L'apparition en septembre à Londres au Royaume-Uni d'une nouvelle souche du coronavirus beaucoup plus contagieuse que les autres inquiète les épidémiologistes. Cette nouvelle variante du Sars-CoV-2 en plus de sa propagation rapide (50 à 75% plus contagieuse), devient également la forme dominante entrainant « une très forte hausse » d'hospitalisations dans les pays où elle a été détectée. Pour l'heure le Maroc en est épargné. Mais pour autant, on n'en reste pas les mains croisées. Le professeur Azeddine Ibrahimi, directeur du laboratoire de biotechnologie à la faculté de médecine et de pharmacie de Rabat, a tenu à rassurer quant aux inquiétudes qui ont suivi la nouvelle de la mutation du coronavirus, apparu en Grande-Bretagne et qui a soulevé crainte et appréhension auprès de la communauté des chercheurs du monde entier. Le professeur a confirmé qu'après avoir effectué une analyse sur soixante-dix échantillons aléatoires dans la région de Rabat-Salé-Kénitra, les résultats ont montré l'absence de la souche N501Y actuellement dans la région susmentionnée, tandis que l'analyse des données de la région de Casablanca est toujours en cours. Le directeur du laboratoire de biotechnologie a évoqué que dans ce contexte, depuis mars, au niveau national, il a été fait montre de l'absence de la souche N501Y dans plus de 170 «génomes» analysés, avec quatre cas saisis une seconde fois et leurs séquences génomiques sont en cours de ré-analyse. Azeddine Ibrahimi a déclaré que « les mutations surviennent naturellement dans le « génome » des virus chaque fois que le virus se multiplie et se propage parmi les humains. Ces variantes dont certaines le rendent plus ou moins pathogène, sont considérées comme des « mécanismes » naturels pour se défendre et « un droit à la vie », en référence à l'accumulation de ces mutations qui en résultent à un rythme d'une à quatre par mois. Les coronavirus mutent tout le temps et il n'est donc pas surprenant que de nouvelles variantes du Sars-CoV-2 aient émergé de plusieurs de mutations dans le «génome» du virus depuis son apparition en 2019. Le spécialiste marocain en la matière a ajouté que « la majorité des mutations observées dans le «génome» de la Covid-19 n'ont pas d'effet clair sur le virus, et il est probable que ce sera pour une très petite minorité. Ces mutations affectent la formation des protéines et modifient le virus de manière remarquable, notamment l'accumulation d'un groupe d'entre elles ». Et le directeur du laboratoire de biotechnologie à la faculté de médecine et de pharmacie de Rabat d'expliquer, « La nouvelle souche porte notamment une mutation, nommée N501Y, dans la protéine du « spicule » du coronavirus, la pointe ou l'épine coronaire qui se trouve à sa surface et qui lui permet de s'agripper aux tissus et de s'attacher aux cellules humaines pour les pénétrer ». Azeddine Ibrahimi a révélé qu'« une simulation de recherche informationnelle préparée par le Laboratoire de Biotechnologie de Rabat, en tant que laboratoire national de référence en génomique, sera bientôt publiée et que cette mutation britannique à elle seule n'affectera ni le diagnostic ni l'efficacité des vaccins ». Le scientifique a ajouté : « Mais il faut souligner que le génome d'un virus «Covid» continuera d'évoluer et de se diversifier, laissant de nouvelles mutations avec d'autres effets, appelant à la nécessité d'adopter un plan national efficace de vigilance génomique pour faire face à ces changements afin de collecter de meilleures données et de suivre efficacement l'évolution génétique du virus ». Le professeur a précisé que pour une vigilance génomique nationale efficace, le laboratoire a pu acquérir deux nouvelles technologies, ThermoFisher et Nanopore Oxford, en plus de l'Illumina et Sanger ABI 500, qui sont utilisées depuis 2015 dans le laboratoire. Ibrahimi a expliqué que « le projet national «génome» vise à développer un plan de vigilance génomique qui permet de suivre l'évolution du virus et l'étendue de son impact sur la situation épidémiologique au Maroc. Il déterminera l'effet de ces nouvelles souches sur le processus de diagnostic, et étudiera les changements génomiques sur l'augmentation des infections et l'évolution de la capacité à infecter du virus. En outre ce plan vise à déterminer l'étendue de la cause d'une maladie grave, et l'effet de ces mutations sur la protection immunitaire causée par l'infection, dont la perte peut conduire à une réinfection par le virus ». Le professeur et conseiller scientifique a également souligné pour conclure que « la plus grande préoccupation qui hante les chercheurs du monde entier est l'échec du vaccin à produire une immunité humaine à ces nouvelles souches, ce qui pourrait indiquer que les nouveaux virus peuvent être résistants à toute vaccination ».