Une autre affaire qui touche au corps infirmier vient remettre sur la table du ministre de la santé la question du « vide juridique » dont se plaint cette catégorie de professionnel de santé depuis des années. Dans les détails rapportés par l'Organisation démocratique du travail (ODT) et Fatima-Zahra Belline du Mouvement des infirmiers et techniciens de santé du Maroc (MITSM), deux infirmières ont été pointées du doigt après la disparition d'une boite de vaccination anti-covid. Les infirmières, au centre de santé de la commune d'Oulad Ghanem à la province d'El Jadida, ont été transférées au poste de la gendarmerie royale dans le cadre d'une enquête qui a été ouverte à cet effet. L'enquête a duré jusqu'à 2h du matin, dans la nuit du samedi 27 février, et a été suivie par une fouille minutieuse des domiciles de deux infirmières, dont l'une vient tout juste de prendre ses fonctions il y a moins de trois semaines. Une injustice, a dénoncé l'ODT dans un communiqué où elle souligne que « le corps médical est pointé du doigt dès qu'il y a un problème, malgré les nombreux communiqués où l'organisation appelait à garantir la protection du personnel médical, de manière générale et les infirmiers et techniciens de santé en particulier« . Les infirmières, choquées par ce qui leur est arrivé, ont fini par baisser les bras après la fin de l'enquête, qui n'a toujours pas révélé de coupable selon plusieurs sources de Hespress Fr. Mais les syndicalistes, eux, ne comptent pas le faire. Selon Fatima-Zahra Béline, également coordinatrice de communication au sein du MITSM, si un des infirmiers a été pointé du doigt aujourd'hui « injustement, cela risquerait de se produire encore et encore à chaque fois qu'il y a un pépin, ce que nous refusons. Au sein de l'ODT ou encore le MITSM, nous défendons des principes et des valeurs. Il est hors de question qu'on nuise au corps médical de manière injuste même si l'un d'eux baisse les bras« . Le REC, un rêve pour les infirmiers Bien avant la pandémie, Hespress Fr a beaucoup couvert les protestations des infirmiers et techniciens de santé où ils appelaient sans cesse à la création du référentiel d'emploi et de compétences (REC) dans le but d'organiser leur profession. Mais malgré l'escalade, cette revendication peine à voir le jour de même que la création de l'ordre des infirmiers et techniciens de santé. « Si nous avions un ordre, nous serions mieux protégés. On n'oserait pas pointer du doigt dès qu'il y a un problème un infirmier ou un technicien sans preuves concrètes, ou le trainer dans les postes de police à chaque fois. Aujourd'hui, notre demande de création du REC est devenue urgente. C'est le seul moyen de définir clairement les fonctions de l'infirmier et technicien de santé. Ce qu'il doit faire ou pas. Sans ce référentiel, l'infirmier exercera toujours des tâches qui ne relèvent pas de ses responsabilités. Mais quand il y a un problème, il devient le seul responsable« , dénonce la militante. D'ailleurs, en octobre 2020, la Direction des ressources humaines du ministère de la Santé avait fourni des éclaircissements sur la régularisation de la situation des infirmiers et techniciens de santé. Ce département avait indiqué que le ministère de la santé en collaboration avec celui de l'économie et des finances, travaille pour achever le processus d'intégration dans des délais raisonnables, ainsi que l'application du décret n°2.17.535 relatif au règlement général de l'ordre des infirmiers et des techniciens de santé entre les deux ministères. À ce jours toujours rien. Tout cela, s'ajoute au stress quotidien que vivent les cadres de santé, notamment les infirmiers, qui sont au front face à la pandémie depuis son début. « Nous étions présents depuis le début de la pandémie sans avoir la moindre reconnaissance des autorités. Et aujourd'hui même, c'est grâce aux infirmiers, et autorités publiques, que la campagne de vaccination se passe bien. Mais nous accumulons un stress qui nous conduit droit vers la dépression, sans aucune reconnaissance« , s'insurge Fatima-Zahra. Cette infirmière, militante, et mère de famille, nous a confié à coeur ouvert que lorsqu'elle était en service dans l'un des centres de vaccination de la capitale, et quand elle rentrait le soir chez elle, elle n'avait pas un moment pour ses enfants vu les longues journées auxquelles elle avait droit lors de cette campagne de vaccination nationale qui se passe plutôt bien, selon plusieurs témoignages. Fatima-Zahra vaccinait entre 150 et 200 personnes cibles par jour. Quand la salle d'attente était pleine, et que l'heure de sortie arrive, elle restait avec sa collègue pour faire vacciner les personnes qui attendent. Pour revenir à l'affaire des infirmières, l'ODT a appelé le ministre à les contacter pour leur remonter le moral et donner l'ordre à l'inspection générale du ministère de la santé d'ouvrir une enquête rapide pour lever le voile sur les tenants et aboutissants de cette affaire, notamment les accusations portées à leur encontre et définir les sanctions sur les erreurs et les infractions organisationnelles et gestionnaires de l'un des chantiers nationaux le plus importants du pays, à savoir la campagne de vaccination. De plus, l'organisation demande l'installation de caméras de surveillance dans l'ensemble des centres de vaccination anti-covid avec la définition des responsabilités dans la gestion du trajet des étapes de vaccination. Mais avant tout cela, la question que l'on serait tenté de poser est: Pourquoi voler un vaccin qui est assuré gratuitement pour toute la population? On ne saurait parler de revente ou de spéculation car justement la prestation est gratuite pour tous…En attendant les résultats de l'enquête, ces interrogations restent en suspens.