La Wilaya de Tizi Ouzou dans la région de la Grande Kabylie est frappée par des incendies monstres depuis lundi. Plusieurs feux se sont déclenchés subitement au même moment dans cette région montagneuse. Sur internet, les Algériens dénoncent une nouvelle forme de dérive du pouvoir. Les dirigeants algériens ont-ils volontairement mis le feu à la Kabylie pour nourrir leur discours complotiste ? Des feux d'une ampleur inquiétante se sont emparés de cette région Kabyle, connue pour avoir été l'un des chefs-lieux du Hirak. Selon les témoignages sur place, une centaine de feux se sont déclenchés au même moment dans les forêts de la Wilaya, si bien que plusieurs internautes se sont posé des questions. En effet, les Kabyles de Tizi Ouzou restaient les seuls à désobéir aux interdictions de manifestation imposées par le régime pour faire taire la contestation du Hirak. Ni les arrestations arbitraires, ni les violences policières, ni les intimidations subies n'auront arrêté les habitants de cette région dans leurs revendications de démocratie et de critique du pouvoir militaire. La Kabylie, région rebelle Cette région rebelle d'où sont issus les indépendantistes kabyles est la seule échappant au pouvoir algérien, il s'agit de la seule région ayant boycotté les élections à chaque fois qu'elles ont été organisées, les bureaux de vote ont été fermés et la journée s'est transformée en manifestation. Ces derniers mois, face à la résistance rencontrée spécialement à Tizi Ouzou, le pouvoir algérien, a multiplié les actions visant à arrêter toute revendication ou manifestation anti-régime. En amont de l'organisation des élections législatives anticipées, provoquées sans raison apparente par le président algérien Abdelmadjid Tebboune (et qui ont été remportées par son parti par la suite), le président a classé deux mouvements basés à l'étranger puisqu'ils n'ont pas eu d'accréditation en Algérie, comme organisations terroristes. Il s'agit principalement du MAK, le Mouvement pour l'autonomie de la Kabylie, basé en France. Avant de le classer comme organisation terroriste, le pouvoir a accusé des membres de ce mouvement d'avoir eu des projets terroristes, ce que le MAK, qui demeure un mouvement politique non armé, a fermement démenti. Outre cette mesure, le pouvoir algérien s'est empressé de conclure un accord d'extradition avec la France et de modifier les textes de loi, afin de permettre de classer plus facilement toute personne critique du pouvoir comme un terroriste menaçant la « stabilité de l'Etat » et faire en sorte de l'extrader en Algérie. La colère contre le président Tebboune Alors que les forêts de cette région brûlaient sous les flammes, les internautes ont vivement réagi face à la non-réaction des autorités, alors que des hélicoptères et des avions chargés d'eau pour éteindre les flammes étaient nécessaires. Au lendemain du déclenchement de ces feux qui ont emporté avec eux des maisons de villageois, des pertes humaines ont été déplorées faisant au moins 10 morts selon les bilans selon les médias algériens, et plusieurs familles déplacées pour fuir les flammes. Selon les mêmes sources, il s'agit de plus d'une vingtaine de communes de la Wilaya de Tizi Ouzou, qui ont été touchées par ces feux simultanément, sous une chaleur de plomb, plus de 45 degrés. Sur les réseaux sociaux, les appels à l'aide se sont multipliés. Les images de montagnes embrasées ont fait le tour du monde, et les commentaires en veulent surtout aux dirigeants du pays. « Le peuple doit se rebeller, la Issaba a commencé à mettre le feu à la région des Kbayl pour en déloger ses habitants », a lancé un internaute sur Youtube. « Qui a mis le feu en Kabylie », s'est demandé une internaute affirmant que ce n'est pas une coïncidence, tandis qu'un autre énumérait les malheurs vécus par les Algériens ces derniers mois. « Il n'y a plus d'enfer que de vivre en Algérie, feux de forêts, covid fait ravage, manque d'oxygène, pénurie