Après avoir repris le pouvoir exécutif en main, le chef d'Etat tunisien, Kais Saied, est attendu pour sa prochaine action. Euphorique après les récentes mesures prises par le président, le peuple reste dans l'attente de voir l'évolution de la situation dans le pays miné par les crises politiques. Alors que la décision de congédier le Premier ministre Hichem Mechichi, qui tenait tête au président et ne le consultait pas, et le gel du Parlement mettant fin au règne de Rached Ghannouchi le chef des islamistes d'Ennahda en application de l'article 80 de la Constitution tunisienne, a été accueillie comme une fête nationale en Tunisie, le pays s'inquiète à présent de la tournure que prendront les prochains événements. En effet, ces annonces ne se sont pas faites sans provoquer de vives réactions à l'internationale. Plusieurs pays ont exprimé leur préoccupation quant au respect de l'Etat de droit et de la démocratie dans le pays, tout en appelant au rétablissement du fonctionnement du Parlement. Rached Ghannouchi, le chef du parti Ennahda, d'inspiration islamiste, et patron du Parlement, avait dénoncé un « coup d'Etat » et organisé un sit-in devant l'institution et a été rejoint par ses soutiens, dont ceux du bloc Al Karama, l'un des partis les plus détestés en Tunisie à cause de Saifeddine Makhlouf, un personnage sulfureux, violent, et misogyne, qui accumule les scandales. Le député, qui s'est vu retirer son immunité parlementaire suite au décret présidentiel, a rapidement été interpelé jeudi soir par la garde nationales qui l'a interrogé suite à un nouvel accrochage avec les force de l'ordre à l'aéroport de TunisCarthage. Une autre décision du président tunisien est sujette à de nombreux questionnements dans le pays. Il s'agit de l'interdiction de quitter le territoire ciblant les ministres, responsables politiques, députés, et surtout les hommes d'affaires tunisiens. Kais Saied a émis un décret présidentiel pour interdire la sortie de territoire de nombreux hommes d'affaires tunisiens, au moins 490 noms figurent sur une liste que le président tunisien détient. M. Saied leur a offert deux choix, soit de payer en investissant des leurs régions pour le développement du pays, soit faire face à la justice et certainement aller vers la case prison. Sur les réseaux sociaux, la nouvelle n'a pas fait l'unanimité. Les internautes ont été des centaines à réclamer moins de clémence vis à vis de ces hommes d'affaires et de tous les faire payer. Cependant, selon des Constitutionnalistes tunisiens, cette mesure décidée par le président Saied serait anticonstitutionnelle. Ils expliquent qu'un décret présidentiel ne saurait outrepasser la Constitution qui n'interdit la sortie de territoire à aucun ressortissant s'il n'est pas poursuivi par la justice et fait l'objet d'une condamnation. Et dans le cas de ces hommes d'affaires, nombreux sont ceux qui n'ont jamais été inquiétés par la justice jusqu'ici. L'article 163 pourrait porter un coup fatal à certains partis Après son attaque frontale envers Rached Ghannouchi qui pesait de tout son poids pour ralentir et boycotter la vie politique en Tunisie, Kais Saied aurait un autre article de la Constitution sous le coude qui lui permettrait de mettre un terme à l'hégémonie des islamistes au sein du Parlement. Il s'agit de l'article 163 du code électoral qui lui permettrait, s'il est utilisé en conjonction avec un rapport de la Cou des comptes tunisiennes, de mettre au moins 80 députés en dehors de l'ARP, le Parlement tunisien. L'article 163 indique que les partis ayant reçu des financements étrangers pour leur campagnes électorales doivent être bannis du Parlement. Et, selon un rapport de la Cour des comptes, les partis d'Ennahdha, de 9alb Tounes et de Ich Tounsi ont tous été financés par l'étranger. En vertu de cet article, les personnes concernées pourraient même être interdites de se présenter aux prochaines législatives. Kaid Saied qui n'a toujours pas nommé de nouveau Premier ministre, reste encore silencieux, jouant des pions très stratégiquement. Les Tunisiens sont tenus en haleine devant ces développements, mais les institutions commencent à s'inquiéter de la lenteur de la reprise politique. Dans un communiqué, le Conseil des Chambres Mixtes a appelé le président à « sauver la jeune démocratie de toute dérive et préserver le droit et les libertés », en recommandant la mise en place de réformes urgentes, et d'adresser un message rassurant aux chefs d'entreprise, plus particulièrement les investisseurs étrangers. Le Conseil, dans ses recommandations a également prié le président d'engager les forces vives du pays pour la mise place, « dans les meilleurs délais, d'une feuille de route claire et consensuelle » qui permettra de préserver e la paix et de la sécurité dans le pays, contribuer à la relance économique et la restauration de la confiance.