici à la conférence de Doha (sur l'Afghanistan) », a-t-il expliqué. « La guerre est terminée et tout le monde est pardonné », a déclaré le porte-parole Zabihullah Mujahid. « Tous ceux qui sont dans le camp opposé sont pardonnés de A à Z », a-t-il assuré, en affirmant qu'ils ne se vengeront pas. « Nous nous engageons à laisser les femmes travailler dans le respect des principes de l'islam », a-t-il ajouté. Pourtant, selon les témoignages, les femmes journalistes dans les villes sous contrôle des talibans ont dû fuir et ne peuvent plus signer leurs papiers, les jeunes étudiantes et les femmes professeurs dans les universités ont été interdites d'entrée, et des femmes travaillant dans le secteur bancaires été forcées de quitter les lieux et d'appeler un homme de leur famille pour prendre leur place. Le sort des femmes juges, dont le nombre est estimé à 250 dans tout le pays, soit 10% des membres du système judiciaire, sont dans le viseur des talibans. Ces femmes là assurent que les talibans ont leur dossier et les connaissent une par une. Les Occidentaux vont-ils reconnaitre un gouvernement taliban? Chez les Occidentaux, l'heure est à déterminer s'il y aura un dialogue avec les talibans ou non. Pour le Canada, l'affaire est déjà réglée, le Premier ministre canadien Justin Trudeau a tranché le Canada « n'a pas l'intention de reconnaître un gouvernement taliban », a-t-il déclaré mardi. « Lorsqu'ils étaient au pouvoir il y a 20 ans, le Canada ne reconnaissait pas leur gouvernement. Ils ont renversé par la force et remplacé un gouvernement dûment élu, et forment un groupe terroriste d'après la loi canadienne », a-t-il expliqué lors un point presse en Ontario. Le département d'Etat américain a, de son côté, indiqué mardi soir, que Washington va maintenir des opérations diplomatiques en Afghanistan après le 31 août, si la situation est « sûre » et espère que les talibans vont tenir leurs promesses sur les droits humains. Quant aux Européens, leur décision ne peut pas se faire unilatéralement, tous les membres de l'Union européenne doivent suivre la même décision. Ainsi, c'est le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell à qui est revenu la lourde de tâche de s'exprimer au nom des autres pays. Ce dernier est resté vague dans sa réponse qui présage une reconnaissance. « Les talibans ont gagné la guerre. Donc, nous devrons parler avec eux, afin d'engager un dialogue aussi vite que nécessaire pour éviter une catastrophe humanitaire et potentiellement migratoire » en Afghanistan, a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse. « Ce dialogue devra aussi se concentrer sur les moyens d'empêcher le retour d'une présence terroriste étrangère en Afghanistan », a-t-il ajouté en affirmant que ce toutefois « il ne s'agit pas de reconnaissance officielle, il s'agit d'être en contact. Si je veux que 400 personnes, des Afghans qui travaillaient pour l'UE et leurs familles, puissent rejoindre l'aéroport (pour être évacués), alors je dois parler aux autorités des talibans », a-t-il affirmé. M. Borrell s'exprimait devant la presse à l'issue d'une réunion en visioconférence des ministres européens des Affaires étrangères, à l'heure plusieurs Etats membres de l'UE renforcent leurs efforts pour accélérer l'évacuation de ressortissants occidentaux et de personnels afghans depuis l'aéroport Kaboul. « Il ne s'agit pas de reconnaissance officielle (des talibans), il s'agit d'être en contact. Si je veux que 400 personnes, des Afghans qui travaillaient pour l'UE et leurs familles, puissent rejoindre l'aéroport (pour être évacués), alors je dois parler aux autorités des talibans », a plaidé le responsable.