d'eau… », s'est plaint un autre internaute. Où sont passés les budgets La colère s'est également emparée des Algériens et visait surtout le président Tebboune qui n'a manifesté aucune forme de compassion lors de récente sortie médiatique. « Pauvre peuple algérien, c'est quasiment mieux d'avoir un président en chaise roulante qu'un président aussi malhonnête que Tebboune », a réagi un internaute face à la récente sortie médiatique du président algérien et ses informations approximatives et incorrectes sur l'état des lieux de la crise sanitaire en Algérie. Plusieurs personnes ont en outre critiqué ce même président qui n'a pas daigné, selon eux, présenter ses condoléances aux familles des victimes du manque d'oxygène dans le pays et des victimes des incendies. « Ni condoléances, ni compassion, quelle déception », a écrit un internaute, et un autre d'ajouter que des personnes sous concentrateur d'oxygène à domiciles sont mortes à cause des coupures d'électricité. Et concernant les feux de forêts, plusieurs voix se sont élevées pour demander où sont passés les budgets militaires et pourquoi cette institution militaire n'a pas combattu les feux en laissant les citoyens se battre seuls contre les flammes. Les Algériens ont dénoncé l'absence d'hélicoptères et de canadairs pour éteindre les feux. D'autres voix qui ont appelé à l'aide internationale d'urgence ont regretté que le président Abdelmadjid Tebboune a encore une fois rejeté la main tendue du Roi Mohammed VI, et qu'il refuse l'aide de Maroc qui dispose de 15 canadairs qui ont pu aider déjà l'Espagne et le Portugal dans leur combat contre les flammes. La théorie du complot, nouvel acte Face à la montée de la grogne sociale liée à ce énième triste événement qui détruit un peu plus le moral des Algériens, le président algérien a fait envoyer les ministres de l'Intérieur, de l'Agriculture et de la Solidarité nationale sur les lieux pour apporter, selon les médias locaux, un soutien moral aux habitants touchés par les incendies. Cette visite a été l'occasion de faire encore une fois de la propagande militaire sur place, en dédouanant le gouvernement de toute responsabilité dans ces événements. « Seules des mains criminelles peuvent être à l'origine du déclenchement simultané d'une cinquantaine d'incendies à travers plusieurs localités de la wilaya », a déclaré le ministre algérien de l'Intérieur. « Des mains criminelles nourries de haine contre notre pays et voulant nuire à l'Algérie sont derrière les incendies », a-t-il affirmé dans une déclaration à la presse relayée par l'agence officielle algérienne APS. « Samedi prochain, une délégation de 130 à 140 experts se rendra à Tizi-Ouzou afin d'évaluer sur le terrain, dans les communes touchées par les incendies, l'ampleur exacte des dégâts et des pertes », a-t-il ajouté sans dire comment son gouvernement compte maitriser les feux. « Depuis l'indépendance, nos dirigeants ont appris le même discours, les mains étrangères, à tous les niveaux », a réagi une internaute après cette déclaration tandis que d'autres commentaires affirment que le pouvoir cherche à faire tomber le pays dans une nouvelle décennie noire pour éliminer le peuple kabyle. « Je me demande à qui profite ce crime? les islamistes? je ne pense pas. C'est l'Etat algérien c'est certain par sa négligence », a ajouté un autre dans un commentaire. « Tebboune a laissé les Algériens mourir par manque d'oxygène. Il laisse les incendies sans venir au secours de la population, ans compter les pénuries d'eau. Il doit démissionner. Tebboune est dangereux, et il ne veut pas demander de l'aide », s'est lamentée une internaute. « Ce qui est bizarre, c'est que des hélicoptères et avions ont survolé la Kabylie la veille et le lendemain des incendies éclatent au même moment d'une manière synchronisée, et l'aide de l'Etat algérien est évidemment absente! » s'est enfin demandé un internaute avec le drapeau de la Kabylie flanqué sur sa photo de profil.